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Toronto : 25, ans toujours puceau … et meurtrier de masse

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25 avril 2018

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Incels : la révolte des puceaux. À Toronto, le forcené n’était pas un terroriste islamiste mais un célibataire « involontaire », en guerre contre les femmes qu’il a principalement visées lors de sa course folle à bord d’une voiture-bélier. Que dit Alek Minassian de nos sociétés contemporaines ?

 

 

40 ans toujours puceau est une comédie américaine plutôt lourdingue, dans la veine des Mary à tout prix et American Pie. Elle fit notamment le succès de Judd Apatow, depuis devenu un ponte de l’humour régressif si caractéristique des Etats-Unis, mais aussi de l’interprète Steve Carell, aussi drôle que pathétique dans le rôle principal d’un homme mûr de 40 ans n’ayant jamais eu de relations intimes avec une femme. Evidemment, ne nous le cachons pas, le sujet prête à sourire, sinon à rire. Y-aurait-il toutefois une réalité tragique que nos sociétés se refuseraient de voir, au croisement de la solitude moderne et de la misère sexuelle ? Lundi 23 avril, à Toronto, un homme a tué dix personnes innocentes à l’aide d’une voiture-bélier, selon un modus operandi rappelant celui utilisé par certains islamistes à Nice, Barcelone ou Londres. Alek Minassian n’est pourtant pas un fou d’Allah, ni même un terroriste animé par une idéologie politique, du moins en apparence. Il est tout simplement un misogyne d’un genre nouveau, un célibataire frustré membre de la communauté numérique des « Incels » (soit, célibataires involontaires).

 

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Née sur divers forums internets outre-Atlantique, la communauté des Incels réunit des hommes hétérosexuels éternels célibataires, souvent vierges, mus par la haine des couples « normies », surnommés les « Chad et Stacy », prénoms typiques du footballeur universitaire et de sa pompom girl de petite amie, et des femmes, dépeintes comme étant de petites créatures superficielles, égoïstes et intéressées. À l’image de toutes les petites communautés soudées autour d’idées et de préjugés, celle des Incels partage des codes de reconnaissance, un langage propre, un humour d’outcasts rejetés par une organisation sociale de plus en plus compétitive, déposant sur le bas côté les sous doués de l’amour et des relations charnelles. Peu après la tuerie de Toronto, un Incel connu écrivait : « Les médias et les normies [les non-Incels] nous rendent responsables de l’attaque alors qu’ils devraient blâmer toutes les femmes qui ont ignoré Alek ».

À l’image de toutes les petites communautés soudées autour d’idées et de préjugés, celle des Incels partage des codes de reconnaissance, un langage propre, un humour d’outcasts rejetés par une organisation sociale de plus en plus compétitive, déposant sur le bas côté les sous doués de l’amour et des relations charnelles. 

Certains d’entre eux mettaient même en avant une discrimination à raison du physique que subiraient les Incels, rejoignant les discours avancés par les diverses minorités et tribus qui hantent l’inconscient postmoderne. Les « moches » seraient-ils lestés d’un désavantage dans la grande compétition amoureuse et sexuelle, celle qui nous enjoint de nous reproduire pour perpétuer notre patrimoine génétique ? Oui, la belle affaire. À chaque période de l’humanité, surgissent de nouveaux critères procurant un atout pour parvenir à séduire les membres du sexe opposé. Ce n’est pas une nouveauté. En revanche, ce qui est nouveau, c’est que l’idéologie de l’égalité, c’est-à-dire l’égalitarisme, s’est imposée. Et, « en même temps », les standards de réussite se sont normalisés, massifiés. « Chuck et Stacy » représentent un exemple à suivre, lequel est reproduit dans les œuvres de fiction.

La différence principale entre leur groupe et d’autres, tels que les LGBT, les Vegans ou des minorités ethno-culturelles, est que leur « handicap » de groupe n’est pas pris en compte par la société. Au contraire, la majorité s’en moque et les moque

Les Incels ne sont pas des rebelles refusant le conformisme, mais des « normies » qui ne répondent pas aux critères nécessaires à la poursuite de leur objectif. Ils le disent d’ailleurs eux-mêmes, se déclarant « involontairement » célibataires. La différence principale entre leur groupe et d’autres, tels que les LGBT, les Vegans ou des minorités ethno-culturelles, est que leur « handicap » de groupe n’est pas pris en compte par la société. Au contraire, la majorité s’en moque et les moque. Alors que le législateur occidental prend des mesures pour corriger des inégalités de fait entre les couples hétérosexuels et les couples homosexuels, donnant à ces derniers un « droit à l’enfant » que la nature leur refuse, par le biais de la technique médicale ou de la technique juridique de l’adoption, les Incels n’ont pas de lobbyistes soufflant des lois aux gouvernements mondiaux pour que des femmes soient obligées de les épouser ou que des patrons soient contraints d’en employer un quota.

 

 

« En système économique parfaitement libéral, certains accumulent des fortunes considérables ; d’autres croupissent dans le chômage et la misère. En système sexuel parfaitement libéral, certains ont une vie érotique variée et excitante ; d’autres sont réduits à la masturbation et la solitude. Le libéralisme économique, c’est l’extension du domaine de la lutte, son extension à tous les âges de la vie et à toutes les classes de la société. De même, le libéralisme sexuel, c’est l’extension du domaine de la lutte, son extension à tous les âges de la vie et à toutes les classes de la société », écrivait Michel Houellebecq dans Extension du domaine de la lutte, ouvrage qui reste près de vingt-cinq ans plus tard d’une urgence cruciale. Michel Maffesoli prétend que les sociétés postmodernes permettent le ré-enchantement du monde. Quid des Incels meurtriers ? Quid de Nasim Aghdam, la terroriste végane et animaliste qui a attaqué les locaux de YouTube ?

 

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Il est à craindre qu’aux meurtriers de masse habituels s’ajoutent des sous catégories spécifiques, fondées sur les émotions infantiles que fait naître un monde hystérisé, névrosé. La tension entre l’égalitarisme et la compétition est trop forte.

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