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Carte noire pour Patrice Jean : L’assoupissement satanique de la morale

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Publié le

27 janvier 2025

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Pour lutter contre la vogue de la littérature feel good, L’Incorrect convie les écrivains les plus corrosifs de notre époque et donne carte blanche à leur mauvais esprit. Invité du mois : Patrice Jean, auteur dernièrement de La Vie des Spectres (Cherche-Midi).
© Benjamin de Diesbach
Le roman russe, plus que le roman français, a médité sur le sens de la vie, la métaphysique, la morale, si bien que les grands écrivains russes, de Gogol à Dostoïevski, de Tolstoï à Grossman, par le biais de leurs personnages, précèdent ou défient la pensée des philosophes. Pour supérieurs que soient Balzac, Stendhal, Flaubert ou Proust, ils explorent la condition humaine, sans se fracasser plus que ça aux tourments de la morale. Bernanos et Camus, en ce sens, sont plus russes que français. J’ignore si on a déjà relevé que Tolstoï, dans Résurrection, soutient, presque soixante-dix ans avant Hannah Arendt, la thèse de la banalité du mal (nuancée et corrigée). Confronté au monde perdu des prisonniers et des directeurs de pénitencier, à l’univers de la justice, des gardiens, le personnage de Nekhlioudov s’interroge sur leur indifférence à la vraie justice. Voici le résultat de sa méditation : » Cela s’est fait, pensait Nekhlioudov, parce que tous, directeur, gouverneur, officier de paix, sergents de ville estiment qu’il y a des situations dans lesquelles une attitude humaine dans les rapports directs avec les hommes n’est pas obligatoire. Mais tous ces gens […] s’ils n’étaient pas gouverneur, directeur, officier, auraient pensé vingt fois au moins : est-il possible d’envoyer ces hommes par une telle chaleur et en une telle masse ? Vingt fois en cours de route, ils se seraient arrêtés et, remarquant qu’un homme s’affaiblissait et s’essoufflait, l’auraient fait sortir des rangs et conduit, à l’ombre, lui auraient donné de l’eau, l’auraient laissé se reposer; enfin, lorsque le malheur se serait produit, ils auraient montré de la compassion. » Et pourquoi ne l’ont-ils pas fait ? se demande Nekhlioudov. Parce qu’ils plaçaient « leur fonction au-dessus des devoirs d’humanité », « uniquement parce qu’ils servaient comme des fonctionnaires ». [...]
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