Jadis icône des Inrocks, qui ont apposé leur logo sur la réédition augmentée de l’album culte des Smiths, The Queen Is Dead, Steven Patrick Morrissey fait désormais figure de pestiféré. Mais quel crime a-t-il donc commis, hormis oser se souvenir du « monde d’avant »?
L’actualité du « Moz » est chargée : un nouvel album chez BMG, « Low in High School », un film, England Is Mine, sur son adolescence pré-Smiths avec Roger O’Donnell (clavier des Cure) pour producteur exécutif. Pourtant, la presse semble davantage se focaliser sur ses propos que sur son travail. Parce qu’à notre époque intoxiquée à la moraline, il semble désormais impossible d’apprécier un artiste s’il s’est rendu coupable de ce qu’elle-même nomme une « sortie de route ». Les relations conflictuelles entre la presse et Morrissey ne sont pas neuves: elles remontent au siècle dernier et aux colonnes du New Musical Express. Rappelons qu’avant de subir une lente décadence au tournant du millénaire puis de devenir un vulgaire prospectus, le NME faisait et défaisait les carrières des années 60 aux années 90. Pour des générations de fans de pop music, et dans un pays qui en a fait sa religion, l’hebdomadaire musical était à l’avantgarde des tendances, capable même d’imposer des inconnus en couverture. Dans sa biographie publiée en 2013, le « Mozzer » rappelle que, dès le quatrième album des Smiths, « The Queen is dead » en 86, s’était achevée une lune de miel débutée en 1982 avec les deux « weekly » les plus influents d’alors, le NME donc, et le Melody Maker. On ne brûle jamais que ce que l’on a adoré – surtout si l’objet d’adoration ose passer d’un label indépendant à la major EMI, ce qui relève quasiment d’une faute idéologique.
Un journaliste du NME avait alors écrit que Morrissey l’aurait reçu en tutu ! L’énormité de la nouvelle n’empêche pourtant pas de nombreux fans d’y croire. À la même période, un musicien raté de Manchester donne au Melody Maker une interview fictive ridiculisant le chanteur. Et en sus, alors qu’il se fait évincer des Smiths, selon lui par jalousie, le Mancunien connaît en solo un énorme (...)
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