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Bill Browder is watching you, Andreï Nekrasov !

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16 mai 2019

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Figure de l’opposition russe depuis le début des années 2000, Andreï Nekrasov se retrouve banni par ses pairs à cause de son dernier film: se refusant à une critique pavlovienne de la « démocratie poutinienne », le cinéaste est pris dans un étau américano-russe digne de la Guerre froide. Andreï Nekrasov vient de poser à Roissy. On le retrouve quelques heures plus tard dans le salon de l’hôtel Hyatt près de la gare Saint-Lazare. Sa tignasse blanche et bouclée borde ses yeux clairs. Ses mains qui s’agitent lui donnent un air d’éternel étudiant, en quête d’authenticité et de justice. Il a pourtant la soixantaine passée et n’est pas un inconnu dans le monde du cinéma et de la politique russes. Il maîtrise parfaitement l’anglais et l’allemand et s’excuse en français pour son retard. Nekrasov réside quelque part entre Londres, Berlin, où vit sa compagne, et Oslo où il travaille à son prochain film. À Paris, il a gardé quelques amis croisés sur les bancs de Jussieu, une respiration pour ce jeune homme de Léningrad alors enfermé dans l’atmosphère brejnévienne. Son rêve est de filmer, ce qu’il apprend à l’université de Bristol en Angleterre. Assistant du grand Andreï Tarkovski, il ne tarde pas à percer: son premier court-métrage, Springing Lenin, est diffusé par la BBC et primé à Cannes en 1993. Très critique de la nouvelle Russie d’Eltsine et de Poutine, Nekrasov devient le chouchou des milieux culturels occidentaux. Il est parmi ces dissidents qu’on s’arrache à Londres et Berlin. Avec Rébellion, le cas Litvinenko, le cinéaste connaît la gloire. Son enquête sur le meurtre de l’espion russe passé à l’ouest est sélectionnée hors compétition à Cannes en 2007. Poutine, Glucksmann, Berezovski, a Litvinenko et Politkovskaïa interviennent dans le documentaire. Il est encensé par le New-York Times et le Guardian mais sa maison finlandaise est saccagée, une photo de Litvinenko laissée dans son lit… En 2015, c’est tout naturellement qu’il contacte le financier Bill Browder dont le comptable Sergueï Magnitsky est mort dans une geôle russe sur fond de fraude fiscale. Il ne le sait pas encore, mais sa vie de cinéaste bascule. Il croit d’abord tenir un nouvel exemple de la cruauté des services de Poutine mais à travailler sur les circonstances du meurtre, il comprend que Bill Browder, le patron anglo-américain du fond Hermitage, n’est pas un business angel. Après avoir passé une décennie à profiter de la corruption et de l’économie casino de Moscou, le magnat est inquiété en 2004 par un contrôle fiscal et dénonce en retour une escroquerie d’État. Le financier de Londres fait évidemment de Magnitsky un martyr de la démocratie russe. Son lobbying au Sénat des États-Unis débouche sur des sanctions qui visent de nombreuses personnalités.   Très critique de la nouvelle Russie d’Eltsine et de Poutine, Nekrasov devient le chouchou des milieux culturels occidentaux. Il est parmi ces dissidents qu’on s’arrache à Londres et Berlin.   C’est le Magnitsky act, fièrement exhibé par les Sénateurs les plus faucons de Washington: John Mc Cain et Ben Cardin. Après le printemps arabe et la réélection de Poutine, le gel touche à nouveau les relations américano-russes et l’affaire Magnitisky tombe à pic. Le Magnitsky act vise depuis lors toutes les personnes qui ne respectent pas les droits de l’homme, comme les assassins de Jamal Kashoggi. En 2016, le film documentaire The Magnisty act, behind the scenes remet en cause la version officielle de la mort de Magnitsky et passe donc mal. Sa diffusion au Parlement européen est brusquement annulée quelques heures avant sa projection. Arte, qui a financé le film, refuse de le diffuser en France et en Allemagne. Trois ans après, Andreï Nekrasov prépare sa revanche.   Quelle est votre situation aujourd’hui, trois ans après votre lâchage par Arte?? Depuis que j’ai été déprogrammé en France et en Allemagne, c’est assez dur. Arte avait financé une version française, avec un coûteux doublage synchronisé. Malheureusement, le film n’est jamais sorti en France et Arte a demandé à notre producteur de rembourser près de 120 000 euros. Notre avocat a fait valoir que c’était impossible mais Arte doit encore expliquer pourquoi le film a été annulé. La chaîne avait approuvé toutes les conclusions de mon enquête avant de céder à la pression de Bill Browder et des politiques qui soutiennent ce canular « Magnitski ». Ils s’appuient sur le fait que Bill Browder, protagoniste du film, a retiré son accord en raison des critiques à son encontre. Mais comment faire des films d’investigation si les puissants interdisent ce qui les gêne, avec la bénédiction de la télévision subventionnée ? Vous étiez un cinéaste engagé contre Poutine, membre du parti libéral Solidarnost?: vos ennemis ou anciens amis disent que vous avez changé à partir de 2014, date de la révolution en Ukraine. Vous seriez désormais un agent du FSB… Ça, je vous le dis tout de suite, je ne le laisserai pas passer et je poursuivrai cette diffamation en [...] Suite dans le dernier L'Incorrect et en ligne pour les abonnés.
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