L’Histoire, et plus particulièrement le récit qui en est fait par un pays, impacte de manière directe l’attitude de sa population. La fierté nationale est un moteur puissant de confiance en soi. Mais ce levier est à double tranchant : depuis plusieurs décennies, il est le principal moyen utilisé pour faire accepter aux Européens leur propre disparition, via la création et l’entretien minutieux d’une culpabilité historique. Le propos de La mémoire assiégée est de proposer une suite d’éclaircissements sur plusieurs périodes historiques manipulées ou dissimulées.
Ce livre est rigoureux sur le plan scientifique et très documenté. L’auteur use d’un style peu littéraire mais précis et efficace. L’ouvrage présente un intérêt historique certain et a une certaine qualité pédagogique. Cependant le parti-pris de l’auteur est plus sujet à discussion : constatant avec un certain réalisme l’hégémonie de la posture victimaire dans les débats, Robin Terrasse cherche dans l’Histoire européenne les occasion de se prévaloir d’une invasion, d’une colonisation, de mise en esclavage, etc. Ces éclaircissements sont intéressants mais le fait d’accepter d’entrer dans la compétition victimaire est en soi une négation de ce qu’est l’Europe, quand bien même notre continent a eu sa part de douleur. La lecture de ce livre sera très pertinente comme complément pour un public disposant déjà de repères historiques, et capable de contextualiser les différents faits présentés par l’auteur.
Il y a quelque chose de Jean Sévilla dans La mémoire assiégée. Dans la manière de démontrer avec précision des vérités historiques porteuses de sens idéologiquement. La gauche n’a jamais eu le moindre scrupule à manipuler éhontément l’Histoire pour s’en servir dans le combat idéologique. Cette attitude répulsive additionnée au respect naturel des conservateurs pour l’Histoire nous donne toujours mauvaise conscience lorsque nous pouvons l’utiliser, alors qu’il ne s’agit pas de la tordre mais bien de la proclamer. Dans cet esprit, ce contre-argumentaire politiquement incorrect est bienvenu, s’il peut participer à la mise en place un certain réalisme dans les débats et fournir quelques munitions factuelles au défenseurs du vrai. Sans entrer dans le jeu consistant à se montrer la plus grande victime possible, les Européens doivent savoir que leur Histoire est le récit d’une lutte millénaire pour rester eux-même. Alors que le blanc est en train de devenir l’incarnation universelle du mal, tout ce qui contribuera à faire comprendre que l’Histoire est toujours plus complexe que l’on croit est une bonne chose.
La mémoire assiégée, Robin Terrasse
Editions Dominique Martin Morin
418 pages, 28.50€