[vc_row][vc_column][vc_column_text css=”.vc_custom_1548842912792{margin-right: 25px !important;margin-left: 25px !important;}”]Ami de longue date de l’écrivain Renaud Camus, Jean-Paul Marcheschi, peintre et sculpteur d’origine corse, expose en cette rentrée à Toulouse. Son œuvre, parmi les plus passionnantes de notre époque, fait l’objet d’un incompréhensible snobisme de la part des grandes institutions et des gens « en place ». Incompréhensible ?
« Il est pourtant un domaine où les amateurs en très grand nombre peuvent espérer satisfaire sans courir à leur ruine des fantasmes de possession, c’est celui de l’art le plus contemporain. On trouve à toutes les époques, pour trois sous, des œuvres de très jeunes artistes. Or, choisir parmi elles, avant qu’aucun discours critique constitué ne les ait soutenues ni seulement désignées à l’attention, c’est échapper par définition au stéréotype qui menace toute relation de type muséographique avec l’art : l’admiration n’est pas requise d’autorité, la beauté n’est pas officiellement établie avant le regard qui la reconnaît et le jugement personnel qui la consacre ».
Ces phrases sont extraites d’Esthétique de la solitude que Renaud Camus dédiait, dans les années 80, à l’ami Flatters – Jean-Paul Marcheschi, ainsi surnommé par l’écrivain qui le connut rue Flatters, à Paris.
Lire aussi : FEDERICO FELLINI ÉCRIVAIN CINÉMATOGRAPHIQUE
C’était l’époque de Tricks, Camus était pris pour un écrivain d’avant-garde, une icône de la littérature homosexuelle. Il était préfacé par Roland Barthes, avait frayé avec Andy Warhol, s’était fait draguer par Aragon… Il connaissait Marcheschi et appréciait son œuvre en amateur avisé.
Dans l’antre du diable
S’il demeure l’un des critiques d’art les plus fins et les plus profonds de notre époque et l’un des écrivains les plus doués et les plus érudits, la presse officielle l’a voué aux gémonies, les éditeurs l’ont lâché, son œuvre a été jetée en enfer, son nom rendu imprononçable.
Énoncez son nom à voix haute au milieu d’une cohorte de journalistes respectables : vous jetterez à coup sûr un froid plus glacial que Francis Heaulme s’il sortait soudain d’un placard. Renaud Camus en enfer, on commence à comprendre pourquoi son cher ami Marcheschi se retrouve quant à lui au purgatoire car il faudrait – hélas ! – si l’on voulait connaître toute la diversité de son œuvre, se rendre au château de Plieux où l’écrivain détient le plus important ensemble des œuvres de Marcheschi.
[ #CULTURE ?? ] @WillFranken
"Notre culture occidentale tremble devant la propagande trans, les lubies victimaires et les dogmes de l’islam. Cela suscite des performances médiocres. La peur est un puissant agent du conformisme." #lincorrect ??https://t.co/wX3dWUUSHy
— L'Incorrect (@MagLincorrect) January 4, 2019
Car voici sans doute une autre explication à la mise à l’index (relative) de l’œuvre de l’artiste corse, son érudition, ses références littéraires et picturales qui, alliées à une démarche artistique d’ordre quasi-métaphysique, en font le puissant mécontemporain de ce qui s’expose en grandes pompes vaniteuses dans les temples de l’art contemporain parisien.
Écrits par la lumière
« Nous sommes écrits par la lumière. Lumen de Lumine (…) Il faut revenir à la Genèse et aux évangiles. » Par ces mots commence l’un des films documentaires consacrés au peintre et sculpteur, qui est projeté dans l’exposition du musée des arts précieux Paul-Dupuy de Toulouse, où nous voyons l’artiste à l’œuvre tandis qu’il discourt. Tout est, chez Marcheschi, affaire de feu et de lumière ; de jeux d’ombres ; d’esprit qui embrase et de mondes surgissant sous l’épreuve du feu.
« La peinture rompt avec l’idée et avec le langage, clame le peintre. Nous sommes tous mal accrochés au langage, il faut revenir à l’enfance. »
L’eau et le feu, ce sont les deux éléments avec lesquels il compose depuis plus de trente ans. Peintre depuis l’âge de 14 ans, c’est un voyage au Stromboli en 1984 qui lui révèle son talent. Baptisé par le feu, l’artiste jette les pinceaux de martre pour des flambeaux : il ne peindra plus que par la flamme. « Le feu est entré incidemment dans ma vie et dans ma peinture », s’excuse-t-il presque.
Incidemment ? Bien sûr ; le feu, nul ne l’appelle de ses vœux, c’est lui qui ordonne, qui nous ordonne. « Dante a aussi généré les flammes, poursuit-il. Ses corps au paradis sont comme des flammes. » Alors la voici, la véritable passion de sa vie : Dante et sa Divine comédie, qu’il considère comme le plus beau poème jamais écrit. À cet homme, il fallait un volcan pour se révéler totalement. Ce sera le Stromboli, métaphore inouïe du poète. Le poète comme le peintre s’expriment par le feu, le reste n’est que littérature.
Lire aussi : Tristan Garcia : la fresque impossible
Contre le langage
« On ne demande pas au peintre de s’expliquer », précise-t-il d’emblée, avant de présenter d’une parole sûre chacune de ses œuvres, dont toutes ont rapport au feu, à la mythologie gréco-latine, à la Bible, à l’esprit qui gouverne le monde et qui embrase les cœurs.
« S’il n’est écrivain, c’est qu’il ne daigne », dit de lui Renaud Camus. Car ses œuvres en sont pleines de son écriture, il ne « peint » d’ailleurs que sur des feuillets de même format 21 X 29,7 cm qui lui ont auparavant tenu lieu de carnets de notes, de journal, de brouillons, d’esquisses, son œuvre comme un palimpseste avoué, le feu venant tout laver, et creuser son sillon dans l’écrit, pour offrir à la beauté son ouvert.
Marcheschi ne peint qu’au flambeau, c’est-à-dire brûlant des cierges spécialement fabriqués pour lui en Vendée, dont le dépôt de cire et de suie sont la matière presque unique de l’œuvre – et cela paraît à celui qui s’y arrête hautement avant-gardiste.
« La peinture rompt avec l’idée et avec le langage, clame le peintre. Nous sommes tous mal accrochés au langage, il faut revenir à l’enfance », ajoute-t-il, en murmurant que notre société est malade du langage. Il objecte à écrire, ou plus précisément, à prétendre écrire à partir de rien car « on n’écrit jamais que sur de l’écrit ».
« Peut-être que la peinture recrute parmi les abandonnés du langage. Ceux-ci forment une communauté à part. » Peut-être. Et l’on pourrait en dire autant des poètes, le peintre ne nous contredirait sans doute pas, qui doit à Mallarmé le titre de l’exposition, L’Alphabet des Astres.
[ CULTURE ? ] #Houellebecq vient-il de livrer son chef d'oeuvre ?
Comme c'est Noël, on vous offre le début de la critique de Romaric Sangars, notre rédacteur en chef culture #serotonine #lincorrect????https://t.co/CfNg21yBx2
— L'Incorrect (@MagLincorrect) December 27, 2018
Sauvé par le feu
Le feu l’aura finalement sauvé. En lui offrant d’abord l’ouverture vers son art : « le feu produit de l’or », dit-il, et ce n’est pas qu’une métaphore. En le sauvant également aux yeux de ses contemporains dont certains, aveugles à la dimension sacrée de son œuvre, trouvent tout au moins à s’ébahir de sa technique extraordinaire.
Marcheschi ne peint qu’au flambeau, c’est-à-dire brûlant des cierges spécialement fabriqués pour lui en Vendée, dont le dépôt de cire et de suie sont la matière presque unique de l’œuvre – et cela paraît à celui qui s’y arrête hautement avant-gardiste. Pour l’homme qui explique que « le feu est rétif au langage », ça ne s’arrête pas là.
Lire aussi : Berlioz, ou la nostalgie de la Foi
Si Dante, dit-il, a dessiné la Divine comédie avant de l’écrire, lui l’a tracée au pinceau de feu. En témoignent ces corps qui ne cessent de tomber, cette Vision synoptique de l’Enfer ou ses différentes représentations du Paradis où l’œil au centre se déploie en cercles concentriques et attire en son creux ou les damnés ou les bénis.
« L’enfer, dit Marcheschi en commentant Dante, naît de la chute du corps de Lucifer, et le purgatoire de la masse déployée par ce corps… Et le purgatoire, poursuit-il, est un des plus beaux livres de la Divine comédie, même s’il est trop souvent boudé. » On comprend pourquoi il apprécie tant son purgatoire terrestre.
JEAN-PAUL MARCHESCHI – L’ALPHABET DES ASTRES
Jusqu’au 31 mars 2019 Paul-Dupuy.
Musée des arts précieux
13, rue de la Pleau – 31000 Toulouse
ŒUVRES IN SITU
– LA VOIE LACTÉE Métro station Carmes, Toulouse.
– LES ONZE MILLE PORTRAITS DE L’HUMANITÉ (fragments) Hall du Palais de justice de Toulouse.
[/vc_column_text][/vc_column][/vc_row]