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Sélectron : Une neuvaine à Beethoven, génie confiné

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Publié le

22 avril 2020

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Si la musique classique est un temple qui résiste aux secousses de l’Histoire, Beethoven est son grand-prêtre le plus éminent. Voici une promenade dans l’œuvre de ce titan fragile qui atteint ses 250 ans : 9 titres à écouter et à voir.

 

1.     Piano solo : « La Tempête »

 

Lorsqu’il découvre que sa perte auditive est sans remède, Beethoven est un pianiste trentenaire admiré par les Viennois. Mais sa carrière est compromise. Le Testament de Heiligenstadt est l’aveu déchirant d’un homme brisé qui songe au suicide.

Puis, une force surnaturelle l’arrache aux ténèbres. Le pianiste laisse la place au compositeur, qui développe une créativité inépuisable. Maitre Ludwig atteindra l’excellence dans tous les genres. 1802 est l’année du désespoir et de la rédemption. Beethoven se confine et compose la fameuse sonate en ré mineur, qui figurera au répertoire de tous les pianistes. Quel surnom serait plus approprié que « La Tempête », pour une œuvre à l’atmosphère si ténébreuse et troublée ? Une accumulation de contrastes poussés jusqu’au paroxysme.

Regardez la limpidité âpre et énergique de Daniel Baremboim, filmé en 1984 par Jean-Pierre Ponnelle dans le cadre somptueux d’un château viennois.

https://www.medici.tv/en/concerts/daniel-barenboim-beethoven-sonata-no-17/

(Accès gratuit après création d’un compte sur la plateforme medici.tv)

 

2. Violon et piano : la Sonate à Kreutzer

 

La musique peut-elle fragiliser les liens ? Tolstoï s’est penché sur la question dans son court roman « La sonate à Kreutzer », tirant prétexte du pouvoir incontrôlable des notes pour une réflexion amère sur le mariage.

D’où vient donc la fascination diabolique de cette sonate que Beethoven a dédié au violoniste français Rodolphe Kreutzer ? La tonalité de la majeur est solaire, l’allure de la composition brillante. Mais au fil du discours musical, violon et piano tissent un dialogue qui se fait tour à tour confidence, querelle ou effleurement. Les voix s’entremêlent comme on échange des regards tantôt furtifs tantôt appuyés. Une complicité déguisée capable de rendre jaloux les esprits dépourvus de finesse.

Regardez la virtuosité de Renaud Capuçon et sa complicité avec le pianiste Frank Braley lors d’un concert capté il y a une dizaine d’années au Grand Théâtre de Bordeaux.

https://www.medici.tv/en/concerts/renaud-capucon-frank-braley-complete-beethoven-sonatas-3-of-3/

(Placez le curseur à 18’15’’ – Accès gratuit après création d’un compte sur la plateforme medici.tv)

 

3. Piano, violon et violoncelle avec orchestre : le Triple Concerto

 

Œuvre unique en son genre, ce concerto dans la tonalité sereine d’ut majeur place sous les projecteurs non pas un, mais trois solistes accompagnés par l’orchestre. Trois instruments d’habitude réunis pour un ensemble de musique de chambre : violon, violoncelle et piano. L’orchestre est comme une fenêtre ouverte sur le monde. Le dialogue dans l’intimité d’un salon se fait appel à l’universel. Une sorte de symphonie avec solistes, où se creusent des spirales de contemplation d’une profondeur touchante.

 

Regardez un extrait vidéo d’un concert enregistré à la Philharmonie de Berlin en octobre 2019, histoire de saisir l’affinité élective de ces trois géants lors du mouvement central du concerto, déchirant d’émotion comme une prière à fleur de lèvres.

 

4. Quatuor : le premier « Razumovsky »

 

Deux violons, un alto et un violoncelle : il suffit de quatre instruments pour distiller la grammaire de la musique et le génie du compositeur. Tout au long de sa maturité, Beethoven aborde le quatuor comme un lieu de recherche : il assume l’héritage de ses ainés puis le dépasse, poussant l’effort jusqu’aux solutions formelles les plus hardies.

Avant les résultats extrêmes, qui feront de maitre Ludwig le plus audacieux des visionnaires, le premier des trois quatuors « russes », commandés par le richissime comte Razumovsky, témoigne d’une fécondité créative hors pair. Ce qui frappe à travers ses quatre mouvements, c’est la manière dont Beethoven cache la logique inflexible de la forme et donne une apparence de liberté et de spontanéité. L’énergie semble se dégager sans effort, du lyrisme passionné du premier mouvement à l’atmosphère exotique du quatrième, basé sur une mélodie russe. La dissimulation de l’artifice : n’est-ce pas précisément la définition de l’art ?

Regardez à l’œuvre cette formation de chambre parmi les meilleurs de notre temps, le Quatuor Belcea, dans un concert filmé en 2012 où la sophistication rime avec la  fougue.

https://www.arte.tv/fr/videos/094370-023-A/quatuor-a-cordes-n-7-de-beethoven/

Cette vidéo fait partie de la chaîne web qu’Arte consacre à l’œuvre intégrale de Beethoven en cette année anniversaire. Une mine d’or pour voyager à travers le catalogue complet de maitre Ludwig (pas moins de 138 œuvres avec numéro d’opus), dans des interprétations pour la plupart historiques.

 

5. Piano et orchestre : « L’Empereur »

 

Chacun a dû entendre une fois dans sa vie cet Everest du répertoire pour piano et orchestre. Au moins quelques bribes (songez au « Cercle des poètes disparus », à la scène dans le bureau de Keating). Le romantique fait son entrée dans l’histoire de la musique, paré de toute sa majesté. Noblesse et héroïsme justifient le sous-titre que la postérité a retenu.

Le soliste y est moins l’antagoniste de l’orchestre que son alter-ego, anticipant ou développant ses inventions dans un dialogue solennel et intrépide qui vire aux épanchements lyriques lors du mouvement central. Une synthèse grandiose du piano moderne à l’aube de son histoire.

Regardez le dédoublement de Daniel Baremboim dans un concert enregistré en 2007 en Allemagne, où il affronte les virtuosités périlleuses de ce chef-d’œuvre tout en dirigeant l’orchestre. Ne cherchez pas de podium : un sourcillement, un hochement de tête depuis le tabouret suffisent à remplacer la baguette.

https://www.medici.tv/en/concerts/daniel-barenboim-beethoven-piano-concerto-no5/

(Accès gratuit après création d’un compte sur la plateforme medici.tv)

 

6. Violon et orchestre : le Grand Concerto

 

Si Beethoven connait les moindres secrets de l’écriture pour piano, il n’est pas moins familier des enjeux du violon. À l’époque de sa jeunesse à la cour de Bonn, c’est l’alto et le violon qu’il joue dans l’orchestre dont le prince-électeur Maximilien François est si fier.

Le lyrisme sobre des mélodies, l’ornementation discrète qui privilégie la palette des nuances à la virtuosité pure, le dynamisme serein qui se dégage de la partition, font de cette œuvre un exemple d’équilibre formel. C’est ce qui rend ce grand concerto si admiré et facile d’accès, comme une journée radieuse pour le repos du titan.

Regardez le grand concerto joué dans un concert capté à Berlin, où une autre page majeure de l’histoire de l’interprétation se jouait, cette fois-ci en live, pour 48 minutes de grâce à l’état pur.

https://www.medici.tv/en/concerts/karajan-and-anne-sophie-mutter-perform-beethoven-violin-concerto/

(Accès gratuit après création d’un compte sur la plateforme medici.tv)

 

7. Symphonie : la Septième

 

Premier des romantiques, derniers des classiques, Beethoven ne vit pas son confinement dans le silence comme un repli radical du monde. S’il réduit ses fréquentations, il ne renonce pas à recevoir quelques amis fidèles, qui lui écrivent sur des carnets de conversations les phrases qu’il ne peut entendre. Jusqu’à la fin, il dirige les musiciens dans ses œuvres symphoniques. Son attachement au réel repose sur l’essentiel : l’art, l’amitié, la patrie. Jusqu’à infuser dans sa musique un sentiment de plénitude qui frôle parfois l’ivresse.

La Septième symphonie est une ode à la joie avant l’heure. Une urgence fiévreuse la traverse de bout en bout. Une matière incandescente répand dans l’orchestre une excitation contagieuse. L’audace rythmique témoigne d’une fantaisie débordante aux limites de l’extravagance, au point que Wagner voyait dans cette œuvre « l’apothéose même de la danse ».

Regardez la solennité du Philarmonique de Berlin dirigé par Simon Rattle, et appréciez sa rondeur sonore.

https://www.digitalconcerthall.com/concert/22386

(Accès gratuit après inscription sur la plateforme de la Philharmonie de Berlin)

 

8. Opéra : Fidelio

 

Fidelio ou Leonore ? Deux titres pour deux versions du même opéra, que Beethoven a retouché à plusieurs reprises entre la première mouture, créé en 1805 (Leonore), et la version définitive de 1814, celle qui est restée au répertoire des théâtres jusqu’à nos jours (Fidelio). Deux noms pour la même protagoniste, Leonore, qui se déguise en homme pour pénétrer la prison où son noble mari, Florestan, est enfermé par le sinistre gouverneur Pizarro, résolu à y laisser mourir le rival politique. Quel autre nom pourrait emprunter cette femme idéaliste et rusée, incarnation de la fidélité conjugale, prête à affronter le danger pour le salut de son mari, et de leur union sacrée ?

Le théâtre ne semble intéresser Beethoven que par la force des idéaux qu’il peut porter : l’émotion doit éveiller la conscience ; suivre les péripéties des protagonistes ne sert qu’à embrasser leurs vertus.

Les différences entre les deux versions ne se limitent pas aux ouvertures : celle de Leonore (la « II » pour les spécialistes) fournit un résumé des thèmes principaux du drame, celle de Fidelio est une page symphonique indépendante qui introduit l’ambiance sonore de l’opéra. Si Leonore laisse plus de place à la caractérisation des personnages, Fidelio gagne en tension dramatique.

Regardez la version définitive de l’opéra dans la production du Festival de Salzbourg 2015. Si la mise en scène de Claus Guth joue la carte du psychologisme sans venir à bout du propos de façon convaincante, la réalisation musicale est digne des grands soirs du festival : magnifiques Adrianne Pieczonka (Leonore) et Jonas Kaufmann (Florestan), direction stylée de Franz Welser-Möst à la tête d’un Philharmonique de Vienne toujours souple et raffiné.

https://www.arte.tv/fr/videos/094370-001-A/fidelio-de-beethoven/

 

9. La Messe en Ut

 

Toute neuvaine qui se respecte s’achève par une grande messe. Dans ses années de jeunesse à Bonn, ville universitaire et catholique, Beethoven tenait l’orgue à l’église ; c’est là qu’il a appréhendé la pratique et l’esthétique de la liturgie.

Plus mesurée que sa « Missa solemnis », la Messe en Ut n’en est pas moins riche de contrastes saisissants. Dès le Kyrie d’une douceur envoutante, c’est une œuvre habitée par la ferveur religieuse, où l’austérité de l’écriture polyphonique (le Credo entre autres est un sommet de science contrapuntique) n’affaiblit jamais la chaleur de la méditation. Jusqu’à se faire imploration sereine et rêveuse dans l’Agnus Dei final.

De quoi transformer l’écoute en action de grâce : l’humanité reconnaissante, au génie qui a légué le moyen le plus sûr de surmonter les caprices de l’Histoire.

Regardez l’effectif que demande cette messe de Beethoven (derrière l’orchestre : orgue, grand chœur mixte à quatre voix et quatre solistes), dans l’extrait d’un concert donné en janvier dernier à Vienne par Philippe Jordan, directeur musical de l’Opéra de Paris.

https://www.arte.tv/fr/videos/094328-004-A/beethoven-messe-en-ut-gloria-sanctus/

 

 

 

Paolo Kowalski 

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