S’il est une sainte à invoquer en temps d’épidémie, c’est Françoise Romaine dont le prénom parle d’emblée au coeur.
Née en 1384, à Rome, d’une famille de la haute noblesse, épouse et mère exemplaires, Françoise Romaine se fait connaître très tôt par ses oeuvres et ses dons spirituels. N’est-elle pas gratifiée de la visite constante de deux anges : son Ange gardien et un autre ange , plus sévère, chargé de la punir, même en public ? Son calme exaspère le diable qui s’avise, un jour, de la suspendre au-dessus de la rue. Elle doit rien moins qu’à une force supérieure d’être remise, manu divina, dans sa chambre. Francoise Romaine laisse un Traité de l’Enfer dicté à son confesseur. Preuve que les femmes, même saintes, peuvent être instruites : l’Enfer de Dante date de 1314.
Son calme exaspère le diable qui s’avise, un jour, de la suspendre au-dessus de la rue.
Au XIV ème siècle, Rome connaît une période de troubles sociaux et religieux. Les Papes ont dû quitter Rome pour Avignon, et la peste noire ravage la ville. Sainte Françoise se dévoue sans compter auprès des malades entraînant dans son zèle les dames de la haute société. Ses oeuvres de charité lui doivent d’être déclarée protectrice de Rome. Une basilique située au-dessus du forum lui sera dédiée au XVème siècle : son squelette est dans une châsse située dans la crypte.
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En 1656, une peste sévit, de nouveau, en Italie. Partie de Naples, sous évaluée, elle gagne Rome. On invoque « l’Avocate de Rome » qui fait cesser très vite le fléau. Le futur Clément IX commande un ex-voto à Poussin. Sous la main tremblante du peintre naît un chef-d’oeuvre, resté longtemps inconnu : « Sainte Françoise chasse la peste de Rome » appelé encore : « La vision de sainte Françoise Romaine. » C’est, en effet, après une vie mouvementée, passant d’héritier en héritier dont l’un s’apprête à vendre « ce nid à poussière encombrant », qu’un expert en gravures, reconnaît, au XXème siècle, dans des gravures réalisées à la fin du 17ème siècle, un chef -d’oeuvre de Poussin. Le Louvre s’en rend acquéreur en 1998 pour 4 millions d’euros. Il est restauré. On peut le voir dans l’aile Richelieu. Il est magnifique.
Sous la main tremblante du peintre Nicolas Poussin naît un chef-d’oeuvre, resté longtemps inconnu : « Sainte Françoise chasse la peste de Rome » appelé encore : « La vision de sainte Françoise Romaine. »
Deux figures féminines se font face. Françoise, armée de flèches, est debout sur une nuée. A ses pieds, une femme allongée : une victime. En face d’elle, agenouillée, une dame de la noblesse représente la ville de Rome, suppliant la sainte. Sur la droite, une créature sordide emporte un enfant mort, tirant, par les pieds, un autre cadavre. Un ange le chasse de son épée. Cette personnification de la peste n’a rien de la froideur d’une allégorie.
La victoire de la sainte représente la victoire des forces spirituelles sur les forces du mal. La force de l’intercession. Fondatrice des Oblates de Marie, rattachée à saint Benoît, sainte Françoise Romaine est canonisée en 1608. Sa fête est le 9 mars. Ses attributs sont un petit âne et un panier de légumes. Elle est aussi la patronne des automobilistes : à cause de son ange gardien. Quant à Poussin, il aima passionnément Rome où il vécut une partie de sa vie dans une maison située sur le Pincio.