L’Irak, terre d’Abraham, était le foyer de nombreuses communautés chrétiennes primitives. Quels sont donc la place et l’état de ces chrétiens aujourd’hui ?
En effet, l’Irak est la terre primitive des chrétiens. Il faut donc bien comprendre que les chrétiens de ce pays y sont réellement chez eux. Ensuite, la démographie a évolué au fur et à mesure de l’Histoire, et l’Islam a pris de plus en plus de place, reléguant les chrétiens et les autres minorités ethno-religieuses (Kakaïs, Shabaks, Yézidis, etc.) au rang de minorités, justement. Mais ce n’est pas parce que les chrétiens sont des minorités qu’ils sont des citoyens de seconde zone. Sous l’ère de Saddam Hussein, les chrétiens étaient une composante majeure de la société irakienne et ce, à tous les niveaux, même les plus élevés. Les dix ans de guerre civile qui ont suivi l’invasion américaine de 2003 ont fracturé le pays, au point qu’il est celui du Proche-Orient le plus divisé entre communautés. Cette guerre civile a fait naître une méfiance et des antagonismes entre ces communautés. Néanmoins, les chrétiens sont probablement restés la partie de la population irakienne la plus patriote, la plus attachée à un État fédéral protecteur, le seul capable de leur garantir la sécurité et la pleine citoyenneté. C’est leur attachement à l’idée d’État, d’unité nationale, d’Irak en fait, leurs efforts pour continuer à vivre-ensemble malgré les brimades, les difficultés, les persécutions parfois, qui leur permet de se maintenir sur la terre de leurs ancêtres et de continuer à vivre autant en temps qu’Irakiens qu’en temps que chrétiens.
Depuis les deux guerres du Golfe et le développement de l’État islamique, les chrétiens d’Irak ont été victimes de persécutions. La visite du Pape est-elle un symbole d’espérance pour eux ?
Oui, bien évidemment. C’est en effet une bonne manière de caractériser la venue du Pape, parce qu’il ne faut pas non plus tomber dans une idéalisation. J’entends par là qu’il n’y a pas eu de décrets politiques ou de textes religieux qui ont été signés, il n’y a pas eu non plus de déclarations d’intention. Ce voyage était vraiment un symbole. Néanmoins il faut aussi souligner l’importance réelle de ce symbole. C’est à dire que le Pape a eu un programme très intense durant ces trois jours de visite, en rencontrant les autorités politiques irakiennes, kurdes, et les autorités religieuses des différentes communautés qui composent le pays. En particulier la plus importante, à savoir l’autorité religieuse suprême du chiisme irakien, l’ayatollah Ali Al-Sistani. [...]
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