Si l’on doit juger un arbre à ses fruits, ceux du wokisme sont inquiétants. Ce courant idéologique n’est pas très ancien, mais il a déjà montré des conséquences délétères partout où il s’est implanté : le funeste exemple de l’université d’Evergreen dans l’État de Washington illustre ce qu’il adviendra en France d’ici quelques années. En 2017, dans la dynamique du mouvement Black Lives Matter, une minorité d’étudiants y a fait sa loi au nom de « l’anti-racisme » et de la « discrimination positive », allant jusqu’à encercler, humilier, insulter des enseignants, qu’ils adhèrent ou non à l’idéologie woke. Après plusieurs mois de déferlement de haine, de violence, et d’affrontements gratuits, l’affaire s’est terminée avec l’intervention de la police. Cette histoire a eu le bénéfice de prévenir nos sociétés des dangers que nous fait courir l’imprégnation de ce courant en Occident.
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L’idéologie woke, « éveillé » en français, prétend percevoir le mal « systémique » et dénoncer les injustices que subissent les minorités à cause des populations bénéficiant de privilèges du fait de leur « blanchité » (entendre leur couleur de peau) ou de leur orientation sexuelle dominante (entendre hétérosexualité). En France, le wokisme qui regroupe de multiples causes comme celles de l’indigénisme ou du mouvement LGBT+, est souvent relégué au même niveau de dangerosité que les courants identitaires et conservateurs. Le tout permet stratégiquement au gouvernement de dénoncer une « tenaille identitaire » et de se positionner comme l’arbitre au-dessus de la mêlée. Le danger est pourtant bien différent : dans un cas, il s’agit de conserver ce qui existe pour le transmettre aux générations suivantes ; dans l’autre cas, de remettre en cause ce que les anciens nous ont transmis de bon, de beau et de juste pour le détruire en utilisant la victimisation et l’indignation. D’ailleurs, il ne sera sans doute pas possible de combattre le wokisme sans une démarche identitaire et conservatrice déterminée.
Il est urgent que le gouvernement prenne la mesure du danger et déploie des actions contre le développement de cette idéologie mortifère qui se répand dans notre société. L’Opéra de Paris en a déjà fait les frais suite à un manifeste signé par trois cents professionnels qui se sont plaints de l’absence de diversité au sein de l’institution : pour eux, les modalités d’embauche des danseurs ont tendance à défavoriser les personnes noires ou asiatiques à cause de certains critères morphologiques nécessaires à la profession. Ils ont également appelé à supprimer les termes se rapportant de près ou de loin à des stéréotypes raciaux en réécrivant des pièces et des ballets. Dans nos écoles, une maison d’édition comme Lelivrescolaire.fr peut développer des thématiques sur le sexisme, le racisme, l’homophobie ou la transphobie et diriger subrepticement les élèves vers le wokisme en toute impunité. À Rouen, le maire PS Nicolas Mayer-Rossignol a émis l’idée de déboulonner la statue de Napoléon qui trône devant l’hôtel de ville depuis 1865 pour la remplacer par une effigie de la militante féministe Gisèle Halimi. De la réécriture de Molière aux Dix Petits Nègres rebaptisés, en passant par le développement de l’écriture inclusive, c’est notre civilisation qui est attaquée dans ses bases les plus profondes à travers l’art, l’éducation et la famille.
Face au vide, à la déconstruction et au désenchantement du monde, il est urgent de réaffirmer que la dignité de chaque personne humaine se moque bien des disparités exaltées par une poignée d’individus
Nous ne pouvons plus nous permettre la passivité, le relativisme ou l’ignorance face à un phénomène trop souvent tourné au ridicule. Le wokisme est dangereux parce qu’imprégné de nihilisme. Il se répand comme une traînée de poudre, impulsé par des militants issus des campus américains. Il est soutenu par les GAFAM, toujours prêts à tirer parti des mouvements contestataires et progressistes pour brasser de l’argent. Le wokisme est à nos portes, et il faut y mettre un frein dès maintenant. Il s’adresse à la jeunesse, à nos enfants, en particulier aux jeunes filles qui en sont les premières victimes. Ce sont les prochaines générations biberonnées aux séries Netflix avant-gardistes, influencées par les effets de mode et par une publicité agressive qui infuse la totalité de leurs perceptions, qui façonneront le futur de notre civilisation.
Que proposons-nous contre cet élan destructeur ? Face au nihilisme sans espoir, nous devons réaffirmer dans nos écoles, dans nos foyers et dans nos décisions politiques que toute personne est une histoire sacrée. Face au vide, à la déconstruction et au désenchantement du monde, il est urgent de réaffirmer que la dignité de chaque personne humaine se moque bien des disparités exaltées par une poignée d’individus qui ne proposent aucun projet de société pour l’avenir. C’est d’ailleurs cette vision de l’homme qui est au cœur du projet conservateur. Les fondements de ce que nous appelons « France » peuvent également disparaître, à moins que nous défendions nos arts, nos folklores et nos traditions. À moins que nous agissions dès maintenant dans les programmes scolaires. À moins que nous mettions en œuvre une politique résolue, bienveillante et apaisée, contre les offensives de la « cancel culture ». À ces conditions seulement, nous offrirons à nos enfants un avenir serein dans un cadre solide, imparfait peut-être, mais humain.