Épidémies, guerres, bruits de bottes et rumeurs de fin du monde : le moins qu’on puisse dire, c’est que ni notre immense science, ni notre gigantesque technique, ni notre soi-disant sagesse philosophique et politique ne nous gardent de sombrer à nouveau dans les calamités qui se sont historiquement (et certainement préhistoriquement) abattues avec régularité sur la pauvre humanité. Rien ne change, comme le démontrent nos réactions apeurées et souvent irrationnelles devant ces événements. Nous ne prenons cependant guère de risque à imaginer, au moment où ces lignes sont rédigées, que le feu nucléaire n’aura pas été déclenché au moment où elles seront lues (dans le cas contraire, personne ne sera là pour nous rectifier). Encore une fois, notre sujet sera la droite. Notre droite, qui si elle est sympathiquement toujours divisée en temps de paix, se devrait de choisir intelligemment lorsque résonne la crise, et de se rassembler dans ce qui, croyons-nous la fonde : la France, ses vertus chrétiennes et son amour de la raison. Que pendant des années, certains aient résolu de considérer la Russie de Vladimir Poutine comme un allié objectif ne devrait pas les conduire à oublier le qualificatif : il n’est pas non plus notre ami comme ses manœuvres agressives le prouvent. Et il n’est pas entièrement de la même civilisation que nous : son rapport à la liberté politique n’est pas celui de l’occident, non plus que ses « valeurs » conservatrices, démenties de longtemps par la légalité de la pratique de la GPA dans son pays, ne sont les nôtres. Le Congo, qui est catholique, n’est pas plus éloigné de nous finalement, que la « sainte Russie » orthodoxe.
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Comment dès lors essayer de raisonner et d’agir ? Si ce qui doit d’abord nous mouvoir est l’intérêt national, celui-ci commande, si nous nous songeons comme un principe de civilisation universalisable, que nous prêtions main-forte aux pays opprimés, et en l’occurrence il s’agit de l’Ukraine. Il ne s’agit pas de devenir un boutefeu ou un va-t-en guerre mais en l’espèce, c’est Vladimir Poutine l’agresseur et une France et une Europe fortes, et sûres de leurs valeurs, devraient être en mesure de lui intimer de s’arrêter, et de rentrer chez lui. Il ne s’agit pas non plus de prêter allégeance aux États-Unis, en acquiesçant à toutes les demandes de l’Otan. Il s’agirait, comme de Gaulle l’avait su, d’en quitter le commandement intégré et de jouer notre propre partition (à cet égard, il est étrange de demander à Nicolas Sarkozy qui a trahi le gaullisme sur ce plan-là de jouer les intermédiaires).
On ne peut reprocher à la France d’avoir désarmé: elle est seule, avec la Grande-Bretagne, parmi les nations européennes à avoir maintenu une armée forte depuis quarante ans. Mais elle manque fortement de volonté politique au niveau international, de cohérence, et surtout elle est divisée contre elle-même : qui ne voit que la droite nationale manque aujourd’hui d’un Bainville, d’un Maurras même, qui auraient théorisé en toute liberté et sans céder aux sirènes des puissances étrangères, les modalités de son influence sur le monde ?
Nous manquons de métaphysique à l’évidence, c’est-à-dire d’axiomes forts et intangibles, pour guider notre action
Nous manquons de métaphysique à l’évidence, c’est-à-dire d’axiomes forts et intangibles, pour guider notre action. Dès qu’une nouvelle puissance se lève, nous la saluons bien bas et ne soupçonnons pas qu’elle puisse un jour jouer un rôle mauvais contre l’univers, c’est-à-dire contre nous. L’héroïsme du peuple ukrainien nous oblige : ces gens-là, petit peuple et grand cœur, entraînent, au-delà de notre admiration, notre intelligence : ce monde n’est pas stable, les grandes déclarations des satrapes sont pleines de mensonges, nous avons le cœur dur et la tripe sensible, nous ne sommes pas préparés à la cour des grands et nous manquons de discernement.
Si nous voulons prendre le pouvoir, il faut savoir l’exercer. Ça commence maintenant.