Alors qu’elle était en gestation depuis 2017 avec l’éclosion d’Emmanuel Macron et l’affaiblissement consécutif du Parti socialiste et des Républicains (il faudrait même remonter au 18% en 2007 de François Bayrou), cette tripartition de la vie politique française vient proprement d’aboutir, et c’est le vote utile qui lui aura permis d’accoucher si vite et si radicalement. Celui-ci a en effet engendré un triple phénomène d’aspiration sur les différentes niches électorales. Macron a aspiré le vote Pécresse, Le Pen a aspiré le vote Zemmour, Mélenchon a aspiré la gauche toute entière, au point de constituer dorénavant trois blocs à plus de 22%, reléguant à quinze points leurs poursuivants.
La droite face à deux nuances de gauche
Nous voilà donc face à trois blocs constitués. Un pôle de gauche, islamiste, antiraciste et féministe ; un pôle central, libéral, progressiste et européiste ; un pôle de droite, souverainiste, populiste et identitaire. Autant les deux premiers faisaient peu de doute, autant il y a eu un vrai combat, vieux de dix ans, en ce qui concerne la droite : serait-ce l’orientation mariniste ou zemmouriste qui l’emporterait ; la droite serait-elle nationale-populiste ou identitaire-conservatrice ; sa clientèle serait-elle hétérogène avec une empreinte notabiliaire, ou à forte majorité populaire ? Comme aux États-Unis avec Trump ou en Grande-Bretagne avec le Brexit (mais a contrario de la Hongrie d’Orbán), c’est la teinte populiste qui l’emporte, du fait surtout que l’électorat populaire désaffilié des vieux pays occidentaux est définitivement passé à droite.
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Beaucoup y voient la fin du clivage droite-gauche. L’on notera tout d’abord que leur clivage de substitution, souverainisme contre mondialisme et/ou populisme contre élitisme, ne fonctionne absolument pas. En plus de ne pas être capable d’expliquer l’existence philosophico-politique de ces trois camps, ce clivage n’est pas opérationnel sur le plan électoral puisque le pôle de gauche, gouverné par Mélenchon et censé appartenir au camp souverainiste, a appelé d’un seul homme à faire barrage à Marine Le Pen (de même Arnaud Montebourg). C’est qu’il existe des souverainistes de droite et de gauche qui ne peuvent en dernière instance se mettre d’accord sur ce qu’est la nation à défendre souverainement. Ajoutons que les modalités du souverainisme, à commencer par la sortie de l’Union européenne et de l’euro, n’ont été défendues par personne en cette campagne.
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