La théologie catholique distingue Révélation publique et révélations privées, encore que chacune soit divine. La Révélation publique est celle qui, exprimée dans la Bible, s’adresse directement à toute l’humanité. Achevée avec l’Apocalypse de saint Jean, elle est complète et définitive. « L’économie chrétienne, du fait qu’elle est l’Alliance nouvelle et définitive, ne passera jamais et aucune nouvelle révélation publique ne doit être attendue avant la glorieuse manifestation de notre Seigneur Jésus Christ » (Constitution Dei Verbum).
Les révélations privées désignent, comme l’indique le Commentaire théologique qui a accompagné la publication du troisième secret de Fatima, « toutes les visions et toutes les révélations qui ont lieu après la conclusion du Nouveau Testament » (Le Message de Fatima, Congrégation pour la doctrine de la foi).
La Révélation publique et les révélations privées ne se distinguent pas seulement par leur origine historique mais surtout par leur autorité. La Révélation publique, qui repose sur l’autorité même de Dieu qui révèle, s’impose à la foi ; les révélations privées, non, encore qu’elles s’imposent aux personnes auxquelles elles s’adressent directement. Le saint curé d’Ars, qui fut mêlé de très près aux événements de La Salette indiqua en substance qu’il n’avait pas besoin de cette apparition pour croire.
Lire aussi : Jean-Frédéric Poisson : « L’État délaisse notre patrimoine, la société civile le sauve »
Les révélations privées incluent les révélations reçues par nombre de saints. Elles n’ajoutent certes rien à La Révélation, mais elles en explicitent des éléments essentiels. Elles sont dès lors très utiles parce qu’elles contribuent « à l’édification des fidèles, et même de toute la sainte Église (1 Cor. 14,4), non seulement en favorisant la piété, en excitant la ferveur et en élevant l’esprit, mais aussi en contribuant très efficacement à promouvoir le progrès disciplinaire et liturgique, et même le progrès théologique – dogmatique » (J. G. Arintero).
Les révélations reçues par sainte Marguerite-Marie ont ainsi eu une incidence majeure sur la dévotion et la liturgie du Sacré-Cœur ; celles reçues par Marie-Thérèse Dessandais et sainte Faustine Kovalska ont favorisé le culte et la dévotion à l’Amour Miséricordieux. Celles de sainte Gertrude et de sainte Brigitte ont eu une incidence identique sur la dévotion aux âmes du purgatoire, comme d’autres sur le culte eucharistique ou la dévotion à saint Joseph.
Par ailleurs, ces révélations privées, en lesquelles se manifeste la « dynamique prophétique » de l’Église, ont exercé une influence majeure sur la vie collective ou individuelle d’une multitude innombrable de chrétiens. Ce en quoi l’on voit que « privé » veut dire « adressé à une personne particulière » mais non pas « réservé à cette personne ». Que l’on songe seulement au rayonnement des révélations reçues par sainte Thérèse d’Avila, la bienheureuse Anna Katharine Emmerick, sainte Catherine de Sienne, la vénérable María de Ágreda, sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus, et, plus près de nous, par tant et tant d’âmes plus ou moins connues, telles Thérèse Neumann, Marthe Robin, ou la vénérable María Amparo du Sacré-Cœur.
Au travers de ces particularités, ces apparitions sont toujours, à l’occasion de circonstances souvent douloureuses pour le monde, des appels à la pénitence, à la confiance, à la prière
Les apparitions – notamment les grandes apparitions qui ont marqué l’histoire de l’Église – entrent dans la catégorie des révélations privées et sont accompagnées de messages.
Pour ne s’en tenir qu’à celles attribuées à Notre-Dame, elles se comptent par milliers. L’Église, qui veille à garantir leur authenticité comme elle veille à garantir celle des miracles, n’en a cependant reconnu qu’un nombre relativement faible. Tous connaissent celles de Notre-Dame du Laus, de La Salette, de Lourdes, de Pontmain, de Beauraing, de Banneux, de Guadalupe, d’Akita (Japon) ou, plus récemment, de Kihebo (Rwanda). Et, bien sûr, celle de Fatima.
Toutes ces apparitions ont ceci de commun, si l’on peut dire, qu’elles sont toutes particulières. Particulières à un temps, à un lieu plus ou moins étendu, à une circonstance historique, comme celle de Pontmain à l’approche des Prussiens. La Vierge y apparaît d’ailleurs différemment vêtue, comme pour adapter son apparence au contenu de son message. Elle n’apparaît pas à Fatima où se produit l’inouï miracle du soleil, comme à Lourdes, ni à Pontmain comme à la rue du Bac. Toujours belle, toujours resplendissante, elle pleure à La Salette et à Akita, est vierge au sourire ailleurs, utilise des symboles différents, ici et là, et livre parfois des « secrets », comme à La Salette et à Fatima. Au travers de ces particularités, ces apparitions sont toujours, à l’occasion de circonstances souvent douloureuses pour le monde, des appels à la pénitence, à la confiance, à la prière.
Lire aussi : La bataille de l’Histoire : deuxième partie du débat
Fatima est sans aucun doute « la plus prophétique des apparitions modernes », indique le cardinal Bertone dans le document précité de la Congrégation pour la doctrine de la foi. Ses deux premiers secrets « concernent avant tout la vision épouvantable de l’enfer, la dévotion au Cœur immaculé de Marie, la Deuxième Guerre mondiale, ainsi que la prédiction des très graves dommages que la Russie, abandonnant la foi chrétienne et adhérant au totalitarisme communiste, devait apporter à l’humanité ». Le troisième, publié en 2000, est non moins terrible, qui intéresse en particulier l’assassinat du pape, d’évêques, de prêtres, de religieux et de laïcs. Le cardinal Ratzinger en a proposé une interprétation qui laisse cependant ouverte la porte du mystère.
Ce n’est évidemment pas le lieu de présenter une exégèse d’un tel message, si riche. Fatima nous invite à accueillir en nos vies personnelles les intentions de Notre-Dame, qui nous tourne vers son Fils, avec l’infatigable persévérance d’une mère, par les voies de la pénitence et de la prière, afin d’être dans le monde, selon le mot du pape François « des sentinelles du matin qui savent contempler le vrai visage de Jésus Sauveur ».
Le message de Fatima est scellé par cette promesse infaillible de Marie : « À la fin, mon Cœur Immaculé triomphera ».