Les Émirats arabes unis peuvent-ils constituer un exemple de développement pour le monde arabe ? Alors qu’Emmanuel Macron recevait le 16 juin le prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane, en visite pour une dizaine de jours France, la question du développement du monde arabe se pose avec une nouvelle acuité, plus de dix ans après les Printemps. Et un nouvel acteur, plus discret que les incontournables frères ennemis saoudiens et qataris, émerge doucement mais sûrement : les Émirats arabes unis. Pays peuplé essentiellement de travailleurs immigrés et dépendant de sa « rente » pétrolière, les Émirats ont néanmoins récemment su diversifier leur économie.
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Ainsi, le pays s’est lancé dans l’innovation technologique tous azimuts. Notamment dans la conquête spatiale. Les Émirats ont entre autres lancé une sonde spatiale autour de la planète Mars en février 2021, et ont entrepris la conquête de la Lune l’année suivante en lançant un véhicule d’exploration lunaire.
Les Émirats, moteurs du progrès des droits des femmes dans le Golfe ?
Ces ambitions traduisent l’appétence du pays pour la recherche scientifique, avec toujours cette idée sous-jacente de palier la fin, peut-être inévitable à long terme, de la rente pétrolière. Pour ce faire, les Émirats ont aussi misé sur l’éducation de leur population, gent féminine comprise. En effet, les efforts des dirigeants émiratis ont été salué par un rapport du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes (CEDAW), une instance de l’ONU, qui relevait le 22 juin 2022 ces efforts entrepris par le pays musulman conservateur pour améliorer la condition féminine. Pêle-mêle, le CEDAW relevait « les progrès remarquables accomplis en matière de droits et d’émancipation des femmes, les avancées dans tous les domaines couverts par la Convention, la parité entre les sexes à l’Assemblée nationale, les efforts consentis pour concilier la religion et l’émancipation nécessaire des femmes, ainsi qu’un engagement politique ayant ouvert la voie à un processus évolutif fondé sur la Convention. »
Certains experts rapportent même que les dirigeants émiratis auraient été séduits par certains discours musclés contre l’islamisme portés par des candidats de droite aux élections présidentielles françaises
De là à y voir une source d’inspiration pour le puissant voisin wahhabite saoudien, beaucoup plus rigoriste quant à l’application de la charia concernant les femmes… Il est vrai que le prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane a entamé quelques timides avancées sur ces sujets, autorisant par exemple les femmes à conduire depuis 2019, un an après que les femmes émiraties aient obtenu ce droit.
Un pôle de stabilité et de sécurité, allié de la France
Outre les progrès économiques et sociétaux de la société émiratie, il est à noter que le pays représente aussi un pôle de stabilité régionale, à rebours d’autres puissances comme le Qatar et son soutien affiché à la confrérie islamiste des Frères musulmans, l’Iran et l’ « arc chiite » qui va jusqu’à soutenir le Hezbollah libanais, ou l’Arabie saoudite et son jeu plus ou moins trouble avec la rébellion islamiste syrienne, Al-Qaïda et État islamique compris. Certains experts rapportent même que les dirigeants émiratis auraient été séduits par certains discours musclés contre l’islamisme portés par des candidats de droite aux élections présidentielles françaises. Car les Émirats arabes unis sont aussi un allié solide de la France au Proche-Orient. Au-delà même des contrats d’armements passés avec ce pays, qui se chiffrent à des centaines de millions d’euros de matériels, au-delà donc du prestige et du rayonnement qui les accompagnent, les Émirats se sont ainsi révélé des alliés pertinents, notamment en Libye, ou ils soutiennent ouvertement le camp du Maréchal Haftar avec le concourt discret des services français.
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Alors certes, tout n’est pas parfait. Certes, les Emiratis ont encore bien des défis à relever, par exemple en matière de transition écologique. Mais les progrès engagés par ce pays sont encourageants, et portent avec eux un réel espoir de voir le monde arabo-musulman sortir de la spirale mortifère enclenchée depuis janvier 2011 et dont certains de ses pays ne sont toujours pas sortis.