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Julien Rochedy : à la recherche de l’identité perdue

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Publié le

18 novembre 2025

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Dans « Qui sont les Blancs ? », l’essayiste Julien Rochedy propose une généalogie historique et culturelle de l’identité blanche. Un essai tonique et stimulant.
© L'Incorrect

Julien Rochedy s’affirme de plus en plus comme un penseur. Il aborde dans son dernier opus une question qu’il juge occultée : celle de l’identité des « Blancs ». À rebours du discours dominant qui considère la « blancheur » comme une construction vide ou coupable, il tente d’en proposer une généalogie historique et culturelle. Son ambition est vaste : comprendre ce que recouvre cette identité, pourquoi elle est devenue taboue et comment se la réapproprier, en donnant du sens à plus de trois mille ans d’histoire. Le pari est tenu.

Comment penser l’identité blanche sans tomber dans le racisme biologique ? Pour Rochedy, la négation de cette identité empêche de saisir la crise actuelle de l’Occident : sentiment de culpabilité, effacement culturel, perte de confiance en soi. Son essai cherche donc à redonner sens à une appartenance collective niée par la gauche, cette identité qu’il définit comme une empreinte : « Nous sommes toujours empreints de notre culture, de notre histoire, de notre peuple, souvent malgré nous. » L’ethnogenèse de l’auteur est un rapport dialectique entre géographie, population et culture pour fabriquer une identité, et pas une race proprement dite – non qu’il craigne le mot.

Être blanc, selon Rochedy, ne relève pas d’une hiérarchie raciale mais d’un héritage de civilisation né dans les glaces paléolithiques, puis du monde indo-européen, des Grecs, des Romains et du Christianisme, et enfin des Lumières, de la Révolution industrielle et du nihilisme. Cet héritage a forgé une culture marquée par la liberté individuelle, la rationalité, la morale universaliste et le goût du dépassement. Ces qualités auraient produit les grandes réalisations de l’Europe – science, droit, art, exploration – mais aussi son « paradoxe » : la propension à l’autocritique et à la culpabilité. L’auteur voit dans cet universalisme moral, né du christianisme et prolongé par les Lumières et le nihilisme, la source d’un désarmement psychologique : les Européens se sentent coupables de leur propre puissance.

L’ouvrage retrace une vaste fresque : de la période glaciaire aux Indo-Européens et aux sociétés modernes, en passant par la Grèce, Rome et le christianisme. Dans les climats rudes de l’ère glaciaire naît une énergie d’adaptation et de conquête. La Grèce invente la raison, Rome le droit, le christianisme la morale universelle. Puis la modernité transforme la foi en humanisme, puis en culpabilité et rejet de soi. Rochedy critique une gauche « racialiste » qui diaboliserait les Blancs et une droite « civique » qui refuserait d’assumer leur dimension historique. Il plaide pour une conscience lucide de l’héritage européen, distincte du chauvinisme ou du suprémacisme.

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L’essai mêle histoire, anthropologie et philosophie. Rochedy cite des dizaines d’auteurs dans une perspective synthétique plutôt qu’érudite. Le ton, clair et vif, alterne entre démonstration intellectuelle et élargissement de la fenêtre d’Overton. Le chapitre dédié à la Préhistoire, particulièrement réussi, est passionnant. Au reste, le texte relève davantage de l’essai argumenté que de la recherche scientifique, et tant mieux pour la clarté de l’exposé.

Le livre séduit par son ambition intellectuelle : replacer la question européenne dans le temps long et proposer une interprétation unifiante de la civilisation occidentale. Il réhabilite une interrogation souvent évitée, et souligne avec justesse le paradoxe moral de l’Occident : inventer l’universel jusqu’à s’y dissoudre.

Pour y parvenir l’ouvrage tend à essentialiser des traits culturels (rationalité, énergie, altruisme), ce qui prête le flanc à une critique qui verrait un flou entre analyse et discours identitaire. Le livre a toutefois le mérite de donner une définition de l’identité blanche.

Qui sont les Blancs ? est donc un essai à la fois stimulant et tonique. Il relit l’histoire de l’Europe comme celle d’une identité originale fondée sur des caractères remontant à plus de trois mille ans, aujourd’hui menacée par la perte de confiance et la culpabilité. Rochedy n’a pas seulement produit une synthèse de centaines de livres (sa bibliographie compte onze pages), il offre aussi une vision personnelle. L’auteur produit une pensée originale, étayée sur la construction du monde des Blancs. Sa lecture du Moyen-Âge, vu comme un effort millénaire de désorientalisation de l’Europe, est inédite. L’ouvrage se situe ainsi entre le diagnostic civilisationnel et le manifeste politique ; une tentative de comprendre, plus que de revendiquer, ce que signifie encore « être blanc » dans un monde post-occidental.


QUI SONT LES BLANCS ?, JULIEN ROCHEDY, Éditions Hétairie, 313 p., 23 €

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