C’est un lieu commun de dire que les démocraties, et la nôtre en particulier, sont en crise, en proie à des défis multiformes, aux prises à des contradictions qui ne le sont pas moins. Qui ne le voit ? Les politiciens et l’essaim des experts et des spécialistes se dépensent à imaginer et à proposer des programmes, des recettes, des techniques, des réformes supposés apporter réponse aux unes et aux autres, pour conjurer un chaos qu’ils ne font souvent qu’entretenir.
Ces débats sont ordinairement dominés par l’horizon apparemment indépassable du « pouvoir d’achat ». Quelques limites que l’on attribue à sa candidature, le mérite d’Éric Zemmour a été de forcer le déplacement des discours vers leur centre de gravité naturel. La vie politique est, certes, une affaire de pouvoir ; mais de pouvoir tout court. Non de celui qui incline chacun à la satisfaction individuelle de ses besoins économiques, fussent-ils légitimes ; non de celui qui permet à chaque politicien de tenter d’imposer aux autres le triomphe de ses appétits, de ses ambitions ou de ses idéologies ; mais de celui qui constitue, selon la formule de Vitoria, une « force ordonnatrice »de la société, mise en œuvre par une autorité capable, par sa détermination et son sens de la « chose publique », de procurer à cette société les meilleures conditions possibles de son bien matériel et spirituel.
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Ainsi recentrée, ce qu’Éric Zemmour a également souligné, la politique n’est pas tant une affaire de « projets » et de gestion sociale que de projection et de vision. La fameuse « certaine idée de la France » de de Gaulle, perdue depuis longtemps par une droite qui ne s’en souvient que comme d’une « formule »permettant d’assurer la publicité des bas produits de ses cuisines, est en quelque sorte l’expression de ce principe de finalité dont le même Vitoria soulignait l’efficacité universelle. C’est une idée principe de mouvement et d’orientation. Antonio Primo de Rivera – tant pis si ce nom est urticant pour les imbéciles – désignait son pays comme « une unité de destin dans l’universel ». Qui n’a pas cette vision pour le sien n’est assurément pas digne de le conduire. [...]
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