La France a perdu 2,5 millions d’emplois industriels en quarante ans, soit 150 emplois industriels par jour. Dans La France qui déclasse (Tallandier, 2019), l’historien Pierre Vermeren, professeur d’histoire à la Sorbonne, affirme que la désindustrialisation procède de l’abandon de tout volontarisme économique : « Le gaullisme a cessé d’exister après Pompidou, et avec lui le volontarisme industriel. Ses trois dernières manifestations sont le TGV, Airbus et l’industrie nucléaire, trois succès qui permettent à l’économie française de faire encore illusion. Mais l’avènement du libéralisme économique sous Valéry Giscard d’Estaing, puis son adoption par François Mitterrand et la gauche en 1983, puis par Jacques Chirac en 1986-1995, ont acté la fin de la politique industrielle ».
Une logique comptable
Pourquoi une telle politique ? À l’époque a prévalu chez nos décideurs publics une logique visant à maximiser le profit à court terme et l’investissement des capitaux dans des activités dégageant le plus de marges. La France a cru qu’elle pouvait déléguer à l’Asie la transformation des matières premières et de l’activité industrielle pour ne vivre que de la rente du secteur tertiaire, comme si celui-ci pouvait se concevoir indépendamment des activités qui lui servent de support. Dans une stratégie de court terme, les patrons y ont vu l’occasion de profiter d’une main-d’oeuvre à bon marché et le consommateur a bénéficié de la baisse généralisée des prix de vente. La France est ainsi devenue le pays le plus tertiarisé d’Europe, sa production industrielle ne représentant aujourd’hui plus que la moitié de celle de l’Allemagne. Or, les activités tertiaires se concentrent essentiellement dans les métropoles, ce qui accentue le déclassement de nos provinces. [...]
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