«Le petit nombre l’emportera subversivement sur la subversion elle-même » écrivait Dominique de Roux, et cette prophétie pourrait faire office de viatique à Bertrand Lacarelle, tant elle résume son mode de pensée et d’action, du moins depuis que je le connais : c’est-à-dire plus d’une décennie, et une décennie au cours de laquelle il n’aura cessé de se radicaliser. Ses derniers livres avaient été publiés chez Pierre-Guillaume de Roux, d’ailleurs, fils de Dominique, seigneur des lettres dissidentes, héritier superbe publiant Ezra Pound et Wyndham Lewis, Richard Millet et Bertrand Lacarelle donc, lequel tramait déjà des conspirations en appelant autant à la chevalerie médiévale qu’aux beatniks de la rue Gît-le-cœur, à tous les irréguliers supérieurs, comme les surréalistes dissidents (il s’était déjà fait connaître par des biographies littéraires de Vacher ou Cravan). On l’avait compté parmi les atamans du Cercle Cosaque, un rendez-vous littéraire underground qui remua un peu le Paris des années 10, toque sur le crâne, bouteille de vin turc brandie à la main et un « hourrah » crié pour réveiller la foule. Et puis il se fit plus rare. Il avait conservé son œil malicieux, sa jeunesse intacte et son panama des jours pluvieux, mais on l’apercevait moins à Saint-Germain-des-Prés ou dans les raouts pour poètes à trois grammes et vingt lecteurs, que nous avions aimé fréquenter ensemble par ennui des mondanités sérieuses. […]
Vous souhaitez lire la suite ?
Débloquez tous les articles de l’Incorrect immédiatement !




