Il ne vous aura pas échappé que se déroulera dans quelques semaines une élection européenne. Et qui dit élection dit retour du fameux arc républicain. Une tradition, comme les bourgeons au printemps ou les grèves lors des vacances scolaires. Jordan Bardella squatte le haut du podium, loin devant les autres, et le cor des peuples se fait entendre un peu partout en Europe résonne comme ce chant du cygne du mirage européen. Emmanuel Macron le sait. Le président nous offre depuis son accession au pouvoir la politique d’un dahu. Feignant de changer de sens, que certains appellent « en même temps », sa direction n’a jamais bifurqué sur un point : l’achèvement de la démocratie.
Lire aussi : Éditorial d’Arthur de Watrigant : Nouvelle aurore
La croyance dans la capacité des Français à choisir un destin commun ou la foi dans la vertu du bon sens et de la prudence, Emmanuel Macron les a balayées dès son intronisation. Il y a ceux qui savent, et les autres. Alors un référendum, plutôt crever. La politique des convictions a cédé sa place à la politique technocratique et à la rationalité qui ne faillit jamais. Et ce n’est pas un hasard si Macron en bon nécrologue – son meilleur rôle – a souhaité rendre un hommage dit national, mais sans la moitié des Français à la demande de la famille, à Robert Badinter. Comme l’a rappelé brillamment la philosophe Chantal Delsol dans Le Figaro, « Robert Badinter est panthéonisé parce qu’il est l’un des premiers acteurs, et peut- être même le premier, de cette métamorphose complète du sens de la démocratie ».
Le rêve d’une Europe technocratique prend du plomb dans l’aile, Emmanuel Macron lance donc les hostilités : « Je n’ai jamais considéré que le RN ou Reconquête s’inscrivaient dans l’arc républicain » a-t-il déclaré dans L’Humanité. Causer « valeurs de la République » chez les cocos, fallait oser. Entre la célébration de la collaboration avec les Teutons en 40, ou l’apologie de Staline et de Mao, le quotidien n’a jamais caché sa passion pour les génocidaires. Certains appellent ça le pluralisme. De là à venir lustrer leur faucille pour glaner quelques voix, l’amputation de la honte s’opère aujourd’hui sans douleur.
Et ce n’est pas un hasard si Macron en bon nécrologue – son meilleur rôle – a souhaité rendre un hommage dit national, mais sans la moitié des Français à la demande de la famille, à Robert Badinter
Au passage, le président a reconnu que « la prise du contrôle du JDD par Vincent Bolloré » n’était pas sans lien avec le lancement des État généraux de l’information. Au lieu des réels enjeux sur les évolutions du journalisme et les questions fondamentales d’indépendance d’un contre-pouvoir, Macron avoue ses médiocres intentions politiques. Le Cercle de la raison ne doit souffrir d’aucune contradiction.
Oradour-sur-Glane bien siphonné, il fallait dégueulasser une autre histoire. Manouchian tombait à point pour ressortir la bête immonde du chapeau. « Les forces d’extrême droite seraient inspirées de ne pas être présentes », affirmait notre président la veille de la panthéonisation du résistant communiste qui repose désormais aux côtés de Jean Moulin, qui lui n’avait pas parlé. La mythologie rouge a encore de beaux jours devant elle. « Parce qu’ils sont communistes, ils ne connaissent rien d’autre que la fraternité humaine. » L’apologie du communisme par un ancien banquier: la politique réserve toujours d’étonnantes surprises. Quant à la « fraternité humaine », les corps déchiquetés des goulags, de Katyn, de la Seine ou de Changchun s’en seraient bien passés. Cent mil- lions de morts, un détail comme disait l’autre.
Lire aussi : Éditorial d’Arthur de Watrigant : C’est l’histoire de…
« Missak Manouchian, vous entrez ici en soldat, avec vos camarades, ceux de l’Affiche, du Mont-Valérien, avec Golda, avec Joseph et avec tous vos frères d’armes morts pour la France. Vous rejoignez avec eux les Résistants au Panthéon. L’ordre de la nuit est désormais complet », concluait plein d’emphase Jupiter. Fermez le ban, les autres, les d’Estienne d’Orves, les Monseigneur Saliège, les Abbé Derry iront ailleurs. Plus commémorer pour mieux diviser, et les veaux seront bien gardés.