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Jordan Peterson : Arme de reconstruction massive

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Publié le

20 juin 2019

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L’avantage propre au chaos, c’est qu’il est propice à l’émergence rapide de nouvelles possibilités. Et ce n’est pas l’auteur de Douze Règles pour la Vie : Une antidote au chaos qui nous contredira. Le psychologue Jordan B. Peterson est devenu l’idole des jeunes pour son message de responsabilisation individuelle, confirmant ainsi l’aridité intellectuelle et spirituelle de notre époque. 

 

Nombres et lumières

Pour se rendre compte de l’importance de ce phénomène culturel occidental, car c’en est un, quelques chiffres s’imposent. Peterson, c’est deux millions d’abonnés sur Youtube, 1,2 millions de followers sur Twitter, et presque 500 000 personnes qui le suivent sur Facebook, le tout lui permettant de dépasser la barre du milliard de vues cumulées sur ses vidéos mises en ligne ! Son dernier livre s’est vendu à trois millions d’exemplaires, le plaçant à la septième place des best-sellers mondiaux d’Amazon de l’année 2018, et plus de 300 000 personnes ont déjà pu assister à ses conférences bondées.

 

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Deux étincelles médiatiques ont été suffisantes pour propulser son message aux quatre coins du globe et simultanément concentrer sur sa personne des tirs médiatiques d’une rare violence. La première eut lieu lorsqu’il s’opposa publiquement, en 2016, à la loi Canadienne qui cherchait à imposer aux gens d’adresser les transgenres par le pronom de leur choix, même fictif, sous peine d’amende. « Je ne paierai pas d’amende. S’ils me mettent en prison je ferais une grève de la faim » avait-il déclaré.

La seconde fut une interview réalisée par la journaliste Cathy Newman en Janvier 2018, où, impassible, il résista aux assauts aussi maladroits que malhonnêtes de cette dernière. Chaque phrase de Peterson fut constamment déformée, caricaturée, par une idéologue qui sembla surprise de voir que sa méthode habituellement efficace d’intimidation se heurta à un mur. Sa phrase fétiche, « so, what you’re saying is… » finit en mème viral, et elle cria au harcèlement digital pour essayer de masquer son échec intellectuel.

 

Le sens précède l’existence

Paradoxalement, c’est en pourfendant les démagogies de l’époque que Peterson a su attirer autant de fidèles : « Les gens ont faim d’une discussion sur la relation entre la responsabilité et le sens. Notre culture n’a pas eu cette discussion depuis cinquante ans. On s’est concentré sur des droits, des privilèges, la liberté, les plaisirs impulsifs – que des choses utiles dans certains cas mais sans profondeur. »

Sa pensée et l’explication de son succès tiennent dans la même phrase : Peterson parle de devoirs et de sacrifices à un monde qui ne parle que le langage des droits et des plaisirs. Son point de départ intellectuel, comme en témoigne le portrait de Staline qui décore sa maison, est le totalitarisme au XXème siècle. C’est avec joie qu’il a accepté de rédiger la préface de l’édition abrégée du 50ème anniversaire de L’archipel du Goulag. Il a tiré de ce livre, et sans doute aussi de sa jeunesse marquée par la guerre froide, l’importance pour chaque individu de mettre sa vie en ordre afin de ne pas pouvoir devenir un rouage docile dans une mécanique tyrannique.

De ses connaissances sur le Taoïsme il garde l’ordre et le chaos comme matrices du monde qui nous entoure. Vivant dans une époque de chaos, il nous faut retrouver l’ordre. La finalité étant de pouvoir naviguer la ligne médiatrice située entre les deux, lieu où réside le sens et les responsabilités.

 

Où sont les femmes ?

Le chaos, selon Peterson, a traditionnellement été symbolisé par le féminin. Du chaos peut surgir de nouvelles possibilités, les femmes mettant au monde la vie. A contrario, l’ordre est intrinsèque aux règles et au masculin, et peut-être étouffant lorsque poussé trop loin. Cette réalité anthropologique est déjà inadmissible pour le politiquement correct américain, qui prend plaisir à y lire une défense (inexistante) de l’infériorité de la femme.

« Si on pousse trop les hommes à se féminiser, ils deviendront de plus en plus intéressés par une idéologie fasciste »

Cette critique lui est souvent portée par les journalistes sous forme d’accusation : Peterson ne parlerait qu’aux hommes. Même partiellement fausse, cette proposition mérite analyse : « Notre culture confond le désir des hommes pour la réussite et la compétence avec un désir de pouvoir patriarcal » affirme-t-il. Dans une époque qui ne fait que vomir le ‘patriarcat’, une légitimation du désir inné des hommes pour la réussite représente pour beaucoup d’entre eux une clarification salvatrice.

« Si on pousse trop les hommes à se féminiser, ils deviendront de plus en plus intéressés par une idéologie fasciste » prévient Peterson. Plusieurs de ses chapitres s’intéressent aux différences de comportement entre les hommes et les femmes, statistiques à l’appui, afin de fustiger avec son approche transdisciplinaire le constructivisme fou des universitaires.

 

Carl Jung, Jésus Christ et Darwin

La superficialité apparente des douze règles qui présentent chaque chapitre guide en réalité le lecteur doucement vers des principes bien plus complexes et anciens. Outre l’accent mis sur l’ordre et le chaos, Peterson se repose sur le sens caché à l’intérieur des mythes égyptiens ou encore l’épopée de Gilgamesh. Ses écrits ont par moment des accents Aristotéliciens, comme lorsqu’il distingue notre actualité de notre potentialité ou encore quand il souligne l’importance d’une fin transcendante guidant nos actions quotidiennes.

Sa playlist YouTube ayant le mieux réussie est celle sur l’importance psychologique de la Bible : une quinzaine de vidéos de deux heures et demie qui décryptent ce que les premières histoires de l’Ancien Testament nous apprennent sur nous-mêmes. De l’arche de Noé, il conclut que nos civilisations sont mortelles à la fois par la simple loi de l’entropie mais aussi par notre propre aveuglement. Peterson parvient à en extirper quelques principes psychologiques salutaires.

 

 

Le talent de Peterson repose en sa capacité à donner vie aux principes anciens en les mariant à des travaux psychologiques plus contemporains. S’il fallait s’atteler à la difficile tâche de réduire son livre à trois sources d’inspiration, ce serait Carl Jung, Darwin, et la Bible. Il martèle sans cesse l’importance des archétypes et des histoires Bibliques dans l’évolution de notre inconscient collectif, traçant des parallèles avec les personnages à succès des meilleurs films Disney.

 

L’homme qui murmurait à l’oreille des étudiants

Ce type d’approche accessible illustre sa faculté hors norme à nous faire glisser de la théorie à la pratique. Quinze ans d’expérience en tant que psychologue clinicien ont permis à Peterson d’être ancré dans le réel, permettant une connaissance profonde des problèmes des gens tels qu’ils sont. Parsemé d’anecdotes sur ses anciens clients, son livre concrétise des principes abstraits. Tous les jours, plusieurs personnes le remercient d’avoir changé leur vie en le croisant dans les rues des plus de cent villes dans lesquelles il a désormais prêché.

 

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La clé de son succès réside dans sa capacité à aller chercher la jeunesse là où elle est. Peterson suscite l’intérêt de ces jeunes qui, de leur studio universitaire ou du sous-sol de leurs parents, se livrent aux débilités digitales pour masquer le sentiment profond d’absence de direction dans leurs vies. En quelques clics sur YouTube, ils découvriront la signification derrière le Roi Lion, suivi d’une analyse de Dostoïevski en passant par Généalogie de la morale de Nietzche.

De la pensée de Peterson, on peut regretter une chasse aux marxistes un brin désuète ainsi qu’un penchant important pour l’existentialisme. Néanmoins, Peterson demeure « le penseur public le plus influent » de notre époque comme le New York Times lui-même a fini par avouer, et son combat contre le postmodernisme ne peut donc que nous réjouir. Si le conservatisme est avant tout, comme l’avait défini Michael Oakeshott, une disposition psychologique, alors Peterson prône un agrégat atypique de conservatisme darwinien et d’individualisme protestant. L’intéressé trouve déchirant de voir qu’un message d’une essence si simple (règle numéro une : « tenez-vous droit, les épaules en arrière ») ait rencontré un succès aussi foudroyant chez les jeunes occidentaux. En cela, Jordan Peterson témoigne simultanément de la sécheresse spirituelle de notre temps et des nouvelles possibilités qu’elle ouvre.

 

Pierre Valentin

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