Le samedi 28 octobre 2017 disparaissait Alexia Daval, partie faire son jogging matinal. Son corps est retrouvé deux jours plus tard, calciné et caché dans un bois près de Gray, en Haute-Saône. L’examen post-mortem montre que le décès de la victime est dû à des coups et à un étranglement. La nouvelle suscite rapidement l’indignation, et pose la question des risques encourus par les femmes pratiquant la course à pied. Interrogation légitime qui avait déjà été soulevée par les cas de Milly la Forêt en 2009 et plus récemment du viol de Marcq-en-Barœul.
Très médiatisée, l’affaire Daval donne lieu à de nombreux rebondissements, notamment de la part de Jonathann Daval, le conjoint d’Alexia, qui devient rapidement le principal suspect du meurtre. Suite à la disparition, il s’est montré proche de la famille d’Alexia, et était présent aux marches blanches. Mais tout change lorsque les gendarmes l’arrêtent le 29 janvier 2018 et lui font avouer un « étranglement accidentel », qui avait pour but originel de contenir sa femme en proie à une « crise extrêmement violente ». Mais, cinq mois plus tard, il revient sur ses premiers aveux et affirme subir un « complot familial ». Il accuse le mari de la sœur d’Alexia Daval, Gregory Gay, d’être l’auteur du crime. Cinq longs mois encore sont nécessaires avant que Jonathann, le 7 décembre 2018, n’avoue à nouveau son crime.
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Plusieurs informations quant à la mauvaise santé du couple sont venues éclairer l’affaire et ont été utilisées pour adoucir le sort du principal suspect. En effet, Alexia souhaitait avoir un enfant, espoir rendu vain par les problèmes érectiles de son mari et son refus d’avoir des relations sexuelles. Selon les dires de Jonathann, c’est suite à une morsure de la part d’Alexia, après qu’il ait de nouveau refusé d’avoir un rapport sexuel, qu’il l’aurait roué de coups et étranglé. L’autopsie révèle que des substances contre-indiquées pour une grossesse auraient été prises par la victime. Or, elle était alors désireuse de recourir à la procréation médicalement assistée, et n’aurait donc pas pris ces produits sciemment.
Quant à Jonathann, l’expertise psychiatrique révèle une personnalité « de type obsessionnel ». Le 17 juin 2019, il reconnaît avoir incinéré le corps, chose qu’il avait jusqu’alors nié. L’information judiciaire, qui permet à un juge d’instruction de rassembler les preuves, de décider du sort du suspect et de le renvoyer devant la juridiction adéquate, était alors close. Jonathann est renvoyé devant la cour d’assise de Haute-Saône afin d’être jugé pour son crime. Il est entendu à partir du lundi 16 novembre. Au cours du procès, il avoue qu’il voulait « qu’Alexia se taise ». Ainsi, alors qu’il prétendait ne jamais avoir voulu tuer son épouse, il reconnaît le contraire et donne d’une certaine façon raison à Marlène Schiappa, qui n’avait pas manqué début 2018 de montrer son dégoût de voir un « féminicide » être qualifié « d’accidentel ».
Jonathann, résigné à accepter sa peine, avait déjà déclaré lors de l’audience ne pas souhaiter faire appel. Reste à voir la réalité d’une peine qui, on l’imagine, subira maints aménagements via le juge de l‘application des peines
L’homme, qui avait déjà changé cinq fois sa version des faits depuis le début de l’affaire, encourt la perpétuité, peine requise par l’avocat général, chargé de représenter les intérêts de la société. Après avoir songé un temps à le pardonner, Isabelle Fouillot, la mère de la victime, confie quant à elle aux journalistes présents à la sortie du Palais de justice son souhait de voir Jonathann passer le plus de temps possible en prison. Finalement, il esquive la perpétuité en étant seulement condamné à 25 ans de prison ferme par les jurés.
La mère de la victime s’estime satisfaite de cette « très bonne décision ». Le père renchérit : « La justice a bien fait son travail ». Jonathann, résigné à accepter sa peine, avait déjà déclaré lors de l’audience ne pas souhaiter faire appel. Reste à voir la réalité d’une peine qui, on l’imagine, subira maints aménagements via le juge de l‘application des peines. Le rideau final est tiré sur cette tragique affaire, mais Isabelle Fouillot, persuadée que les vrais mobiles n’ont pas été exposés, gardera le sentiment amer de ne pas connaître les motivations réelles du meurtre de sa fille.