Lille, 11 mars 2018. Le Front national tient son XVIe congrès. Ce sera le dernier. Marine Le Pen, forte de sa légitimité à la présidence du parti – seule candidate à sa succession, elle vient d’être réélue avec 100 % des suffrages exprimés – mais consciente des limites intrinsèques du FN du fait de son nom et de l’histoire tumultueuse que celui-ci véhicule, propose que le Front national devienne le Rassemblement national. « Il faut qu’aux yeux de tous, explique-t-elle à la tribune, il ne fasse plus de doute que nous sommes désormais un parti de gouvernement ». De plus, ajoute-t-elle, « nous devons mettre en œuvre des alliances […] Parce que sous la Ve République, qui repose sur un mode de scrutin à deux tours, gagner sans alliances est ardu ». Elle vient d’en faire l’expérience…
Le temps que les adhérents avalisent le changement, et, quelques mois plus tard, le FN est mort, vive le RN. Doté d’une nouvelle culture ? C’est ce qu’elle a promis : « La culture de l’alliance, c’est la faculté de respecter l’autonomie de ses partenaires, c’est l’aptitude à intégrer les ralliés et à respecter ses alliés, leurs parcours, leurs identités propres, leurs sensibilités ». À n’en point douter, les élections régionales constituent une étape cruciale de cette redirection stratégique et une répétition générale avant la présidentielle de 2022.
Transfuges
De fait, l’état-major du RN s’active pour faire publiquement montre de sa capacité à rassembler et le choix des têtes de liste témoigne d’une volonté de mettre en avant les récents transfuges, quitte à pénaliser les historiques : six des treize chefs de file métropolitains n’ont rejoint le parti que depuis la dernière présidentielle. Ex-Debout la France rallié en 2017 au RN dont il est devenu à la fois le porte-parole et le secrétaire national aux élus, Laurent Jacobelli mène par exemple la liste dans le Grand-Est. Là où il conduisait en 2015, celle de Debout la France, tandis que celle du FN était menée par Florian Philippot, qui est encore son adversaire, mais cette fois à la tête d’une liste intitulée « Liberté ! », fruit d’une alliance surprenante entre son parti, Les Patriotes, et Via, la voie du peuple, celui de Jean-Frédéric Poisson.
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Dans le même esprit de signal donné à l’électorat qui pourrait être tenté l’an prochain par un autre candidat que Marine Le Pen mais pourrait aussi se rabattre sur elle pour faire échec à Emmanuel Macron, c’est Andrea Kotarac, ancien membre de La France insoumise, qui a été investi en Auvergne-Rhône-Alpes, malgré l’échec retentissant, aux municipales lyonnaises, du tandem qu’il formait avec Agnès Marion. Agnès Marion n’a pas sauvé sa tête, Kotarac a bien failli ne pas sauver la sienne, mais le siège du RN s’est résolu à le désigner, sa mise sur la touche risquant d’entraîner son départ et de l’amener à dire tout haut ce qu’il pense du fonctionnement du parti, ce qui aurait été du plus mauvais effet sur l’électorat mélenchoniste. [...]
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