Quelle est la genèse de votre rencontre ?
Mathieu Bélis : Il fallait que ça se fasse ! Et ce fut lors d’un concert d’une chanteuse indienne avec son percussionniste. On s’est vus très vite pour échanger sur nos approches musicales. Dès qu’on s’est mis à jouer, l’alliance des timbres et résonances du piano et de la flûte indienne nous a paru évidente.
Guillaume Barraud : Une frustration est née de notre collaboration précédente, qui était plus « musique du monde », on était restés sur notre faim. Nous sommes tous les deux compositeurs et la recherche ensemble fonctionne bien.
Comment définiriez-vous votre singularité musicale ?
GB : On a soif d’autres approches concernant notamment le rôle de la flûte dans l’orchestration. On est vigilants à ce qu’elle ne tienne pas seulement le rôle de « chanteur » mais qu’elle prenne aussi celui de « l’accompagnateur », un rôle que nous prenons d’ailleurs tour à tour. On éprouve du plaisir à sortir les instruments de leur contexte tout en gardant l’intégrité de l’héritage. J’influe sur le son de ma flûte bansurî en jouant sur les registres basse et médium de sorte que le son finit par s’apparenter à de la flûte traversière. Je joue ici une carte très moderne au sein d’une double approche, traditionnelle d’un côté, et de l’autre, dans la création pure, ce qui me permet d’élargir le vocabulaire de mon instrument. « Filature », « Parade of Stars » en sont de bons exemples !
Comment avez-vous choisi vos instruments respectifs ?
MB : Mon père est un amateur éclairé et pianiste mélomane. Je fais du piano depuis mes sept ans, des percussions et du tabla. Mon jeu pianistique est d’ailleurs très rythmique, l’aspect percussif du piano m’est essentiel. J’emploie aussi pas mal de séquences impaires pour la spécificité de leurs effets. Ça fait partie de notre goût pour le détournement !
GB : J’ai commencé la guitare à dix ans, mais aussi la batterie avec mon frère, ce qui m’a permis de développer la rythmique et la mélodie simultanément. Mon initiation jazz n’est venue que sur le tard. Puis il y eut une période intense de voyages, notamment en Inde, où j’ai acheté cette fameuse bansurî, une flûte traversière en bambou supposée être le plus ancien instrument de musique de l’Inde du nord. Non seulement j’ai été très marqué par le son et l’esprit du genre de musique jazz et traditionnel indo-européen du groupe shakti avec John McLaughlin, mais j’ai aussi développé mon ressenti d’instrument à Bhuj, près de la frontière pakistanaise. Je taquinais ma nouvelle acquisition lorsqu’un disciple de Hariprasad Chaurasia frappa à ma porte puis me fit rencontrer le maître. J’ai délaissé la guitare – qui ne me sert plus qu’à composer – pour me consacrer au souffle du bambou. Ce genre de musique m’a happé !
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