Dans le jour morne de cette rentrée littéraire médiocre et convenue, Nuits offre une superbe éclaircie. Suite de souvenirs éparpillés autour de la nuit, de l’alcool, de la perte de soi, du désir vrillant et de l’amour raté, le roman, déjà, évite le petit récit linéaire de reconstruction de soi. C’est tout le contraire, ici on plonge : un homme convoque les morceaux en désordre de sa vie à la dérive, hanté par l’attraction du vide, de sa propre perte, après l’échec d’un amour qui aurait pu le sauver. Les fragments alternent d’une ville à l’autre, de l’Afrique à l’Europe et de l’enfance à l’âge adulte, mais tous magnétisés par le mystère nocturne et ce qu’il implique : désespoir, aveux, pulsions, tendresse, misère, impasses sinistres et grâces paradoxales. En somme, tout ce qui constitue la matière littéraire brute : l’ensemble de ce qui est caché derrière les costumes repassés du jour et qui dévore les êtres de l’intérieur. Ainsi ne trouve-t-on pas, dans Nuits, le récit narcissique avançant la nuque raide dans sa blouse idéologique, mais une fresque fragmentée où défile une faune d’ivrognes mythiques, d’égarés émouvants et de filles perdues, une toile qui baigne, plutôt que dans la morale victimaire, dans la grande miséricorde des bannis dessillés. [...]
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