C’était il y a presque 5 ans. Le 19 juillet 2017, le général Pierre de Villiers, alors chef d’État-major des armées annonce sa démission dans un communiqué. Il quitte ses fonctions dans un contexte de tensions sans précédent avec le Président de la République. A l’époque, Emmanuel Macron ne semblait pas tenir parole sur la sensible question des finances des armées. Applaudis à l’unanimité par les civils et les militaires du ministère des Armées lorsqu’il quitte, le jour même, le Pentagone à la française : Balard, Pierre de Villiers aura réussi à remettre la question des armées au centre des préoccupations politiques.
Aujourd’hui, si la démission de l’émérite général semble appartenir au passé, le budget des armées, lui, n’a jamais été autant d’actualité. Le 4 avril dernier, le Gouvernement a présenté, dans une procédure accélérée, son projet de loi pour « transformer » les armées entre 2024 et 2030. Une sortie de chéquier qui coûte tout de même 413 milliards d’euros.
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Si l’on en croit la communication du ministère des armées sur son site internet, l’objectif de la loi est quintuple : réussir les sauts technologiques, accroître les forces morales, rester dans le peloton de têtes des services de renseignement, garantir la crédibilité de notre dissuasion, maîtriser les nouveaux espaces de conflictualité. Vaste programme !
Jean-Louis Thiériot, député LR et membre de la commission Défense nous confie son enthousiasme : « D’un point de vue exclusivement militaire c’est une loi qui répond à une bonne partie des besoins et qui donne une cohérence d’ensemble […] Si on voulait avoir la totalité des moyens, il faudrait entre 30 et 40 milliards d’euros de plus. Vous connaissez l’état des finances publiques… Je considère que compte tenu de ces dernières, cette loi est la meilleure possible. Elle n’est pas historique, elle est raisonnable ».
De son côté, le député RN Julien Odoul est plus tempéré et dénonce une volonté politique d’internationalisation des moyens militaires : « C’est évidemment une loi nécessaire et un débat important. Néanmoins, il y a un véritable problème au niveau de l’utilisation de la vocation des armées françaises compte tenu de la place de notre nation dans le monde et compte tenu des échecs de notre diplomatie. Il est vrai que nous avons du mal à comprendre ce qu’est devenue la place de la France, qui historiquement a été au premier plan avec la pensée gaullienne et son fleuron national : l’armée. Nous avons la chance d’avoir une des rares armées au monde qui peut être projetée partout en restant autonome. […]Il y a aussi une philosophie particulière. Il me semble que la volonté de ce Gouvernement est que l’armée française soit remplacée par une armée européenne. Elle estime donc qu’il n’y aura plus de conflit de haute-intensité, avec l’idée que la dissuasion nucléaire protège tout le monde … »
En somme, selon le détail de l’Agence France-Presse, la loi prévoit 98 milliards d’euros pour les effectifs, c’est-à-dire le recrutement et les ressources humaines. Le budget alloué au matériel et aux équipements est de 268 milliards d’euros soit les véhicules blindés terrestres, amphibies, des navires de la Marine nationale ou encore des avions. Aussi, 16 milliards d’euros seront alloués à l’augmentation des stocks de munitions soit une hausse de 4,5%. Dans la même veine de l’anticipation des menaces futures, le cyber et l’espace sont également les grands gagnants de cette loi de programmation militaire avec 4 milliards (+300%) pour le premier et 6 milliards pour le second (+40%). De plus, 5 milliards seront attribués au renseignement et deux milliards aux forces spéciales. A noter que 400 milliards sont financés par des crédits budgétaires tandis que 13,3 milliards le sont par des ressources extrabudgétaires. Cet arbitrage semble avoir notamment, favorisé la Marine par rapport aux autres armées dans le but de permettre à cette dernière de défendre les intérêts Français dans l’Indopacifique face à la montée de l’impérialisme chinois.
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Alors que le projet de loi est, cette semaine encore, débattu au Palais Bourbon. Les débats y sont plutôt de bonnes tenues. C’est ce que rapportent Jean-Louis Thiériot et Julien Odoul : « On ne va pas se mentir, les sujets de Défense ne passionnent pas les Français mais les débats se déroulent très bien. On a un ministre qui est politiquement extrêmement habile et qui a une capacité d’écoute réelle » pour le premier. Pour le second, « c’est un débat qui se passe sereinement. Il se fait dans le respect, c’est la philosophie du ministre. C’est un sujet qui doit nous rassembler car il s’agit de la place de la France dans l’Europe et dans le monde, de la sécurité des Français, de la souveraineté de la France. Il est donc relativement consensuel ».
En clair, si cette loi de programmation militaire permet un gros bol d’air aux armées, étouffées depuis de trop nombreuses années par l’austérité budgétaire, elle reste toujours lacunaire. « Ça aurait été trop beau » s’écrient certains, « on s’en contentera » se résolvent les autres.