Stade de France : « Je vois à l’œuvre un travail de sape et de mésentente nationale »
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Vous avez suivi comme nous la débâcle des autorités françaises face à la puissance de la racaille de Seine-Saint-Denis : Gérald Darmanin explique que ce sont les supporters anglais qui ont créé les troubles. Qu’en pensez-vous ?
Je crois qu’on essaie d’hystériser le débat entre les forces de l’ordre et cette « racaille », et de rendre la vie impossible à tout le monde parce que la racaille ce sera seulement celui qui est un peu différent de l’autre. Ceux qui veulent mettre le bazar dans le pays ne s’y prendraient pas autrement pour monter les gens les uns contre les autres.
La racaille je ne sais pas ce que c’est : les gens qui sont en situation irrégulière, je sais ce que c’est ; les gens qui ont un passé de délinquant avéré, je sais ce que c’est. Mais si l’on désigne les habitants de Seine-Saint-Denis, je suis désolé mais c’est faux. Je suis maire d’une ville de 28 000 habitants, je connais mes délinquants mais je connais aussi toutes les personnes qui ne sont pas délinquantes. Mais comme ils se ressemblent, il y en qui commencent à en avoir assez d’être pris pour la racaille. Et on ne se rend pas compte des dégâts que ça crée par ricochet.
Je dis qu’il faut faire attention à la façon dont les choses sont formulées parce qu’il y a une forme d’amalgame qui est accompli, par une exaspération que je comprends d’ailleurs
Alors, qui sont pour vous les fauteurs de trouble autour du stade de France ?
J’ai cru voir sur les réseaux sociaux qu’on avait un peu plus d’indications sur les gardés à vue, au point de vue des nationalité, des âges, des statuts, des gens qui sont en situation irrégulière, etc. Mais je dis qu’il faut faire attention à la façon dont les choses sont formulées parce qu’il y a une forme d’amalgame qui est accompli, par une exaspération que je comprends d’ailleurs.
Il faut retenir ça qu’on est dans une confusion totale et que les dégâts collatéraux par rapport à ce qui s’est passé ce week-end seront cent fois supérieurs aux faits dénoncés.
Ne pensez-vous pas qu’avec ces incidents l’image de la France a été sévèrement abîmée ?
Je suis d’accord mais je ne voudrais pas qu’elle le soit encore d’avantage par les amalgames qui sont faits. Tout le monde est ébahi et l’image de la France est sacrément déformée : le pire étant qu’on se soit défaussé de la sorte sur les supporters anglais, c’est insupportable. Mais je vois à l’œuvre un travail de sape et de mésentente nationale bien plus subtil et plus ravageur que les faits du week-end. Et c’est le vrai sujet.
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Vous-même dans votre ville avez pris un certain nombre de mesures pour enrayer la délinquance de ces jeunes : quelle politique préconisez-vous ?
Je reste extrêmement prudent à l’égard des politiques que j’ai pu mener depuis vingt ans : je ne crie pas cocorico, ce serait stupide de ma part. En revanche, je crois qu’on crédite la ville de Montfermeil d’un certain nombre de résultats, notamment pour ce qui à trait à la délinquance. Si je devais résumer ce que j’ai tenté de faire comme maire, je dirais que j’ai tenté de faire connaître, respecter et aimer la France. Cela passe par quelques mots clés : redonner dignité et fierté aux gens à travers le cadre de vie, ce qui passe par l’urbanisme, l’architecture et la qualité de l’espace public. C’est un préalable insuffisant en soi mais c’est un préalable indispensable. D’autre part, les politiques éducatives et culturelles doivent immédiatement suivre dès lors qu’on aura redonné dignité et fierté. En vingt ans, Montfermeil est une ville où le niveau scolaire n’a cessé d’augmenter, où le niveau de la délinquance n’a cessé de diminuer et où l’on est plutôt dans une dynamique vertueuse, me semble-t-il. La population de Montfermeil le montre en s’attachant à me reconduire dans mes fonctions. Faire connaître, aimer et respecter la France, ce pourrait être un programme national et l’on verrait les choses d’une toute autre manière que celle avec laquelle avec laquelle on a l’habitude de traiter l’information.
Il y a tout à rebâtir, de fond en comble intellectuellement
Vous vous êtes souvent affiché en faveur de l’union des droites. Or il semble que la droite perdra encore la bataille des élections législatives : cette défaite laisse-t-elle présager encore de nombreuses années d’inaction face à une jeunesse livrée à elle-même ?
Je pense que certaines renaissances sont impossibles tant que l’ancien système n’est pas mort. Il y a tout à rebâtir, de fond en comble intellectuellement. C’est la seule chose qui vaille. Tant pis pour cette union des droites qui ne se fera pas, c’était de toute façon mission impossible à cause des grands écarts anthropologiques et philosophiques entre les différentes familles. Je pense que les évènements en cours et à venir vont nous obliger à une refondation plus systématique et à une anthropologie qui soit mieux fondée que celle sur laquelle la droite s’est appuyée ces dernières année et qui n’a aucune consistance.
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