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Saint-Etienne : les agresseurs du candidat RN sont liés à LFI

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Publié le

24 juin 2024

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Ce devait être une matinée de tractage banale, mais elle aura terminé par l’hospitalisation d’Hervé Breuil, candidat Rassemblement national dans la 2ème circonscription de la Loire. Selon nos informations, les agresseurs sont arrivés main dans la main avec les militants de La France Insoumise.
© DR

Militants RN : l’enfer du tractage

Peut-être faudrait-il d’abord définir ce qu’est un « tractage banal » pour un militant du RN. Depuis plus d’une semaine, Hervé Breuil, 70 ans, et sa petite équipe arpentent les marchés de Saint-Étienne à la rencontre des électeurs, dans la joie et la bonne humeur. Il y a Monique* et Jacques*, un couple de 58 et 66 ans, mais aussi Catherine*, 68 ans, et enfin le petit jeune de la bande, Mathieu*, 23 ans. Au marché de Bellevue déjà, puis sur le marché de Fauriel, le mercredi 19 juin, veille de l’agression, l’équipe décrit un climat de tension avec d’autres militants de partis concurrents. « Je mets toujours un point d’honneur à dire bonjour à mes homologues avec un grand sourire, je n’ai aucune animosité, certains pourraient être mes enfants », raconte Hervé Breuil. Il poursuit : « Bien souvent, je n’ai aucune réponse, mais parfois, ça les rend fous, et les insultes fusent. Les classiques, “facho”, “raciste”, etc”. » Il raconte même comment, sur le marché de Fauriel, un homme, « surement un intermittent du spectacle » avait entonné à côté de lui une chansonnette : « Les fachos sont là…lala ». « En tant qu’homme de spectacle, ça ne m’a pas déplu, et quelle pub il m’a fait ! », plaisante Hervé.

Mais si la petite troupe ne se laisse pas démonter par les incivilités des militants LFI ou EELV qu’ils croisent quasiment à chaque session de tractage, parallèlement, une autre musique, bien plus angoissante, se met en place. « C’est toujours les mêmes techniques : un groupe d’individus, souvent habillés tout en noir et masqués, sans tracts, se met à nous coller. Chaque militant est collé par un individu, à 20-25cm, c’est ce que j’appelle la technique du sparadrap. » Le but de l’opération : mettre une pression constante pour déstabiliser, empêcher de tracter et surtout, intimider les éventuels électeurs qui n’osent plus s’emparer des tracts. Au cours de ce petit manège, les insultes ne sont pas en reste, mais aussi les menaces. « On se retrouvera quand il n’y aura pas de caméras », lance un des individus au jeune Mathieu ce jour-là.

Ce mercredi, sur le marché de Fauriel, la police finit par intervenir, prévenue par un responsable du marché, et comme toujours, c’est l’inversion des faits. « Ils ont raconté à la police que notre jeune militant avait demandé à un homme de rentrer dans son pays. Évidemment, tout ça est ridicule. Je connais chacun de mes militants, jamais ils ne tiendraient ce genre de propos. » Au final, pour tenter de contenir les tensions, les agents de police conseillent aux militants RN de battre en retraite. « Évidemment, j’ai refusé, raconte Hervé, nous ne faisions que tracter pacifiquement dans un cadre démocratique, ce n’était pas à nous de partir. »

Les agresseurs main dans la main avec les militants LFI

Ce jeudi 20 juin, sur la place du petit marché Albert Thomas à côté de la Bourse du Travail de Saint-Étienne, il y a peu de monde, le temps est pluvieux. Hervé Breuil arrive le premier aux alentours de 9h15 et décide d’aller attendre son équipe dans un petit bistrot alentour. Ses militants arrivent au compte-goutte et immédiatement, Mathieu, le cadet de l’équipe remarque la présence d’individus déjà croisés aux marchés précédents, qui rôdent. « Je les ai reconnus tout de suite, ils avaient l’air de nous observer », relate le militant. Quelques minutes plus tard, arrive un groupe de militants du parti La France insoumise : « Ils tenaient dans leurs mains des tracts LFI. » Plus surprenant, parmi ce groupe, une jeune femme en jogging noir qui prendra part à l’agression un peu plus tard. « Elle n’avait pas de tracts, mais elle est arrivée avec eux. Avec le recul, j’ai trouvé ça intéressant. »

Pour confirmer cette information, L’Incorrect a pu se procurer et consulter toutes les vidéos tournées lors de cette matinée, avant, pendant et après l’agression. Sur l’une d’entre elles, nous observons le fameux groupe de militants La France insoumise, tracts en mains et en pleine discussion avec Hervé Breuil. Le contenu de la conversation est inaudible mais le climat semble apaisé. À leurs côtés, une jeune femme en jogging noir Adidas, casquette, sac-à-dos et masque noir. La jeune femme semble agitée, fait les cent pas et regarde autour d’elle. Quelques secondes plus tard, Hervé Breuil, suivi à moins d’un mètre par la femme masquée, s’éloigne des militants LFI pour aller donner un premier tract à une passante du marché. Tout au long de la manœuvre, la jeune femme ne quitte pas Hervé Breuil (la fameuse technique du sparadrap), puis tente même un rapprochement avec la passante, finalement avorté. La jeune femme semble nerveuse car elle a repéré le téléphone du jeune Mathieu, qui filme tout.

L’agresseur en jogging intimide Hervé Breuil alors qu’il propose un tract à une passante.

Dans la vidéo suivante, qui a lieu quelques secondes plus tard, toujours en présence des militants LFI, la jeune femme en noir s’approche brusquement du jeune Mathieu et lui lance sèchement : « Pose ton téléphone ». « Pourquoi ? » lui demande Mathieu. « Tu ne me filmes pas. » C’est Hervé Breuil qui viendra s’interposer entre Mathieu et la jeune femme.

L’agresseur en jogging Adidas demande à Mathieu de poser son téléphone.

Sur une photo séparée on aperçoit la jeune femme assise côte à côte avec un jeune homme barbu facilement identifiable parmi les militants LFI dans la vidéo précédente (il porte un pull vert et tient des tracts).

L’agresseur, vêtue d’un jogging Adidas aux côtés d’un militant LFI venu pour tracter.
Sur la place du marché, le militant LFI (barbe, pull vert) en train de tracter pendant que l’agresseur au jogging colle Hervé Breuil.

La matinée de tractage se poursuit sans trop de heurts, jusqu’aux alentours de 10h15, moment où deux militants âgés du groupe RN, Catherine et Vincent*, partis tracter séparément à l’autre bout du marché, rejoignent leurs collègues. Leurs vêtements sont trempés, ils viennent de se faire agresser par un « militant masqué » qui leur a jeté le contenu d’une bouteille d’eau au visage. Hervé Breuil et son équipe s’en plaignent aux militants LFI présents sur place, ces derniers assurent ne pas connaître l’individu en question. Pour Catherine et Vincent, transis, fin de la session de tractage. « Ils étaient trempés, il faisait froid, je leur ai dit de rentrer à la maison. », explique Hervé Breuil.

Vers 11h30, le groupe décide de plier bagage et de quitter le marché. Mais ils commettent une erreur stratégique : « Nous aurions dû passer par le milieu du marché, au lieu de ça, nous sommes passés par l’extérieur, à l’orée des rails du tramway. » C’est là qu’un groupe de cinq individus, tous masqués, les alpague. « Ils sont arrivés par derrière, l’un d’eux m’a prise par le bras et bousculée. Sans Hervé qui m’a retenue, je serais tombée. », relate Monique, qui conserve une douleur à l’épaule, des suites d’une précédente opération.

Sur les vidéos, on retrouve la jeune femme au jogging Adidas, accompagnée de deux femmes, et deux hommes. Ils entourent Hervé Breuil et trois militants d’un âge avancé. La situation est très tendue, les individus s’époumonent à quelques centimètres des oreilles de Jacques, 66 ans, qui tient son Bouvier bernois en laisse, sidéré. « Cassez-vous bande de fachos de merde ! Cassez-vous ! » Monique, sa femme, implore son mari de partir, ce dernier répond : « Mais quand même, on a le droit d’être là ! C’est la liberté ! » L’un des agresseurs, une femme à écharpe jaune, capuche et masque, se met à hurler : « C’est vous qui mettez des barrières, des frontières partout, qui virez des gens ! C’est ça la liberté pour vous ? Vous vous êtes des blancs, vous avez le droit de parler, les autres, ils ont pas le droit de parler ! »

Dans la vidéo suivante, la situation passe un autre cap. Un individu à casquette, lunette et masque noir déverse le contenu de sa gourde sur le groupe de militants, pendant qu’un autre attrape Hervé Breuil par le bras gauche tout en lui administrant un petit coup de pied par derrière : « Allez rentre-chez toi ! ». Immédiatement après cette scène, le même individu, short noir, chemise à carreaux, casquette et masque noir et blanc, se précipite sur le jeune Mathieu, qui filme, pour tenter de lui arracher son téléphone. « Je te prends ton téléphone ! », clame-t-il pendant que Mathieu se débat pour tenter de le conserver.

L’agresseur en noir déverse le contenu de sa gourde sur des militants pendant que l’agresseur en chemise tente de dérober le téléphone de Mathieu.

C’est à ce moment qu’Hervé Breuil décrit, alors qu’il est occupé à rassurer Monique, 58 ans, en pleine détresse, une violente poussée par l’arrière qui provoque un mouvement brusque au niveau de sa tête, « partie de travers ». « À ce moment, j’ai eu peur, car j’ai un pace-maker. »

Hervé Breuil agressé.

Le petit groupe se replie vers un parking environnant lorsque, pour finir, outre les insultes, la jeune femme à l’écharpe jaune se met à lancer sur le groupe déchets et autres fruits pourris qu’elle sort directement de son sac. La dernière vidéo montre le groupe des cinq agresseurs s’enfuyant à toutes jambes après l’arrivée de la police.

L’une des agresseurs jette des déchets et des fruits pourris sur les militants.

Un AVC et 8 jours d’hospitalisation

Sur conseil de la police et dans l’optique d’un dépôt de plainte, le groupe se rend alors au CHU de Saint-Étienne, à l’hôpital Bellevue, pour faire constater d’éventuelles blessures. Au moment de voir le médecin, Hervé Breuil est confus, oublie ses mots, mélange ses phrases. Le choc d’adrénaline pourrait lui avoir déclenché un AVC. Il est immédiatement transféré aux urgences pour des examens, qui confirment les complications, avant d’être interné en soins intensifs avec obligation de « lit strict ».

Aujourd’hui, Hervé Breuil, toujours hospitalisé, va mieux. Même s’il cherche encore un peu ses mots, il donne au téléphone l’image d’un homme blagueur que rien ne peut empêcher de sourire. Ancien artiste, Hervé Breuil a baigné dans le monde de la culture pendant 45 ans. Musique, théâtre, et même cinéma, puisqu’on l’aperçoit notamment dans la scène finale du film Les Visiteurs 2. « Ils ne peuvent pas le supporter. Ma proximité avec le monde du spectacle ne rentre tout simplement pas dans leur matrice. »

Hervé Breuil qui est sorti cette après-midi des soins intensifs, restera hospitalisé au moins jusqu’à la fin de la semaine. Il devra également suivre des séances de kiné à cause de douleurs au trapèze. Aux infirmières de l’hôpital Bellevue, il a fait part de sa seule véritable inquiétude : « Comment faire pour ma procuration ? »

* Hormis Hervé Breuil, tous les prénoms ont été modifiés.

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