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Dès lors que l’on regarde un peu plus loin que les têtes de gondole – du moins la plupart d’entre elles -, on constate qu’il y a encore quelque chose de vivant dans le royaume des lettres. Cette année le démontra encore. La preuve par dix.
Olivier Maulin, Les Retrouvailles (Le Rocher)
Le roi de Montmartre et prince des poètes, Olivier Maulin (« Maulin Ier » pour les intimes), a changé de registre cette année, délaissant l’épopée fantastico-burlesque qui a fait sa propre légende pour un huis-clos noir au sommet des Alpes. Psychologique, subtil, progressif, terrifiant, ce Maulin à contre-jour aura dépaysé ses lecteurs sans les décevoir. Longue vie au roi et à son œuvre !
Windham Lewis, Tarr (Pierre-Guillaume de Roux)
Monument de l’ère des avant-gardes, Tarr, du peintre-écrivain anglais Windham Lewis aura enfin été réédité par l’héroïque Pierre-Guillaume de Roux. Roman monstre, entre Dostoïevski et Joyce, mais saturé de psychotropes futuristes – « vorticistes », plus précisément -, ce livre disproportionné aux éblouissantes facettes nous aura consolé de la fadeur du petit roman français psycho-social à la mode.
Lutz Bassmann, Black Village (Verdier)
Le grand chamane du post-exotisme, Antoine Volodine, sous l’hétéronyme de Lutz Bassmann, aura développé avec la maestria qui le caractérise une nuance un peu plus noire de son mouvement littéraire fantôme. Black Village : quarante-cinq textes disposés en miroir et s’achevant brusquement avant leur propre terme, distillant toujours l’humour du désastre et la beauté la plus étrange de la littérature contemporaine.
Richard Millet, La Nouvelle Dolorès (Léo Scheer)
Déclinaison du Lolita de Nabokov, La Nouvelle Dolorès met en scène Pascal Bugeaud, le double littéraire de Richard Millet, pris entre deux femmes comme entre deux feux, la mère – cantatrice russe -, et la fille, revenant de New York, post-moderne, égarée, aguicheuse, vampirisée par l’époque plutôt que par un quelconque Humbert Humbert. Millet joue deux partitions parallèles et dérive dans un final troublant. Somptueux.
Miguel Bonnefoy, Sucre noir (Rivages)
Jeune et brillant écrivain renouant avec le réalisme magique latino-américain dans une nouvelle manière, Miguel Bonnefoy aura donné l’un des textes les plus percutants de cette rentrée, autant par l’atmosphère lourde, luxuriante, savoureuse de son livre puissant et charnel, que par une écriture virtuose, témoignant d’une énergie comparable au sujet qu’elle étreint.
Patrice Jean, L’Homme surnuméraire (Rue Fromentin)
Coup de maître pour le petit et excellent éditeur Rue Fromentin, et pour Patrice Jean, bien sûr, puisque le livre de ce dernier aura réussi à se faire une place de choix parmi la cohue de septembre. L’homme blanc, à l’heure de la modernité féministe et férocement progressiste, se retrouve à l’état « surnuméraire », dévalué par des femmes elles-mêmes bousillées par deux siècles de bovarysme. Jouissif et mordant.
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Alan Moore, Jérusalem (Inculte)
Avec ce pavé sur un simple quartier de Northampton, le scénariste de From Hell a su développer une littérature mélancolique et sophistiquée, bâtissant texte après texte une folle biographie géographique, comme un monument en hommage aux oubliés des mégapoles. Ésotérique, fascinant, grandiose – plus de 1200 pages qui nous rappellent que l’ambition est aujourd’hui davantage soutenue à l’étranger qu’au sein de l’édition parisienne.
Matthieu Jung, Le Triomphe de Thomas Zins (Anne Carrière)
Ce coup de maître de Matthieu Jung, plus grand roman d’amour de la décennie avec, en toile de fond, une restitution magistrale des années 80, n’aura pas rencontré l’écho qu’il méritait durant l’invraisemblable tohu-bohu de la rentrée (ses grands coups de cymbales ne dépendent guère de la qualité littéraire). Mais étant donné le bouleversement de ses lecteurs, on peut être certain que Le Triomphe de Thomas Zins aura sa revanche : une destinée mythique.
Slobodan Despot, Le Rayon bleu (Gallimard)
Après un premier roman très remarqué, Le Miel, Slobodan Despot aura réussi un deuxième petit livre impeccable et parabolique, sur le thème de la dissuasion nucléaire, cette fois-ci. Fluide, simple, mais suivant une narration extrêmement habile, l’écrivain helvéto-serbe et francophone nous aura fait glisser en plein cœur de questions vertigineuses avec une délicatesse diabolique. Une séduction qui vient de lui valoir le prix Casanova.
Marion Messina, Faux Départ (Le Dilettante)
Faux Départ pour une entrée fracassante en littérature : Marion Messina, jeune auteur houellebecquienne mais du genre enragé, aura donné en guise de présentation une petite bombe contre l’époque. Impitoyable, lucide et corrosive, elle aura pris pour cibles toutes les petites idoles qu’elle aurait été censée adorer pour s’intégrer dans la société des adultes du XXIe siècle. On s’en réjouit et on est impatient de la voir poursuivre le massacre.
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