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Pour s’élever, le chemin le plus court est de se mettre à l’ombre des grands hommes. Un temps honni, le général de Gaulle est devenu la figure tutélaire de toute la classe politique française. Une référence consensuelle invoquée par les hommes politiques en mal d’idées. Vous n’avez rien à dire ? La carte Charles de Gaulle fera office de joker pour se sortir d’un mauvais pas.
Il y a plusieurs catégories de Français. Les obsédés de l’Empereur Bonaparte, toujours prompts à dégainer une citation du grand homme ou à rappeler ses exploits militaires comme ses réussites civiles. Vous avez aussi les nostalgiques de la monarchie qui aiment narrer la cruauté avec laquelle Louis XVI fut traité. Plus à gauche, on le constate notamment à la France Insoumise, une certaine tradition jacobine aime à se trouver dans les pas de l’incorruptible Maximilien Robespierre. Autant de personnages qui incarnent des traditions politiques françaises ; des mémoires familiales et intimes.
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Plus récent, Charles de Gaulle a longtemps été l’homme d’un parti, le RPR. Son image fédérait les « gaullistes », suscitant de la répulsion dans une partie de la gauche comme une partie de la droite pour son rôle durant la Guerre d’Algérie. Aujourd’hui, à mesure que ceux qui ont vécu le gaullisme s’effacent, le général de Gaulle est de plus en plus incontournable. Au-delà de ce que l’homme était et a fait, il est le souvenir d’une époque plus prospère où la France indépendante pouvait encore s’asseoir à la table des grandes puissances sans trop rougir. Une période de félicité qui succédait à trente ans de guerre civile européenne, durant laquelle Charles de Gaulle fut tour à tour Cassandre, en dévoilant la mauvaise stratégie militaire française, puis Jeanne d’Arc en lançant l’appel du 18 juin 1940 demandant aux Français de résister jusqu’au bout à l’envahisseur nazi.
Charles de Gaulle serait-il gaulliste en 2020 ? Peut-être pas.
Mais n’est pas Charles de Gaulle qui veut. Pour l’être, il faut d’abord des circonstances exceptionnelles et une bonne dose de chance, celle qui accompagne les hommes de talent que le destin porte à la grandeur. Dans une époque trouble, jalonnée de crises qui révèlent chaque jour un peu plus l’ampleur du déclin national, l’ombre du général de Gaulle plane tel un spectre majestueux et indépassable. On se veut Charles de Gaulle, mais on n’est rien de plus que Xavier Bertrand, Jean-Luc Mélenchon ou Emmanuel Macron. Au moindre soubresaut, on va chercher dans le passé de quoi nous rassurer plutôt qu’inventer ce que sera la France de demain. Le « gaullisme » n’est pas une doctrine politique figée et poussiéreuse. Charles de Gaulle n’était pas un homme rigide.
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Il avait tout compris de son temps et l’avait clairement décrit dans son ouvrage Le Fil de l’Epée, puis dans ses mémoires où il démontre la justesse de ses analyses et ce qu’était sa praxis. Charles de Gaulle serait-il gaulliste en 2020 ? Peut-être pas. Il serait ce qu’il a toujours été : un chef d’Etat capable du meilleur comme du pire, animé par le souci de l’intérêt général des Français. À chaque crise, la classe politique redécouvre l’importance de la nation, de l’indépendance économique, d’une administration efficace. Les clins d’œil aux « start ups » et les considérations accessoires se font plus rares. Subsiste, dans le discours tout du moins, l’essentiel : la France. Il faut louer l’esprit du peuple français, ses vertus et ses forces. Une ambiance qui donne des ailes à tous ceux qui pensent avoir un « destin », comme les y invite la constitution de la Vème République, oubliant qu’elle avait été taillée à la mesure de Charles de Gaulle. Ils pourront toujours le convoquer en discours, ils ne seront malheureusement jamais lui.
Par Gabriel Robin