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“Lutte contre les Fake News”, une arme de répression intellectuelle massive

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Publié le

9 juin 2018

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La loi de lutte contre les « fausses informations » est un peu comme l’enfer, pavée de bonnes intentions. Fausse bonne idée pensée pour diminuer les risques d’ingérence étrangère lors des prochains scrutins, la loi voulue par Emmanuel Macron suscite de nombreuses réactions négatives des professionnels des médias et des associations défendant les libertés d’expression et d’opinion.

 

« On va se dire les choses, en vérité Russia Today et Sputnik ne se sont pas comportés comme des organes de presse et des journalistes mais comme des organes d’influence, de propagande et de propagande mensongère, ni plus ni moins », lançait Emmanuel Macron devant Vladimir Poutine lors d’une conférence de presse commune à Versailles, répondant à la question d’une journaliste russe qui s’étonnait du traitement subi par ses confrères durant la campagne présidentielle française. Puis, le Président ajoutait en suivant que « Quand des organes de presse répandent des contre-vérités infamantes, ce ne sont plus des journalistes, ce sont des organes d’influence ». Voilà qui avait le mérite d’être clair. Président sensible aux problématiques de la puissance, Emmanuel Macron a assimilé que les médias pouvaient être des éléments de souveraineté, des leviers d’influence capables d’agir directement sur les motivations des électeurs. Si ce jeu implique des Etats habitués à cet exercice, à l’image des Etats-Unis et de la Grande-Bretagne, des Etats renaissants comme la Russie et la Chine y ont désormais pleinement recours, mais aussi des petits Etats isolés qui n’avaient jamais expérimenté le « softpower », à l’image du petit Emirat qatari qui, pour rompre l’isolement qui l’afflige dans sa région, utilise le football ou le groupe Al-Jazeera peut communiquer à grande échelle et améliorer son image de marque.

Diffusées le vendredi précédant le vote du second tour, les fuites auraient peut-être pu bouleverser l’issue du scrutin en jetant la suspicion sur un candidat. L’Empire du bien a pourtant tendance à en surestimer l’importance, comme s’il cherchait à s’excuser du fait que les électeurs anglais aient choisi le Brexit en leur âme et conscience et que l’Amérique ait librement voté pour Donald Trump

Ainsi, les « MacronLeaks », constitués de quinze giga-octets de documents piratés (un crime selon la définition qu’en donne le Code Pénal), n’ont pas changé les grands équilibres électoraux, mais témoignaient d’une forte tension géopolitique et du nouveau pouvoir du WikiLeaks de Julian Assange, lanceur d’alerte devenu acteur politique transnational aux méthodes discutables. Une démocratie peut-elle accepter que l’ère de la transparence soit aussi celle du vol de données et du hacking ? Assurément pas. Diffusées le vendredi précédant le vote du second tour, les fuites auraient peut-être pu bouleverser l’issue du scrutin en jetant la suspicion sur un candidat. L’Empire du bien a pourtant tendance à en surestimer l’importance, comme s’il cherchait à s’excuser du fait que les électeurs anglais aient choisi le Brexit en leur âme et conscience et que l’Amérique ait librement voté pour Donald Trump. Ces votes n’ont pas été conditionnés par une désinformation orchestrée de l’extérieur. Ils sont le produit d’un essoufflement des démocraties libérales, dont la narration irénique commence à lasser les peuples. Reste que ces raisons officiellement avancées par l’Elysée et la majorité, y compris le traumatisme du Brexit, ont contribué à pousser Emmanuel Macron à agir, quitte à se précipiter.

 

A-La réponse par la répression :

 

Imaginée pour lutter contre la « désinformation en période électorale », ce phénomène qui aurait donc permis l’avènement des démocraties dites illibérales, la montée des formations « populistes » ou le Brexit, la loi relative à la lutte contre les « fausses nouvelles » est presque unanimement contestée par la classe politique et les acteurs de la vie médiatique. La première réaction est à mettre au crédit de Marine Le Pen qui, dans une tribune publiée sur Causeur, a dénoncé l’imprécision de la définition que donne la loi des « fausses nouvelles » ainsi que les procédures arbitraires prévues par la nouvelle législation. Seront considérées comme des « fausses informations », les allégations ou imputations d’un fait dépourvus « d’éléments vérifiables de nature à (les) rendre vraisemblables ». Si le potentiel liberticide de cette définition ne manquera pas de choquer, cette définition est par ailleurs si large qu’elle devrait donner des maux de crâne permanents aux juges chargés d’examiner les cas de « fausses informations » qui leur seront présentés. Ce péché originel de la loi ouvre la porte à des dérives d’une ampleur sans précédent. De nombreuses informations du Canard Enchainé ou de Mediapart diffusées lors des périodes de campagne électorale, pour citer deux journaux spécialisés dans les « scoops », pourraient notamment en subir les foudres. Imaginons, par exemple, que l’affaire des comptes offshore de Jérôme Cahuzac ait été révélée en période électorale ? Ce dernier aurait-il pu dénoncer une « fausse information » pour déclencher un contrefeu médiatique ? À l’Assemblée nationale, Françoise Nyssen a déclaré, en réponse aux questions relatives à Mediapart : « En aucun cas, les articles de presse professionnels ne seraient concernés. Je pense à un exemple régulièrement cité : l’article de Mediapart sur le financement libyen de Nicolas Sarkozy, qui constitue un travail d’enquête journalistique et non une manipulation orchestrée. (…) Si la loi avait été en place, il n’aurait aucunement été concerné ».

 

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Le gouvernement va-t-il donc labelliser des médias officiels qui auront, seuls, le droit d’informer ? Peut-on dire du magazine Closer qu’il est une meilleure source d’information qu’un blog tenu par un universitaire ? Quant à la question des « no news », soit ces informations tues, elle n’a jamais été abordée lors des débats en commission. Rappelons que pendant près d’une semaine, la terrible affaire des viols de Cologne du soir du réveillon 2016 commis par des migrants n’a pas été traitée par la grande presse allemande, et pis, que de nombreux commentateurs jugeaient qu’il s’agissait d’une « fausse information » propagée par les populistes. On pourrait d’ailleurs comparer la loi portée par la majorité à la démarche des Décodeurs du Monde, juge et partie des médias qui a classé ses confrères selon leur niveau de pertinence et de professionnalisme. Régulièrement, ces Décodeurs sont surnommés les « déconneurs », tant leurs analyses sont idéologiquement biaisées. De l’autre côté, l’outil imaginé par Libération appelé Check News n’est quasiment jamais critiqué. Pour une raison simple : Check News se contente de vérifier l’exactitude des informations que leur transmettent des internautes, sans préjuger de leur véracité en fonction de leur émetteur. Un système qui ressemble beaucoup plus à l’arsenal judiciaire actuellement en vigueur, qu’on peut décomposer comme suit : l’article 27 de la loi du 29 juillet 1881 qui réprime la diffusion de fausse nouvelle relevant du droit de la presse, l’article 97 du code électoral qui punit ceux qui « à l’aide de fausses nouvelles, bruits calomnieux ou autres manœuvres frauduleuses, auront surpris ou détourné des suffrages (…) », et la procédure de référé prévue à l’article 6 de la loi du 21 juin 2004 permettant de mettre un terme aux dommages résultant du contenu d’un service de communication au public en ligne. Autant de textes qui ont fait dire au Conseil d’Etat que « la lutte contre les fausses informations est une préoccupation ancienne et récurrente du législateur, à laquelle répondent déjà, quoique de façon éparse, de nombreuses dispositions »

Rappelons que pendant près d’une semaine, la terrible affaire des viols de Cologne du soir du réveillon 2016 commis par des migrants n’a pas été traitée par la grande presse allemande, et pis, que de nombreux commentateurs jugeaient qu’il s’agissait d’une « fausse information »

En février dernier, Françoise Nyssen affirmait pourtant sûre d’elle que l’objectif de la loi n’était certainement pas de définir ce que serait une « fausse nouvelle » ou une « fausse information ». Sous le vernis de la lutte légitime contre les contenus sponsorisés se cache une arme de répression politique, un outil de censure contre l’information non-officielle en période électorale. Le juge du tribunal de grande instance de Paris devra ainsi déterminer dans un délai ultra rapide si une information est fausse suite à un recours contre une « fausse information de nature à altérer la sincérité du scrutin à venir pour le cas où elle serait diffusée de manière à la fois massive et artificielle », y compris lors des référendums. En moins de 48 heures, il devra décider de l’opportunité du retrait du contenu incriminé, et pourra en outre déréférencer le site l’ayant propagé, mais aussi ordonner la désactivation des comptes l’ayant relayé sur les réseaux sociaux. Est-il bien raisonnable de confier pareille mission à des juges devenus de véritables censeurs, condamnant dès qu’ils le peuvent un Eric Zemmour pour délit d’opinion ou un Georges Bensoussan ? Et quid de ces candidats qui pourraient user et abuser de ce recours devant le juge des référés ? Plus préoccupant encore, sans aucun contrôle, le Conseil supérieur de l’Audiovisuel, dont le président est nommé par le président de la République, pourra suspendre la diffusion d’un média étranger. Personne ne niera que la propagande étrangère en période électorale soit intolérable, mais confier des pouvoirs de police administrative exorbitants à un organe comme le CSA est d’une extrême dangerosité. 

 

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Magnifique de sobriété et d’élégance, l’article 1 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse pose que « L’imprimerie et la librairie sont libres ». Sera-ce toujours le cas demain ? Face aux difficultés provoquées par les GAFAM, les députés s’en prennent uniquement à des fantômes. Qu’on se le dise, la question des « fake news » est d’abord liée au problème des « bulles filtrantes » générées par les réseaux sociaux (ex : Facebook et Twitter) et les moteurs de recherche (ex : Google), qui sont aujourd’hui des accès majeurs à l’information, notamment pour les jeunes générations. Par le passé, les plateformes étaient des intermédiaires neutres, de purs outils de recherche, dont l’utilité était similaire à celle des fiches dans les bibliothèques municipales. Pour des raisons principalement commerciales, ces pourvoyeurs de service se sont mis à « vouloir recommander ou mettre en avant des contacts mais aussi des contenus, en fonction d’algorithmes qui déterminent un profil psychologique et social de l’individu, basé sur une interprétation de son activité sur Internet, et de l’activité de ses propres contacts », ainsi que l’explique Guillaume Champeau. En résumé, nous sommes « enfermés » dans des bulles idéologiques par les algorithmes, car l’information relayée par nos contacts (personnes physiques et médias favoris) vient directement à nous, mais aussi l’information que nos contacts relaient. Nous avons donc tendance à moins questionner l’information, puisqu’elle provient de contacts de confiance, ce qui nous rend collectivement plus vulnérables aux fausses informations qui y sont parfois diffusées. Un phénomène régulièrement constatable sur Twitter, où un seul tweet de journaliste connu peut entrainer la propagation virale d’une fausse information, car nous croyons sur parole le prescripteur de part sa « légitimité » professionnelle, sa réputation, s’il indique être certain de son affirmation et avoir vérifié ses dires. Citons Judith Waintraub qui, peu après l’attentat de Trèbes, avait indiqué être absolument certaine que le terroriste islamiste avait acquis la nationalité française après sa majorité, alors qu’il avait été naturalisé lorsqu’il était mineur. Même BFM TV s’était laissé prendre au piège. Preuve que les grands médias eux-mêmes se font également avoir. Ces GAFAM ont une logique commerciale propre, mais sont curieusement épargnés par la loi. Et pour cause, ils seront chargés de faire la police ! Le ménage a déjà commencé sur Facebook, où, dernièrement, des comptes sociaux de militants de Génération Identitaire ont été désactivés sans raisons valables, à la plus grande joie du préfet Potier et de la DILCRAH.

 

B-La réponse par la rééducation

 

Si la répression sera très officiellement assurée par le juge du TGI de Paris, le CSA, et officieusement par les GAFAM, la rééducation sera directement prise en charge par le ministère de la Culture via les médias publics. Accompagnée par Delphine Ernotte (France Télévisions), Sibyle Veil (Radio France), Marie-Christine Saragosse (France Médis Monde), Véronique Cayla (Arte France), et le mâle blanc de plus de 50 ans survivant Yves Bigot (TV5 Monde), Françoise Nyssen a démontré que la loi relative à la lutte contre les fausses nouvelles s’inscrivait dans un projet plus large, visant à définir le monde tel que les bobos voudraient qu’il soit bien plus que tel qu’il est réellement. Elle a fixé comme objectif que l’audiovisuel public soit le « miroir de nos différences », tout en fustigeant durement ces Français « hautement réactionnaires » qui ne voudraient pas « changer de mentalité », avant d’ajouter « Delphine tu n’es plus seule », en référence aux propos polémiques de madame Ernotte qui aimerait virer les « mâles blancs de plus de 50 ans » pour les remplacer par des représentants de diverses minorités, des femmes bien sûr, mais aussi des maghrébins, des personnes originaires d’Afrique noire ou des individus homosexuels (qui, comme chacun le sait, sont ultra minoritaires dans le monde politique, médiatique ou le spectacle…).

 

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Attendez-vous donc à trouver sur les chaines du groupe France Télévisions des rois normands africains ou des Achille originaires du Sri-Lanka, à l’image des productions de la BBC, en pointe dans le combat marxiste culturel, ou freudo-marxiste comme d’aucuns préfèrent le dire. L’idée est très simple, classique dans les régimes totalitaires : éduquer le peuple pour qu’il pense mieux. On ne lui fait plus confiance pour juger, en période électorale, de la véracité d’une information ou de la qualité d’une source, pourquoi donc le laisserait-on penser librement ? Aux Etats-Unis, des censeurs relisent déjà les livres avant parution, de manière à éviter que certains propos ne heurtent. Ces « contrôleurs de sensibilité », néo-puritains d’une société de moins en moins libertaire, se recrutent dans les universités et sont chèrement payés pour que les romans soient strictement politiquement corrects. En sus des habituels procès en racisme, anti judaïsme, homophobie ou misogynie, il faut désormais veiller à ne pas être « handicapophobe », « grossophobe », « psyphobe » ou « véganophobe ». Cette restriction constante du domaine de la liberté me semble autrement plus préoccupante que trois fausses informations diffusées sur des blogs complotistes.À vous de juger…

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