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Les réseaux sociaux ouverts sont-ils morts ? Le cas Twitter en question.

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Publié le

22 décembre 2017

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Twitter

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Au mois de novembre dernier, le réseau social Twitter faisait part de sa volonté de se doter de toutes nouvelles règles d’utilisation, plus répressives contre les comptes «haineux », donnant ainsi satisfaction à certaines associations, utilisateurs ou Etats qui réclamaient un contrôle renforcé. La nouvelle charte de Twitter, entrée en vigueur le 18 décembre, a déjà fait ses premières victimes. Elle changera profondément la philosophie d’un réseau longtemps ouvert.

 

Jusqu’au 18 décembre 2017, les utilisateurs eux-mêmes avaient la main sur le contenu, Twiter déléguant alors à ses membres le signalement des comptes qui ne respectaient pas les conditions générales d’utilisation, afin d’éliminer les comptes menaçants, diffusant des contenus violents ou dangereux, les comptes usurpant une identité, les comptes d’arnaqueurs ou encore les comptes pratiquant le harcèlement. Désormais, Twitter peut  sanctionner directement des utilisateurs. Une transformation majeure qui faisait dire à Arthur Messaud de la Quadrature du Net, interrogé par 20 Minutes « Twitter régule le débat public et les débats qui s’expriment sur sa plate-forme. Les Etats veulent que Twitter – et d’autres – jouent le rôle de la police. Ces entreprises privées acceptent de plus en plus ce rôle car ça les légitime dans le débat public, ça montre qu’ils ne sont plus seulement des acteurs économiques mais aussi politiques »

 

 Une porte ouverte à une véritable censure politique.

 

La firme de San Francisco a ajouté à ses règles initiales une section intitulée « Politique en matière de conduite haineuse », détaillant les motifs pouvant conduire à une suspension de compte. Cela signifie très concrètement qu’un utilisateur ne doit pas « directement attaquer ni menacer d’autres personnes, ni inciter à la violence envers elles » en se fondant « sur la race, l’origine ethnique, la nationalité, l’orientation sexuelle, le sexe, l’identité sexuelle, l’appartenance religieuse, l’âge, le handicap ou la maladie ». Des obligations qui s’appliquent pareillement à une catégorie d’utilisateurs plus nébuleuse, dont les comptes auraient pour « but principal (…) d’inciter à nuire aux autres sur la base de ces catégories ». Le texte donne quelques exemples de comportements intolérables, parmi lesquels les menaces violentes ou les souhaits de blessures visant des personnes ou des groupes, ce qui est parfaitement compréhensible, mais aussi « les comportements incitant à la peur d’un groupe protégé » et  « les insultes, qualificatifs et clichés racistes et sexistes, répétés et/ou sans consentement de la part de la personne visée, ou tout autre contenu dégradant une personne ».

 

Les définitions sont larges, laissant la porte ouverte à une véritable censure politique. Car, en 2017, l’incitation à la peur d’un « groupe protégé » peut être entendue d’une manière très étendue, voire liberticide. L’ensemble est complété par un sous-chapitre de la charte relatif aux « groupes extrémistes violents », demandant aux utilisateurs de ne pas « s’associer à des organisations qui utilisent la violence envers des civils au service de leurs causes ou encouragent une telle violence, et ceci par leurs propres déclarations ou activités sur la plateforme comme en dehors ». En s’en tenant à la lettre du texte, on pourrait donc parfaitement imaginer qu’un twitto ayant pour image de profil un sigle d’un groupe « antifa » soit immédiatement suspendu et banni du réseau.

La censure est une arme médiocre qui ne fera que renforcer les tendances paranoïaques de ceux qui la subissent.

La première « purge » a eu lieu dans la nuit du dimanche 18 décembre au lundi 19 décembre, visant uniquement des comptes de « l’alt-right » étatsunienne et des membres de Britain First (parti britannique issu d’une scission du British National Party), à l’image de Jayda Fransen rendue mondialement célèbre après que Donald Trump a relayé trois de ses tweets. Une notoriété qui l’a certainement placée dans l’œil du cyclone. Un peu plus tard, c’est le compte de Génération Identitaire qui a été suspendu, non pas en raison des tweets qu’il diffuse, mais en raison de l’objet de ses activités IRL. Un glissement inquiétant, déjà dénoncé par Andrew Torba, fondateur de Gab, en novembre sur le site Mashable : « Des règles comme celles-ci vont renforcer les convictions de ces dissidents qui pensent qu’ils sont réduits au silence parce qu’ils disent la “vérité” »

 

 

 Un sanctuaire du pluralisme

 

En outre, les comptes ciblés appartiennent tous à une mouvance proche, régulièrement visée par l’Anti Defamation League qui a collaboré avec Twitter à l’élaboration des nouvelles règles d’utilisation. Le groupe s’était signalé durant l’élection présidentielle américaine après avoir rangé le mème internet « Pepe The Frog », haï par Hillary Clinton, dans les symboles de haine. S’il ne semble pas délirant qu’un compte officiellement rattaché à un gang de prison ultra violent comme l’Aryan brotherhood ou à une organisation terroriste comme Al Qaeda soit exclu de Twitter, la censure politique est plus vite atteinte qu’on ne le croit. En interdisant Génération Identitaire, Twitter se tire une balle dans le pied. Demain, Twitter devra tout interdire, y compris les comptes de mouvements qui pourraient être favorablement considérés par l’Anti Defamation League. Black Lives Matters se rend responsable d’une émeute ? Suspension de son compte et suspensions des comptes qui affichent une sympathie pour le groupe. Etc. Cela sera sans fin.

 

Lire aussi : Les rebondissements de l’affaire des « cinq de Poitiers »

 

La force des réseaux sociaux est leur ouverture. Contrairement aux médias traditionnels, les réseaux sociaux fonctionnent horizontalement et non verticalement, permettant à des intervenants de se faire rapidement connaître, de diffuser des idées marginales à la télévision et dans la presse écrite. Cet équilibre précaire tient grâce à l’idée de la neutralité du net, sanctuaire inviolable du pluralisme, d’inspiration presque libertaire (au sens noble du terme). Je ne suis pas d’accord avec l’ultra majorité des activistes de l’ultragauche, mais je loue les réseaux sociaux qui m’offrent la possibilité de prendre le pouls des nouvelles radicalités, sans filtre et sans intermédiaires. La censure est une arme médiocre qui ne fera que renforcer les tendances paranoïaques de ceux qui la subissent. Faisons confiance à l’intelligence des utilisateurs, à leur sagesse. Rien ne remplacera l’éducation et la distance critique d’une personnalité formée.

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