Dans l’arène saturée du cinéma français contemporain, où la quête du consensus prime souvent sur l’audace artistique, Mercato de Jamel Debbouze s’annonçait comme une incursion prometteuse dans les méandres du football professionnel. Le film ambitionnait de dévoiler les rouages impitoyables des transferts de joueurs, tout en offrant une critique acerbe du mercantilisme dévorant ce sport autrefois noble mais en passe de racaillisation.
Hélas, cette promesse se dilue rapidement dans une narration convenue, où la satire attendue cède le pas à une comédie dramatique trop lisse pour marquer durablement les esprits.
Le postulat initial, centré sur Driss, un agent de joueurs en perte de vitesse interprété par Jamel Debbouze, laissait entrevoir une exploration profonde des enjeux et des compromissions inhérentes au milieu du football. Confronté à des dettes colossales envers des créanciers peu scrupuleux, Driss dispose de sept jours, le temps imparti avant la clôture du mercato, pour orchestrer un transfert salvateur. Cette course contre la montre aurait pu être le terreau fertile d’un thriller haletant, mais le récit s’enlise dans des péripéties prévisibles et des clichés éculés, peinant à transcender les stéréotypes.
Les choix esthétiques, oscillant entre une photographie aseptisée et un montage sans audace, confèrent à l’ensemble une allure télévisuelle qui dessert le propos.
Là où l’on espérait une dénonciation incisive des dérives financières et éthiques gangrenant le football moderne, Mercato se contente d’effleurer son sujet. Les tractations en coulisses, les manipulations des agents, la marchandisation des joueurs réduits à de simples actifs financiers : autant de thèmes potentiellement subversifs qui ne sont qu’esquissés, sans jamais être véritablement approfondis. Ce qui neutralise toute portée critique.
La réalisation de Tristan Séguéla manque cruellement de personnalité. Les choix esthétiques, oscillant entre une photographie aseptisée et un montage sans audace, confèrent à l’ensemble une allure télévisuelle qui dessert le propos. Les séquences censées retranscrire la tension inhérente aux négociations de transferts manquent de dynamisme, et l’absence de prise de risque formelle laisse le spectateur sur sa faim.
Une occasion manquée
Jamel Debbouze, s’aventurant dans un registre plus sombre qu’à l’accoutumée, livre une prestation honnête mais sans éclat. Son interprétation de Driss manque de nuances, oscillant entre le désespoir et la détermination sans jamais véritablement convaincre. Avec ses « frère », ponctuant chacune de ses phrases, on retrouve l’humoriste de Trappes qui ne fait plus rire.
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Les seconds rôles, bien que portés par des acteurs talentueux tels que Monia Chokri ou Hakim Jemili, sont cantonnés à des archétypes sans profondeur, ne permettant pas de véritablement s’attacher à leurs trajectoires.
En définitive, Mercato échoue à s’imposer comme la fresque ambitieuse qu’il prétend être. Dans un paysage cinématographique où la complaisance tient trop souvent lieu de ligne directrice, Mercato s’inscrit malheureusement dans la lignée de ces œuvres qui préfèrent caresser le public dans le sens du poil plutôt que de le confronter à une réalité dérangeante.
Mercato (1h50), de Tristan Séguéla avec Jamel Debbouze. En salles.





