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Un raté de légende

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Publié le

6 mai 2020

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La cinquième saison du bureau des légendes, potentiellement la dernière, s’est achevée. Son réalisateur historique Éric Rochant a laissé sa place à Jacques Audiard pour deux derniers épisodes, pour le moins controversés.

 

Dire que la cinquième saison du Bureau des Légendes était attendue relève de l’euphémisme. Série mythique, parmi les meilleures qu’a pu produire l’hexagone ces dernières années, Le Bureau des Légendes occupe une place à part dans le paysage télévisuel français. Symbole de réussite, l’œuvre d’Éric Rochant est l’antithèse de Strikeforce ou de Jack Ryan, montrant le monde des espions d’une manière plus intime sans toutefois oublier l’action comme le suspense. Le raté majeur du finale réalisé par Jacques Audiard constitue donc une grande déception pour les fidèles.

 

 

 
Comment flinguer une série en deux épisodes ? Demandez à la production et à Jacques Audiard qui signe la conclusion du Bureau des Légendes. Probablement plus ratés encore que le point final de Game Of Thrones [ Cet avis personnel n’engage pas la rédaction ], ces épisodes 9 et 10 de la saison 5 du Bureau des Légendes ont faux sur toute la ligne. Ils achèvent de la pire des façons une cinquième saison plus poussive que les précédentes qui a fait la part belle à des arcs narratifs décousus et mal pensés, maltraitant constamment ses personnages comme le téléspectateur.

Les scénaristes tenaient pourtant une idée en or avec le duel d’échec opposant les deux impitoyables stratèges français et russe : JJA et Mikhail Karlov. Au centre du jeu, ces deux cerveaux usés par le poids des années auraient pu être bien mieux exploités … et exploiter les autres personnages comme autant de pions au service de leurs vengeances personnelles respectives. Pourtant, JJA (bien interprété par Matthieu Almaric) disparaît purement et simplement dans les deux derniers épisodes. Où est-il ? Soigné dans un hôpital psychiatrique ? Il n’est d’ailleurs pas le seul personnage important à ne pas être vu dans ces deux épisodes, le hacker contre-espion Sylvain Ellenstein étant lui aussi porté disparu après son exfiltration du Cambodge.

 

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Jacques Audiard avait-il déjà regardé la série avant d’accepter d’en signer ces deux épisodes importantissimes ? Il semble ne pas connaître les personnages, le lore et le ton de l’œuvre. Bon filmeur, il se sert du scénario comme d’un véhicule pour démontrer sa virtuosité de metteur en scène plutôt que de servir l’histoire. Histoire à laquelle il ajoute quelques obsessions personnelles sur fond de délires mystico-lourdauds, à l’image de l’amitié virile unissant Malotru à son geôlier coach de vie psychanalyste quand il est de retour de Russie…  Un petit arc supplémentaire en espace confiné – la maison de planque étant assimilée à une prison comme dans le film Le Prophète – qui n’apporte rien au récit principal.

Alors qu’on était en droit d’attendre un testament dantesque et grandiose, Audiard et l’équipe du Bureau des Légendes nous livrent deux épisodes de remplissage. Des personnages sont ignorés, d’autres effacés sans raison quand ils ne sont pas engoncés dans des romances qui auraient tout à fait eu leur place en début de saison, mais aucunement pour l’achever. Mille-sabords, superbement joué par un surprenant Louis Garrel, est pareillement absent. Ces oublis auraient pu se justifier si une nouvelle saison était attendue, laissant de l’espace aux futurs scénaristes. Il s’agissait pourtant ici de résoudre toutes les énigmes et toutes les histoires qui composaient ce grand récit choral d’espionnage.

 

Alors qu’on était en droit d’attendre un testament dantesque et grandiose, Audiard et l’équipe du Bureau des Légendes nous livrent deux épisodes de remplissage. Des personnages sont ignorés, d’autres effacés sans raison quand ils ne sont pas engoncés dans des romances qui auraient tout à fait eu leur place en début de saison, mais aucunement pour l’achever.

 

Rien ne nous est d’ailleurs épargné, jusqu’à la chanson de Tom Wais « plus cliché tu meurs » qui illustre la dernière scène ou aux planqués russes regardant Top Chef avec leurs plateaux repas (une adaptation express à la vie de confinés français !)… Tout ce pathos boursouflé et souligné à gros traits nuit à l’émotion véritable. Une tendance perceptible lors de la saison 4 et de la saison 5 avec le traitement de Malotru –  devenu geignard et tête à claques -, qui s’accentue lourdement sous l’influence d’Audiard. Le spectateur se détache donc des personnages, espérant même la mort de certains d’entre eux pour en finir avec ce supplice. Un comble et un paradoxe. Que Canal retienne la leçon : les séries ne sont pas du cinéma.

 

Par Gabriel Robin

 
 
 
 

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