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Pour tenter de remporter l’Oscar du meilleur film étranger, l’Italie a opté pour A’Ciambra de Jonas Carigliano. Avec ce film sur la précarité et la dureté du monde gitan de Calabre, peu de chance que le jury américain souffre du syndrome de Stendhal.
L’association des cinéastes italiens a choisi d’exposer à Hollywood un des pires traits qui puisse caractériser la Calabre. La micro criminalité de la communauté rom résidant dans la ville de Gioia Tauro, en province de Reggio Calabria, n’est désormais plus un secret pour le public d’experts américains. Sans vouloir dévoiler le récit, le film raconte les péripéties d’un jeune tzigane qui entreprend les étapes nécessaires pour être considéré comme un homme à part entière par sa communauté. L’abandon cynique et cruel de l’innocence et du monde des enfants pour passer à l’âge adulte – rite d’initiation typique, dans un environnement très dur : un village où les maisons sont insalubres, les enfants déscolarisés et où la totalité de la communauté vit de racket et de vol de voitures.
Cela, hélas, n’est pas de la fiction ou le fruit de l’imagination du metteur en scène. Les Calabrais de la plaine de Gioia Tauro endurent en effet avec angoisse cette coexistence avec les gitans de la Ciambra. Il s’agit pourtant d’une communauté présente sur le territoire de longue date, et dont les membres communiquent exclusivement en patois calabrais, avec un accent qui leur est propre (le film est d’ailleurs sous-titré en italien, et il faut une très bonne maîtrise du dialecte local pour pouvoir saisir les nuances). Hélas, l’intégration à la modernité de cette communauté a échoué et les problèmes, non seulement persistent, mais empirent avec le temps. Les « zingari », comme les appellent les habitants des communes limitrophes, étaient par le passé spécialisés dans le dressage de chevaux et le commerce d’outils pour la cuisine. Mais n’ayant su évoluer avec le reste de la société, les voilà désormais en affaires avec la mafia locale, la ‘ndrangheta, pour laquelle il joue un rôle de gros bras à bas coût. Ils cambriolent les maisons d’une manière qui n’appartient qu’à eux : exhaustive. Après leur passage, les victimes se retrouvent même dépouillés des interrupteurs, des plinthes et de leurs sanitaires.
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Certes, les maux qui hantent cette région du Sud de l’Italie, sauvage et splendide, sont nombreux et divers, mais la criminalité organisée est clairement la plaie essentielle, celle qui empêche le développement économique et social de la Calabre. La mauvaise administration bureaucratique et politique génère des services pitoyables en termes de santé publique, de qualité de l’enseignement et de respect de la loi. Il n’y a pas de mal à vouloir montrer avec une réalité crue les modes de vie de ces tziganes calabrais, d’autant que l’histoire du film est vraisemblable et que le metteur en scène n’arrondit guère les angles. À certains moments, cependant il vient rechercher la compassion du spectateur. Mais ce chantage émotionnel n’est-il pas un piège ? Au fond, si cette communauté vit dans la détresse, c’est bien de sa pleine responsabilité. Personne n’empêche à ses enfants de fréquenter l’école, la paroisse ou les autres lieux de divertissement de la jeunesse calabraise. Mêmes les carabinieri, les gendarmes italiens, se sont proposés d’accompagner les enfants à l’école : la communauté s’y est opposée ! Quant aux adultes, personne ne leur interdit d’aller travailler comme ouvriers au port ou dans la récolte d’oranges à Rosarno, un village des environs. Les maisons dans lesquelles ils logent, qui furent construites expressément pour eux par les institutions, ce sont eux-mêmes qui les saccagent, arrachant fenêtres et balustrades pour les revendre.
Les Italiens détestent les préjugés par lesquels on les caractérise, pourtant, le cinéma italien a su jouer sur ces stéréotypes pour valoriser ce pays et son peuple. L’image d’hommes amoureux qui parlent fort et de méditerranéennes à la beauté décadente plaît au public américain. C’est de cette façon que les Italiens pourraient remporter à nouveau l’Oscar, à la suite de Roberto Benigni et sa Vita è bella ou Paolo Sorrentino avec La Grande Bellezza. Plutôt que sur les Gitans, parions sur la Dolce Vita.
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