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Lettre ouverte d’une étudiante au Premier ministre

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Publié le

12 novembre 2020

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Une étudiante de Chazelles-sur-Lyon, dans la Loire, adresse une lettre ouverte au Premier ministre où elle exprime avec poigne la frustration de toute une jeunesse dont on brise l’élan vital par un confinement à l’efficacité contestable. L’Incorrect ouvre ses colonnes à cette parole représentative d’une part inaudible de l’opinion, sans qu’elle ne reflète nécessairement le point de vue de la rédaction.

Monsieur le Premier ministre,

« C’est dur d’avoir 20 ans en 2020. Donc je ne donnerai jamais de leçon à nos jeunes. »

Ces mots du président de notre République tombent : non seulement il est dur d’avoir 20 ans en ces temps mais en plus, plus aucune leçon ne nous sera donnée. La fontaine de jouvence n’est plus vertueuse, malédiction à quiconque s’en approche ! La jeunesse n’est plus, elle a été détruite en quelques décisions dictées par l’état de crise. Le constat mondial est terrible : dans les Yvelines, un professeur est décapité par un garçon de 18 ans, à Nice un Tunisien de 21 ans assassine trois catholiques. A Vienne on dénombre au moins quatre morts lors d’un attentat : l’auteur a 20 ans. Alors que Charles Aznavour regrettait jadis cet âge, il nous tarde aujourd’hui de devenir vieux, pour qu’au moins le monde se mette en berne sous prétexte de nous protéger.

C’est de ma chambre que je suis contrainte de vous écrire, car il ne m’est donné à l’heure actuelle aucune autre possibilité pour parler. Je suis pourtant jeune et de cette « génération rajeunie que le souffle de vie tourmente et pousse en tous sens » que loue Lamartine. Mais c’est bel et bien de ma chambre que je vous écris. Une pièce qui est devenue pour mes, dit-on, belles années, mon université, mon lieu de sortie, l’endroit où je rencontre virtuellement mes amis, celui où je rêve, je voyage, je travaille, et où je pense.

C’est bel et bien de ma chambre que je vous écris. Une pièce qui est devenue pour mes, dit-on, belles années, mon université, mon lieu de sortie, l’endroit où je rencontre virtuellement mes amis, celui où je rêve, je voyage, je travaille, et où je pense.

Qu’il serait beau de réfléchir comme cela, d’arriver sur son lit de mort et de pouvoir dire que l’on a fait, que l’on a vécu. Mais c’est faux, c’est faux en effet parce que nous ne pouvons pas vivre notre jeunesse, elle nous est retirée, contre notre gré et nous ne pouvons protester sans risquer de passer pour des assassins égoïstes, ne réfléchissant pas aux conséquences de leurs actes sur la nation dans laquelle ils vivent.

Mais quelles conséquences ? et quelle nation ?

Nous sommes l’avenir du monde. Votre devoir est de nous enseigner, et le nôtre d’apprendre à penser, d’apprendre l’histoire de notre pays, d’apprendre les rencontres véritables… d’apprendre pour vivre afin de pouvoir construire une nation pérenne. Mais comment faire puisque tout nous est retiré ? Les formations que nous choisissons sont fermées et les cours seulement maintenus à distance. Nous n’avons plus le droit de sortir pour autre chose que le nécessaire. Nos ambitions limitées, nous ne pouvons choisir à l’heure des grandes orientations de l’existence.

Je suis révoltée, monsieur, et c’est pourquoi je vous écris. Quelle injustice alors, que nous qui sommes jeunes, vigoureux, au bel âge de la vie, nous nous retrouvions les seuls confinés chez nous. Où est la logique ? Nous avons soif de vivre, de connaître. Donnez-nous de quoi étancher ces désirs ! En ces temps de crise bien réelle, il est plus que jamais important de penser au futur, d’espérer en l’avenir. Pour cela il est nécessaire d’avoir des adultes réfléchis.

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Vous déplorez un manque de personnel dans les hôpitaux ? Invitez les jeunes à s’engager. Vous déplorez les clusters dus aux soirées étudiantes ? Laissez-nous nous rencontrer pour étudier et réfléchir ensemble. Vous prenez ces décisions pour protéger les générations plus âgées qui sont les plus touchées par le virus ? A la bonne heure, mais quelle place pour notre génération ?

La décision du confinement qui a été décidée au printemps dernier avait déjà beaucoup impacté lasanté mentale des français, notamment celle des étudiants. Pourtant le même schéma se reproduit aujourd’hui. Les dégâts constatés sont terribles : un jeune sur deux avoue décrocher de ses études, un certain nombre est enfermé dans moins de 20 m2, la situation est difficilement tenable financièrement pour beaucoup d’autres et je ne parle pas des dommages sur la santé mentale ou des conséquences qui ne manqueront pas de surgir.

Un jeune sur deux avoue décrocher de ses études, un certain nombre est enfermé dans moins de 20 m2, la situation est difficilement tenable financièrement pour beaucoup d’autres

Certes l’urgence de la situation exige des concessions, mais priver de liberté inconditionnellement les étudiants est injuste.

Monsieur Macron nous parlait au printemps dernier d’une guerre : nous en sommes les prisonniers, sans même avoir pu lutter. Comment avoir foi en une république qui ferme les bancs de ses facultés, comment avoir foi si nos représentants se méfient de nous ? La jeunesse c’est la force de la vie, à quoi bon la confiner ?

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Monsieur, ayez confiance en nous. Laissez-nous réfléchir avec vous aux besoins du monde, laissez-nous nous former convenablement dans les divers cursus que nous avons choisis, pour apporter au monde, à notre pays, ce dont nous sommes capables. Donnez-nous confiance en nous, car c’est nous qui, ne quittons jamais Lamartine, « reconstruirons sur des plans inconnus cette œuvre infini que Dieu a donné à faire et à refaire sans cesse à l’homme, sa propre destinée ».

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