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Cette tribune a été rédigée avant la décision de la Cour d’appel de Paris du 20 mai 2019. Celle-ci, dans son arrêt rendu dans la soirée alors que des opposants à la mise à mort étaient réunis en bas des Champs-Elysées, a ordonné à titre provisoire que Monsieur Vincent Lambert soit de nouveau alimenté et hydraté – ces fameux et uniques « soins » dont on nous parle comme s’il s’agissait d’une médication, et que le CHU de Reims avait arrêtés le jour même.
Ceci est un sursis pour six mois, le temps que le comité de l’ONU étudie le dossier. Une simple victoire, qui ne fera qu’exciter davantage le lobby de l’euthanasie qui écrase Vincent Lambert de tout son poids, divise sa famille et jusqu’à la société française.
J’ai tué mille innocents sans quitter mon fauteuil, par la seule force de mon inertie.
Telle pourrait être la devise de notre génération. La barbarie a besoin que nous continuions à faire ce que nous faisons de mieux : rien. Voter pour le « moins pire » tous les cinq ans, débattre avec des gens qui sont d’accord avec nous, nous écharper par clavier interposé avec « ceux d’en face ». Nous émouvoir ponctuellement du sacrifice de quelques héros qui nous rappellent, sans pour autant que cette idée absurde n’ébranle nos convictions, qu’il est des causes pour lesquelles on peut choisir de donner sa vie. Et que Vincent Lambert n’a pas fait ce choix.
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L’euthanasie. Surprenante idée, à l’heure où les GAFAM investissent des milliards pour prolonger indéfiniment la vie de quelques milliardaires. Pas la vôtre. Vous pensez que vous goûterez, vous aussi, aux joies du transhumanisme ? Avec quel argent ? Vous pensez que, dans l’avenir promis, les machines travailleront pour vous, que vous jouirez d’un revenu universel, d’un loisir universel ? Payé par qui ? Qui croit sincèrement que ceux qui pratiquent aujourd’hui l’évasion fiscale, paieront demain pour un tel niveau d’assistanat ? Notre destin ne se joue pas dans la Silicon Valley, il s’est dessiné sans notre consentement, hier, pour nous, par ceux qui veulent aujourd’hui euthanasier Vincent Lambert. Sans vous.
Notre responsabilité collective commence là : ne pas savoir. Ne pas vouloir savoir. Pour ne pas être forcés d’agir.
Dimanche 19 mai 2019, 15 heures, au 34, rue de Sébastopol à Reims. La foule de 200 personnes, réunies pour qu’un polyhandicapé ne soit pas livré à une mort atroce, entame sa marche vers l’entrée de l’hôpital. Nous sommes peu, et c’est logique. Car vous n’étiez pas informé de l’événement, ni de ce qui arrive réellement à Vincent Lambert. Tout cela est très passif. Si confortable. A la forme active, le confort disparaît, la bonne conscience aussi : vous ne vous êtes pas informé. Vous avez refusé. Notre responsabilité collective commence là : ne pas savoir. Ne pas vouloir savoir. Pour ne pas être forcés d’agir.
Avec nous, sous la pluie, présents physiquement, une vingtaine de journalistes, trois ou quatre policiers en civil, d’autres en uniforme gardant le CHU. Face à nous, absents physiquement mais présents « moralement », des « progressistes », des hédonistes et des lobbyistes, tenants de cette idéologie qui veut l’Homme plus qu’un dieu, mais en fait moins qu’une bête. Aucun de ces « pro-mort » n’a daigné se montrer, comme aucun n’accepterait d’injecter de sa main une dose létale à Vincent Lambert. Loin de nous enfin, absents physiquement et surtout moralement, des millions d’indifférents.
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La pluie s’arrête, le gris demeure, un oiseau chante. David Philippon, demi-frère de Vincent Lambert, se hisse sur le muret qui borde l’hôpital. Il interpelle le Président Macron, les ministères et « tous ceux qui ont un pouvoir quelconque, pour faire arrêter cette barbarie ». Nous tous.
Ce n’est pas Saint Augustin d’Hippone. Ce n’est pas Rome en flammes, et lui ne vient pas nous rassurer. Mais les barbares sont bien là. Pas montés sur des chevaux de guerre comme Alaric en 410 : dissimulés dans l’immense cheval de Troie qu’est leur vision de la « dignité humaine ».
Celle dont ils parlent tant sans jamais la définir. David tremble : « On vous ment, on vous ment en permanence ».
Vincent Lambert n’a jamais exprimé sa volonté de mourir.
On vous ment, oui. Vincent Lambert n’est ni dans le coma, ni en fin de vie : il est en état pauci-relationnel, état dont les neurologues indiquent qu’il peut s’améliorer grâce à une rééducation dont il est privé depuis 2013, malgré les dispositions de la circulaire du 3 mai 2002 qui donne droit, pour ce type de cas, à l’accès à une unité spécialisée (il est en unité de soins palliatifs, bien qu’il ne souffre d’aucune maladie ni pathologie mortelle), des séances de kiné, d’orthophonie, des sorties en famille et une mise en fauteuil. Pour s’assurer que rien ne lui sera donné, on interdit son transfert dans l’un des hôpitaux qui a proposé de l’accueillir. Magnifique leçon de dignité.
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Mais il est enfermé à clé, sans aucun de ces soins, sous surveillance policière. Ses proches – ceux qui s’occupent de lui, sont soumis à un agenda de visite encadré et contrôlé. Vincent réagit, essaie parfois de parler, bouge les yeux. Pleure lorsqu’il apprend quel sera son sort.
Vincent Lambert n’a jamais exprimé sa volonté de mourir. En 2013, le Dr Kariger a interdit de l’alimenter : il a tenu 31 jours, jusqu’à ce que le Tribunal Administratif ordonne la reprise de son alimentation. Pourquoi ne s’est-il pas laissé aller ? Pourquoi s’est-il tant accroché ? Il mange les compotes que lui donne sa mère avec une cuiller. Pourquoi ne les refuse-t-il pas ? N’y-a-t-il pas là le combat d’un homme qui refuse de mourir ?
Avec Vincent Lambert, il sera désormais légal de tuer une personne qui n’est pas en fin de vie, ni traitée par voie médicamenteuse et sans son consentement exprès. La première euthanasie légale est donc un homicide.
Vincent Lambert n’est pas maintenu artificiellement en vie, ni « branché » à rien, ne reçoit aucun traitement médicamenteux. Il est nourri par gastrostomie : l’alimentation est versée directement dans son estomac. A telle enseigne que son état permettrait même un maintien à domicile, indique le Docteur Xavier Ducrocq, neurologue, qui a remplacé David Philippon sur le muret. Voilà le « traitement » dont on ordonne l’arrêt.
Vincent Lambert est-il en maintien artificiel de la vie, parce qu’il est nourri artificiellement ? « Est-ce différent d’un nouveau-né (…) nourri avec du lait artificiel, par un biberon ? » demande le Docteur Ducrocq. « On est au même niveau d’artifice ! »
Avec Vincent Lambert, il sera désormais légal de tuer une personne qui n’est pas en fin de vie, ni traitée par voie médicamenteuse et sans son consentement exprès. La première euthanasie légale est donc un homicide.
Alors, pourquoi ?
« Parce que c’est notre projet. »
Voilà bien longtemps que certains souhaitent légaliser l’euthanasie en France. Réformer la Loi Léonetti, avant, c’était inenvisageable : un million de manifestants dans la rue.
Comment faire ? On dira simplement, « plus jamais ça ». Comme d’habitude. Ceux qui ont refusé à Vincent Lambert toute forme de soin, kiné, sorties, alimentation normale depuis 2013, bafouant ainsi sa dignité, présenteront sa lente agonie, invoqueront cette même dignité pour réclamer d’urgence la légalisation de l’euthanasie.
Le temps est venu de dire ce qui nous permet de rester humains, de définir notre dignité. L’indifférence et la résignation entrent dans nos âmes par le biais du confort moral.
« Pour quelques cas désespérés » bien sûr. Puis, par ce mécanisme désormais bien connu de conquête des droits progressive (progressiste ?), par petites touches et devant le fait accompli, tout finira par y passer. Dans ce genre de conquête, on incline très doucement la pente, pour que les citoyens croient avancer sur du plat. On anesthésie un peuple pour mieux en euthanasier les membres.
Ils ont besoin qu’il meure, et mal. Ils auront leur réforme, et vous ne direz rien.
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La première victime est connue. Les suivantes ? Les 1500 personnes dans son cas. Demain.
Et après-demain, ceux que leurs héritiers condamnent, ceux qui se croient désespérés, et puis, un jour… ces gens dans les EHPAD qui n’ont plus les moyens, tous ceux qui coûtent cher à la société et dont la vie vaut moins que leurs profits, ces retraités qui s’accumulent, dont on ne peut payer les retraites, et puis, tiens : les inutiles, les assistés… Et puis vous, et moi. En état de faiblesse. Face à un comité anonyme, qui décidera contre votre famille que votre dignité à vous, c’est de monter sur l’échafaud.
Le temps est venu de dire ce qui nous permet de rester humains, de définir notre dignité. L’indifférence et la résignation entrent dans nos âmes par le biais du confort moral.
Et font de nous des bêtes.
François-Loïs Gautier
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