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Alors que les évêques de France réfléchissent à la manière de réagir à l’injonction gouvernementale de ne pas reprendre les cérémonies publiques avant le 2 juin, les autres religions ne sont pas solidaires de la position catholique. Une singularité qui devrait pousser les évêques à décréter unilatéralement la réouverture du culte public. Manière de montrer qu’ils ne quémandent pas ce droit à l’Etat.
Lors des discussions avec l’État pour la reprise des cultes, l’Église s’est retrouvée isolée par rapport aux autres religions qui lui ont reproché de ne pas vouloir respecter le calendrier gouvernemental en attendant jusqu’au 2 juin. « Il y a eu des mots très étonnants chez certains catholiques, quand j’entends “untel est anticlérical”. C’est probablement la détresse de ne pas pouvoir prier dans les lieux de culte qui leur fait dire cela », souligne ainsi Haïm Korsia cité par La Croix (2 mai). « Mais nous sommes tous dans la même situation, et rêvons de pouvoir reprendre. Or cela voudrait dire pouvoir en assurer les conditions sanitaires, ce qui n’est pas encore le cas » poursuit le grand rabbin de France.
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Or, c’est justement là que le bât blesse. Les catholiques ne sont pas dans la même situation que les autres religions qui ne vivent pas de réalité sacramentelle. Pour les protestants ou les juifs, les réunions au temple ou à la synagogue sont des assemblées de prière. Pour les catholiques, la messe est une réalité vitale où l’on vient se nourrir au corps du Christ mort et ressuscité et s’abreuver à son sang qui nous lave du péché. Dire cela n’est pas revendiquer un privilège mais simplement constater une réalité ecclésiologique. Que nos gouvernants, qui vivent de plus en plus dans l’ignorance de la foi catholique – comme Christophe Castaner vient encore de le démontrer hier soir – ne voient pas cette réalité sacramentelle de l’Église est déjà grave. Mais que les autres religions, par ignorance ou faiblesse coupable, ne puissent concevoir ce qu’est la messe pour les catholiques, montre que le dialogue interreligieux a encore beaucoup de chemin à parcourir.
Les catholiques ne sont pas dans la même situation que les autres religions qui ne vivent pas de réalité sacramentelle. Pour les catholiques, la messe est une réalité vitale où l’on vient se nourrir au corps du Christ mort et ressuscité et s’abreuver à son sang qui nous lave du péché.
Même ignorance de la part du pasteur François Clavairoly, président de la Fédération Protestante de France (FPF) et du Conseil des Responsables de Culte en France (CRCF) dont les propos sont rapportés par La Croix : « Nous ne partageons pas, nous les autres cultes – musulman, juif, protestant, bouddhiste… – cette idée que ce serait aux cultes de revendiquer une date, nous soumettons nos recommandations aux autorités, et cette décision leur revient ensuite. Nous devons jouer le jeu, les religions ne sont pas en surplomb de la société?». Non, monsieur Clavairoly, la liberté de culte n’est pas un droit octroyé par l’État mais un droit naturel que l’État ne peut que reconnaître.
Il est très significatif que cette allégeance inconditionnelle à l’égard des autorités civiles provienne d’un pasteur protestant. N’est-ce pas Luther qui prônait l’obéissance inconditionnelle aux seigneurs lors du soulèvement des paysans allemands de 1525 ? L’Église catholique a toujours joué le rôle de contrepoids face aux excès du pouvoir temporel, en Europe mais aussi aux Amériques où elle s’opposait, parfois très fermement, aux abus des colons. Elle le pouvait justement parce qu’elle ne tenait pas son pouvoir de l’État. Dans les pays d’Europe du nord où la réforme protestante a triomphé, on a commencé par confisquer les biens ecclésiastiques appartenant à l’Église pour les donner à des princes protestants faisant allégeance à l’État. C’est ainsi que le duché de Prusse est né en 1525 de la sécularisation des terres des chevaliers teutoniques au profit d’Albert de Brandebourg passé au protestantisme.
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Dès lors, plus rien ne s’oppose aux ambitions démesurées de l’État moderne qui va devenir de plus en plus absolu car il ne trouvera plus face à lui une autorité indépendante sur les plans spirituels, hiérarchiques et patrimoniaux : la hiérarchie protestante est structurellement inféodée à l’État quand elle ne se confond pas avec lui, ce qui est le cas encore aujourd’hui de l’anglicanisme, et son assise est strictement nationale là où l’Église catholique dispose d’une hiérarchie internationale qui lui permet de mieux résister aux abus de l’État moderne. De plus, elle a conservé une structure dogmatique là où les protestants se sont engagés sur les sables mouvants du relativisme, au nom de la sola scriptura.
La hiérarchie protestante est structurellement inféodée à l’État quand elle ne se confond pas avec lui et son assise est strictement nationale là où l’Église catholique dispose d’une hiérarchie internationale.
La suite de cette histoire se lit sous nos yeux. Les églises protestantes ont très largement accompagné les dérives de l’État moderne dont elles sont la caution religieuse quand l’Église catholique continue de résister, notamment dans le domaine des mœurs. Pas étonnant, du coup, que les protestants se soumettent à l’État en matière de liberté de culte.
L’Église catholique, qui n’est pas « en surplomb de la société » comme l’accuse le pasteur Clavairoly mais tient simplement son pouvoir de Dieu et non des hommes, serait tout à fait fondée à déclarer unilatéralement une date de réouverture du culte public, en appliquant les mesures de sécurité qui s’imposent, en vertu du pouvoir de police dont les curés disposent au sein de leur église. Au-delà de la joie de pouvoir communier, ce serait aussi l’occasion de rappeler que l’Église ne tient pas sa liberté de culte du bon vouloir de l’État !
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