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Ernesto Sábato : l’esprit, ou la matière visitée
Ernesto Sábato est pour beaucoup d’abord un romancier. Découvert avec Le Tunnel, romance punitive qui aborde en creux les thèmes de la création, il poursuivra dans une ligne catabatique avec Héros et Tombes, voyage éprouvant dans l’inconscient collectif de son pays alors en pleine reconstruction après l’échec du péronisme – ce populisme dont le mantra était, rappelons-le, « plus d’espadrilles, moins de littérature » et qui a vomi la classe intellectuelle pendant tout son règne. Mais Sábato est également l’auteur de plusieurs essais dont cette Hétérodoxie donne un avant-goût en soulignant les reliefs parfois abrupts d’une pensée qui s’érige d’abord contre la modernité, à l’instar d’un Nicolás Gómez Dávila, tout en s’inscrivant dans une sorte de matérialisme vitaliste dressé contre les excès d’une spiritualité dévoyée – telle qu’elle se déploie alors à travers les dérives du new age ou même d’un christianisme exagérément « œcuménique » qui transforme peu à peu les confessionnaux en cellules de développement personnel. Il fustige chez l’homme moderne cet avènement d’un « mépris orphique » ayant abouti, via la sécularisation du christianisme, d’une part à la lugubre trilogie Liberté-Égalité-Fraternité, et de l’autre à ce qu’il nomme le « naturisme », c’est-à-dire, grosso modo, l’esprit new age et post-luciférien des beatniks. Il n’a ainsi pas de mots assez durs pour ces écrivains du début XXe qu’il qualifie de spiritualistes, à commencer par Maeterlinck, dont il fustige les injonctions à la métempsycose, et autres « compénétrations des âmes » : « La pensée n’est qu’une subtile variation de la chair », conclut-il mystérieusement. [...]
Le meilleur et le pire des essais de février
À LIRE : LES DROITS CONTRE LA LOI POURQUOI LA LOI NATURELLE ?, PIERRE MANENT, Boleine, 66 p., 9 € Le monde éditorial, pour ce qui concerne les essais, mise à peu près tout sur les personnes vues à la télé qui torchent trois cents pages mal écrites à partir d’une idée rarement nouvelle. Avec
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Jordan Peterson – Rod Dreher : comment rééchanter le monde ?
Alors que beaucoup la croyaient à jamais disparue, fauchée par le désenchantement du monde, la foi chrétienne amorce un retour chez la jeune génération. Même les sceptiques reconnaîtront que la question religieuse est de nouveau l’objet d’un dynamisme intellectuel inédit depuis des années, particulièrement dans le monde anglo-saxon. Deux essais parus fin 2024 et traduits en français, sous la plume du psychologue canadien Jordan Peterson et du journaliste américain Rod Dreher, expriment de manière opposée un même constat : la foi est un besoin impérieux de l’Homme, et un monde sans Dieu est impossible. [...]
Jean-Didier Lecaillon : ce que l’économie doit à la famille
La famille est la « cellule de base de la société ». Que cela signifie-t-il de votre point de vue d’économiste catholique ?

L’expression n’est pas de moi et dépasse largement l’économie d’une part, la religion d’autre part ! Je la reprends bien volontiers à mon compte dans la mesure où elle est une façon de reconnaître implicitement l’existence naturelle de la famille et de nous prémunir d’une conception strictement individualiste de celle-ci. Mais, puisque vous associez le qualificatif « catholique » à mon statut d’économiste, ce qui est factuellement exact, je précise que si je prends comme définition de la famille celle de la Doctrine sociale de l’Église qui a l’avantage d’être précise, j’en démontre la pertinence avec des arguments qui relèvent uniquement de l’économie. En cela, je ne fais que répondre à Jean Paul II quand il demande aux scientifiques de faire non pas de la philosophie, de la morale ou de la théologie, mais de la science. Comme économiste, je m’adresse donc, au-delà des croyants, à toutes les personnes de bonne volonté, celles qui peuvent être touchées par la raison. [...]
Benoît XVI : magistère écologique
Lors de son investiture, Donald Trump le « miraculé » n’a pas manqué d’invoquer Dieu, proposant de son élection une lecture providentielle à laquelle les oreilles américaines ne pouvaient rester insensibles. Quelques heures plus tard, il signait les décrets pour sortir des accords de Paris, en plus de révoquer d’autres mesures écologiques au prétexte que « les États-Unis ne saboteront plus leurs propres industries pendant que la Chine continue de polluer impunément la planète ». Une comparaison rapide, qui ramène la pollution au nombre d’habitants (15 tonnes de CO2 par Américain contre 8 par Chinois), suffit pourtant à condamner le mode de vie américain – et offre paradoxalement à leur messianisme un lieu de déploiement qui serait vraiment salutaire. Mais « intérêt » oblige, l’élu a préféré invoquer le Créateur et défendre les rudiments de la Créature (binarité sexuelle) pour mieux s’asseoir sur la Création. [...]
Le meilleur et le pire des essais de janvier
À LIRE : ANTIMODERNE MALGRÉ LUI LA MODERNITÉ À CONTRE-COURANT, ALAIN FINKIELKRAUT, Bouquins, 1 152 p., 32€ Alain Finkielkraut fait son entrée dans la célèbre collection Bouquins, et c’est parfaitement mérité pour l’un des plus excellents penseurs de ce dernier demi-siècle. Outre deux essais (Nous autres modernes et L’Humanité perdue), La Modernité à contre-courant compile plusieurs
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Antoine de Rivarol : L’esprit contre les barbares
Il fut « le Français par excellence » (Voltaire), « le Dieu de la conversation » (Sainte-Beuve), « l’homme le plus admirablement doué du dix-huitième siècle » (Barbey d’Aurevilly). Il fut l’astre qui illumina les salons parisiens comme Louis XIV à Versailles ; le sommet de distinction qui joignit l’art de la conversation à celui des bonnes manières, la maîtrise de la langue à celle de la pensée, la force du jugement à celle de la concision ; le causeur de génie qui piquait le monde de ses flèches trempées d’humour, de grâce ou d’ironie. En ce tumultueux siècle, Antoine de Rivarol, petit-fils d’immigré piémontais et fils d’aubergiste à la particule usurpée, promis à la prêtrise en Avignon mais monté à Paris dès sa vingt-troisième année, architecte de son ascension sociale à la seule force de son intelligence, vainqueur en 1784 du prix de Berlin pour son Discours sur l’universalité de la langue française qui démontrait sa supériorité (pour son ordre et sa clarté) sur toutes les autres langues, et qui rendait par-là hommage à cette arme dont la parfaite maîtrise avait fait sa renommée, Antoine de Rivarol, disait-on, était promis aux gloires de ce monde. [...]
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La Commune de Paris, ou l’histoire militante : entretien avec Stéphane Giocanti
Pourquoi la Commune de Paris demeure-t-elle révérée, de gauche à droite, alors qu’il est d’usage de mépriser les « Versaillais » ?

Cela s’explique par l’ampleur du carnage final, perpétré par l’armée Thiers et Mac Mahon. Si l’on ne peut qu’être saisi d’horreur et d’indignation devant la répression de dix mille hommes, femmes et adolescents, devant les cours martiales bâclées et les haines réciproques, tout cela a entraîné un abandon de l’esprit critique vis-à-vis de la Commune. Les extrêmes gauches ont créé un totem qui triomphe d’autant plus aujourd’hui que les historiens classés à droite se sont rarement penchés sur ce sujet. Inversement, les « Versaillais » sont rejetés dans les ténèbres de la honte. Selon les cas, on y mêle les députés (élus en février1871), le gouvernement de Défense nationale, avec Thiers à sa tête, l’armée, mais aussi les bourgeois, les « ruraux », les curés, les rentiers, les fonctionnaires. La binarité (gentils contre méchants) est le résidu d’une mémoire longue à propos d’une guerre civile dont la honte fut partagée. [...]
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L’Incorrect numéro 84

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