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ALIEN : ROMULUS, CINÉMA-POSTICHE

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Publié le

20 août 2024

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Fans de la franchise Alien, vous pouvez passer votre chemin. Contrairement à ce que dit une bonne partie de la critique – vraisemblablement aveuglée par la torpeur aoûtienne – Alien : Romulus est bel et bien la purge annoncée – et la preuve que tout ce qui passe entre les mains de Disney se transforme systématiquement en étron.
Alien-Romulus

Connaissez-vous le « retro-engineering » ? Il s’agit de cette technique qui consiste à analyser un produit pour comprendre, sinon son succès, au moins son fonctionnement et ses propriétés physiques. Une méthode qui s’utilise principalement dans l’industrie… mais qui semble être devenue le fer de lance d’Hollywood depuis une bonne quinzaine d’années. Ce dernier opus de la franchise Alien, mis en boîte par l’uruguayen Fede Alvarez, est à ce titre un cas d’école. Après les préquelles signées Ridley Scott, empreintes d’un créationnisme technico-biblique à la fois passionnant et maladroit, tout le monde attendait enfin un retour aux sources de la saga : la peur viscérale, la solitude du vide spatial et le fameux « xénomorphe » comme caractérisation d’une impasse prométhéenne de l’espèce humaine. Las, le yes man de Disney se plante dans les grandes largeurs et se contente d’une sorte de best of insipide de la saga, noyé dans une production design qui finit par être embarrassante à force d’être référentielle (dans Romulus, tout le monde communique grâce à des minitels, c’est tellement « eighties »).

Alien version Disney  

Loin d’être le « spin off » – c’est-à-dire l’épisode parallèle revendiqué, à insérer entre les deux premiers volets, cet Alien Romulus a tout d’un « reboot », une réédition commandée par les commerciaux pour attirer la génération Z à peu de frais. Preuve en est ce casting insipide qui semble tout droit sorti d’un épisode d’Hannah Montana, des personnages interchangeables au physique de mannequin, emmenés par une Cailee Spaeny aussi crédible en final girl que votre petite nièce. Sans oublier cette note d’intention fadasse qui fait du personnage du cyborg, complexe et indéchiffrable chez Ridley Scott, une sorte de Forest Gump forcément black et amateur de blagues Carambar, harcelé par les méchants colons. On voit bien cette volonté programmatique d’Hollywood de faire des IA les nouvelles victimes de l’intolérance « white male » – notable déjà dans le pénible The Creator… sans doute pour nous préparer à adorer les futurs matons de Boston Dynamics.

Romulus incarne l’impasse actuelle du cinéma hollywoodien : un cinéma-postiche qui semble bien en peine de créer de nouveaux mythes.

On attendait pourtant Fede Alvarez au moins sur une chose : l’horreur organique et viscérale, lui qui avait réussi à recréer Evil Dead de manière brutale et plutôt jusqu’au-boutiste. Eh bien, amateurs de gore et de métamorphoses sanglantes, vous repasserez : Romulus est à ce titre d’une paresse confondante, se contentant de citer les moments de bravoures des opus précédents : un Alien hybride tout droit sorti du film de Jeunet, l’émotion en moins, et – comble du mauvais goût – une copie numérique de feu Ian Holmes histoire d’éveiller chez les vieux fans de la série une nostalgie nécessaire. D’un côté le film accumule les maquettes « en dur », de l’autre il se livre à cet exercice de nécrophagie qui consiste à faire revivre numériquement le cadavre d’un acteur mort lorsque rien ne le justifie vraiment dans le scénario. En cela, Romulus incarne l’impasse actuelle du cinéma hollywoodien : un cinéma-postiche qui semble bien en peine de créer de nouveaux mythes.

Ados et petites astuces

Fede Alvarez a beau déployer tout un imaginaire « low tech » pour ravir les fans des années 80, cet interminable navet reste une illustration méthodique et sans âme de la méthode Disney, déjà prégnante dans Star Wars VII : susciter chez les vieux fans quelques stimuli graphiques et dissoudre le tout dans un scénario inoffensif, défendu par un casting d’adolescents. Là où Cameron, Scott et même Jeunet étaient parvenus à suggérer un parcours psychologique fort, une odyssée intérieure, Fede Alvarez compile tristement ses petites astuces de cinéaste d’horreur roué et ne provoque à peu près aucune émotion. A part peut-être dans cette scène en apesanteur qui dure dix minutes, seul vrai moment de bravoure du film – un peu court pour un « climax ». Car pour le reste, Alien Romulus étonne aussi par son aspect pauvre, affichant un manque d’ambition graphique qui le fait ressembler, c’est un comble, à un énième téléfilm Netflix. Dans l’espace, personne ne vous entendra bailler.

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