On le déplore souvent ici même, mais la littérature française depuis deux bonnes décennies semble se complaire unanimement dans des formes déceptives : autofictions, dépôts de bilan, tracts idéologiques, aveux d’échec et autres précis de dolorisme post-houellebecquien. Pour un Antoine Volodine, combien d’Aurélien Bellanger à la voix blanche, de pâles compilateurs de pages Wikipédia, de croque-morts du style qui dissimulent leur manque d’ambition dans des historiettes sans sève, dans des tranches de vie égolâtres ou éco-compatibles ? Et puis, parfois, un météore fuse et nous rappelle que la littérature, fut un temps, se piquait aussi de délire, de baroque, elle se rêvait totale, affabulatrice, dangereuse, éblouissante. On ne vous parle pas de Le Tellier et de sa petite série télé goncourtisée, non, mais d’une comète venue de plus loin : Georges-Olivier Châteaureynaud.
OUI. CHÂTEAUREYNAUD RENOUE AVEC LA GRANDE TRADITION DES ROMANS-FEUILLETONS
Châteaureynaud tourne délibérément le dos à cette mode de la série TV qui contamine tragiquement le monde littéraire d’aujourd’hui. Il lui préfère nos authentiques romans-feuilletons – dont les pulps américains ne furent qu’une adaptation – et qui se vendaient par palettes entières dans les années 1900. On pense à Eugène Sue et à ses Mystères de Paris, pour la construction d’une réalité alternative, viscéralement romanesque, travaillée par la culture populaire et l’inconscient collectif : un monde parallèle truculent qui serait en tout point conforme au nôtre – et tout à fait différent. Ainsi Châteaureynaud fait d’Écorcheville la matrice même de son inspiration, une enclave fictionnelle inespérée. [...]
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