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La Vieille France s’en va

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Publié le

6 octobre 2022

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Auteur et chroniqueur, Thomas Morales rassemble dans un ouvrage émouvant ses nécrologies des figures ayant marqué les Trente Glorieuses. Une certaine idée de la France.
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Il y a de ces professions nécessaires au corps social qui échappent trop souvent à notre reconnaissance, entre autres celle du nécrologue. Il ne suffit pas d’écrire une petite entrée dans le journal local ; l’écrivain, qui tient entre ses mains l’héritage des oraisons funèbres, y mêle le style, les souvenirs, la mélancolie. Nous sortant de notre solitude, il nous aide à vivre le deuil d’un grand personnage de manière collective et rassembleuse. Il nous accompagne aussi au-delà du choc, semblable au médecin qui accouche un nouveau-né ou comme un aide-soignant rassure dans le trépas. Il est l’agent de transition, celui qui nous aide à passer d’une époque à une autre. Il nous apprend, surtout, à souffrir de la modernité, cette atmosphère aride qui nous suffoque davantage avec les disparitions de toutes ces grandes âmes. Entre l’avant et l’après Belmondo, ou bien entre l'avant et l'après Aznavour, se trouve le digne nécrologue.

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Dans Et maintenant, voici venir un long hiver… paru aux éditions Héliopoles, Thomas Morales, le tout premier lauréat du Prix Denis Tillinac, réunit les nécrologies qu’il a écrites ces dernières années. D’Agnès Varda à Pierre-Guillaume de Roux, en passant par Francis Lai, Johnny Hallyday, Jean Rochefort et Sylvia Kristel, l’écrivain nous fait revisiter une époque plus douce parce que plus libre, plus drôle parce que plus légère et plus vivante parce que plus humaine. La Vieille France s’en va, nous laissant affronter « l’heureuse mondialisation » sans frontières, sans genre, sans humour, sans goût, sans noblesse. Jean-Paul Belmondo, en nous quittant, emmène avec lui cet « esprit de résistance au sérieux, le dérapage contrôlé comme marque de fabrique, la cascade comme exhausteur d’existence » qui améliore la banalité de notre quotidien. À sa mort, Jean-Pierre Marielle sonna la fin des célébrations de la virilité jusque dans ses excès. Hubert de Givenchy nous priva à son tour de cette « vieille politesse française » qui se résume à l’effort dans l’habillement, cet effort qui reliait toutes les femmes peu importe leurs origines sociales. Danielle Darrieux de sa seule présence faisait fuir la vulgarité devenue notre mal du siècle ; Mireille Darc emportait avec elle l’« érotisme chaste » ; puis, pour clore cet avant-propos de nos malheurs, Jean d’Ormesson nous a confisqué son sens de la répartie et de la conversation. [...]

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