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Michel Bernard : « L’histoire dépasse toujours la fiction »

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Publié le

12 novembre 2021

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Après deux très beaux romans consacrés à Jeanne d’Arc et à son procès, que nous avions salués, Michel Bernard met en scène Rodin plongé dans l’édification d’une des sculptures les plus exaltantes de sa vie : Les Bourgeois de Calais. Passionnante généalogie d’un chef-d’œuvre.
Michel Bernard

Pourquoi vous être intéressé au rapport entre Rodin et le maire de Calais ?

Rodin a créé l’œuvre mais celui qui l’a fait accepter est le maire de Calais, son commanditaire. Ce qui est très étonnant, c’est que cette œuvre, qui a révolutionné la sculpture mondiale, qui a un caractère inédit, surprenant, soit le fruit d’une commande publique d’une ville française. Cela renverse complètement les clichés d’une petite bourgeoisie étriquée, repliée sur l’académisme. C’est précisément de là qu’on l’attendait le moins que surgit l’impulsion politique qui permettra à un sculpteur encore peu connu de produire le chef-d’œuvre qui le fera immédiatement reconnaître comme un très grand sculpteur, voire un génie. Parce qu’en vérité, on ne sait pas d’où sort cette œuvre. Quelles en sont les influences, on a du mal à le dire. Elle ne se rattache à aucune tradition, aucune école de l’époque. C’est un geste isolé, dont on ne soupçonne pas la source. L’œuvre est bouleversante : six hommes face à la mort. Le roman est une enquête que j’ai menée pour tâcher de comprendre ce qui rend cette œuvre si étonnante et bouleversante. En me documentant, j’ai très vite vu apparaître le maire de Calais.

Comment en est-il arrivé à faire cette proposition à Rodin ?

Il a eu l’idée de commander une sculpture en hommage aux bourgeois de Calais, ces héros du début de la Guerre de Cent ans. Il a alors demandé à un sculpteur calaisien qui il pourrait solliciter pour accomplir cette œuvre. Celui-ci lui a indiqué un sculpteur parisien peu connu mais plein de talent, dont il subodorait qu’il allait percer. Aussitôt, le maire de Calais se rend à Paris pour rencontrer Rodin dans son atelier. Comme mû par l’intuition. Dans le livre, j’avance le fait que le nom Rodin lui plaisait : c’est un nom solide qui inspire la confiance. Alors, il le rencontre et il est tout de suite subjugué. Par le personnage et par le lieu : le dépôt des marbres à Paris. Un atelier de sculpteur est un endroit étonnant. En l’occurrence, c’est un grand hangar qui est tout à la fois entrepôt et atelier. Il m’est arrivé de visiter le dépôt des sculptures de la ville de Paris. Une sorte de halle ferroviaire emplie de centaines de sculptures, notamment les maquettes de concours. C’est une ambiance tout à fait étonnante. Au sens propre, surréaliste. Vous vous trouvez au milieu de soldats, d’écrivains, de quantité de femmes nues, d’allégories, d’animaux. Omer Dewavrin, le maire de Calais, s’est d’un coup trouvé parmi un tel monde. Ce bon bourgeois de Calais a dû être ébahi. [...]

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