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En dépit des discours volontaristes du gouvernement, et des cris d’orfraie des milieux associatifs, relayés par un journal comme L’Obs qui n’hésitait pas à dépeindre Macron en un genre d’Orban hexagonal dopé aux stéroïdes, il n’y a pas grand chose à attendre du projet de loi Immigration et Asile porté par Gérard Collomb. Emmanuel Macron est particulièrement habile, se réjouissant des vociférations d’un Yann Moix. Car, au fond, il sait bien qu’il a besoin de se droitiser sur ce sujet majeur aux yeux de l’opinion, et il n’a pas à prendre de gros risques pour y parvenir avec une classe médiatique aussi médiocre et déconnectée. Explication.
L’immigration est probablement l’un des sujets les plus commentés en France, mais aussi dans l’ensemble du monde occidental. Savons-nous pourtant de quoi il est précisément question ? Commençons d’abord par définir ce qu’est un « immigré ». Selon l’Institut national de la statistique et des études économiques, est « immigré » toute « personne née à l’étranger de parents étrangers et résidant en France ». Ne sont donc pas immigrés, les Français nés à l’étranger, les Français nés en France partis longuement à l’étranger puis revenus vivre dans leur pays natal, et les descendants d’immigrés nés en France. Quiconque voudra tenter d’évaluer l’impact réel de l’immigration sur la composition de la population française contemporaine se fera donc fort de trouver des études relatives aux descendants d’immigrés.
Du reste, légiférer sur l’immigration en 2018 sans tenir compte des précédentes décennies n’aurait aucun sens. L’Europe de l’Ouest est l’une des premières « zones d’arrivée » de l’immigration, aux côtés des Etats-Unis ou de l’Australie, mais aussi de pays plus inattendus tels que le Nigeria ou l’Afrique du Sud qui absorbent une part importante des migrations intra-africaines. Au sein de l’Europe de l’Ouest, la France est de longue date l’un des pays les plus accueillants, si ce n’est le plus ouvert. Qu’on se le dise, l’explosion du nombre de demandeurs d’asile depuis 2013 dans l’Union européenne s’inscrit dans un cadre beaucoup plus large, ne constituant qu’un épiphénomène de l’ère de l’immigration ouverte au début des années 1950, et qui pourrait perdurer plusieurs décennies encore.
I- L’immigration depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale :
L’argument le plus fréquemment avancé par les partisans de l’ouverture des frontières consiste à affirmer, d’année en année, que l’immigration « n’a pas augmenté ». Ce sophisme, que l’on peut aisément démystifier, prend racine dans la définition même que l’on donne de « l’immigré ». Les descendants d’immigrés sortant des statistiques de l’immigration, y compris quand ils ne sont pas assimilés ou intégrés au reste de la population, cultivant des mœurs et des coutumes étrangères, parfois contradictoires avec celles qui sont (ou furent) historiquement les nôtres, fait que la carte de l’immigration ne reflète pas son territoire.
Les mensonges, les sacrés mensonges et les statistiques
Dans son autobiographie, Mark Twain prétend qu’il y a trois sortes de mensonges, « les mensonges, les sacrés mensonges et les statistiques ». Une statistique ne ment pas directement, mais elle dissimule le plus souvent une partie de la vérité. Les militants politiques le comprennent d’instinct, utilisant les statistiques comme autant d’arguments factuels qui ne pourraient pas souffrir la moindre contestation. De la sorte, un groupement associatif considérant que toute immigration est bénéfique à la France pourra doctement expliquer que l’immigration est restée stable des années 1930 à nos jours.
Ainsi, il n’est qu’à consulter le site de l’association Agir Tous pour la Dignité Quart Monde (fondée en 1957 par le père Joseph Wresinski) pour se convaincre qu’après tout « rien n’a changé » en France, surtout pas la population. C’est du moins ce que s’attache à démontrer la série « Idées reçues sur l’immigration », dont la quatrième entrée (les autres entrées sont à l’avenant) s’intéresse à la proportion d’immigrés présents sur le territoire national :
« Idée reçue n°4/10: l’immigration augmente massivement en France. Faux. Elle n’a augmenté que de 1,4 point entre 1975 et 2013. En France, les immigrés composaient en 1931 6,6 % de la population. Cette part a diminué jusqu’à la guerre et augmenté ensuite pour atteindre 7,4 % en 1975, restant à ce niveau jusqu’en 1999 et augmentant jusqu’à 8,8 % en 2013 (alors que les Français l’évaluent à 23,5 %, selon le sondage « Transatlantic Trends : Immigration 2011 » !)
À lire cet article, on serait tentés de croire que les Français seraient totalement paranoïaques, voyant des immigrés partout. Ce que les auteurs du journal d’ATD Quart Monde ne disent pas, c’est qu’entre 1931 et 2018, des millions d’immigrés sont devenus Français, ont fait souche et se sont installés en France. Le ressenti exprimé par les Français n’est donc pas une « idée reçue », mais une observation factuelle que des études à peine plus complètes confirment. Parue le 8 février 2017, l’analyse « Être né en France d’un parent immigré – Une population diverse reflétant l’histoire des flux migratoires », de Chantal Brutel de la cellule des Statistiques et des études sur l’immigration de l’Insee, donne une version un peu plus fidèle du paysage dessiné par l’immigration en France, sans toutefois pouvoir prétendre à l’exhaustivité.
On y apprend qu’en 2015, 7,3 millions de personnes nées en France et résidant en ménages ordinaires (ne sont pas comptabilisées les personnes résidant en communauté, hôpitaux ou foyers par exemple) avaient au moins un parent immigré, parmi lesquels 3,285 millions ayant leurs deux parents immigrés, ce qui correspond à environ 11 % de la population. Il suffit d’aller un peu plus dans le détail des chiffres pour réaliser l’ampleur de la bêtise proférée par ATD Quart Monde. On observe notamment que l’âge moyen des immigrés, pour la période comprise entre 1999 et aujourd’hui, était toujours supérieur d’au moins cinq années à l’âge moyen de la population globale. Que cela signifie-t-il ?
Des confusions permanentes qui entretiennent un climat de désinformation
Tout simplement qu’il y a peu d’enfants et d’adolescents répondant aux critères définis par l’Insee pour désigner un « immigré ». Nul besoin de faire un dessin… Cet âge moyen a d’ailleurs diminué depuis le milieu des années 2000, conséquence de l’arrivée de nouvelles vagues migratoires importantes venues d’Afrique, constat étayé par un examen des tableaux montrant l’évolution de la provenance des immigrés entre 1962 et 2017 : diminution par plus de la moitié du taux d’immigrés européens (de 79 à environ 36 %), multiplication par trois du taux des immigrés africains (de 15 à 45 %) et multiplication par sept du taux d’immigrés venus d’Asie (de 2,5 à environ 14 %). Les choses se précisent encore un peu plus quand on s’intéresse à la « nationalité d’origine des acquérants de la nationalité française par décret ou mariage », qui place les immigrés africains à plus de 60 % desdits « acquérants » lors de l’intégralité des années 2000, avec des pics réguliers à 68 % !
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L’étude du nombre d’immigrés se trouvant en France chaque année, y compris quand on y ajoute le nombre de descendants d’immigrés, ne suffit donc pas. Ces chiffres ne permettent qu’une évaluation grossière du changement de population à l’œuvre en France. Attardons-nous, à titre d’exemple, sur les effectifs des immigrés algériens, pays dont le contingent est le plus nombreux, en faisant un petit calcul très concret et facilement compréhensible. En 1999, il y avait 576.000 immigrés algériens en France, dont 155.520 avaient été déjà naturalisés. Vivaient en France, 420.480 personnes strictement étrangères de nationalité algérienne. Vieillissement de la population oblige, ce chiffre aurait dû décroître entre 1999 et 2008. Que nenni, la fiche thématique « Population immigrée – Immigrés – Insee Références – Edition 2012 » fait état d’une population de 713.000 immigrés algériens présents en France en 2008, soit une augmentation de 137.000 personnes (l’équivalent exact des villes de Limoges ou de Clermont-Ferrand) ! Notons de surcroit que 299.460 (42 %) des 713.000 immigrés algériens avaient déjà acquis la nationalité française en 2008… La même année, toujours, 93 % des descendants d’immigrés algériens étaient de nationalité française, dont 65 % de binationaux. Dire que « l’immigration n’a pas augmenté » en cinquante ans est le produit d’une malhonnêteté intellectuelle carabinée. Sachez par ailleurs que plus d’un enfant sur quatre né en France en 2016 avait un parent né hors de l’Union européenne.
Plus d’un enfant sur quatre né en France en 2016 avait un parent né hors de l’Union européenne.
Il faut bien dire que l’imprécision en la matière n’est pas l’apanage des journalistes ou de monsieur-tout-le-monde, frappant jusqu’aux représentants les plus diplômés de la classe politique française. L’énarque Jean Messiha, candidat malheureux du Front national aux dernières élections législatives, s’était ainsi offusqué du fait que le journal Libération l’ait qualifié d’immigré alors qu’il avait acquis la nationalité française, manifestant par là sa méconnaissance des critères de l’Insee. Etant né de deux parents étrangers à l’extérieur des frontières nationales, Jean Messiha est bien un immigré pour les statistiques, même s’il n’est plus un étranger. Une personne qui n’a pas acquis la nationalité française, née de deux parents étrangers, n’est en revanche pas considérée comme étant un immigré. Ce que disait Jean Messiha partait d’un bon sentiment, montrant son attachement à la France, mais il faut être rigoureux quand on aborde pareils sujets polémiques.
Ces confusions permanentes entre « immigré », « descendant d’immigré », « étranger » ou « personne d’origine étrangère », entretiennent un climat de désinformation qui dessert par avance le débat de première importance que la France devrait livrer. Que dire donc sur l’immigration du siècle dernier et de ce début de siècle ? Massive, elle a profondément transformé le pays. Point à la ligne. Et qu’on ne me fasse pas croire que les services du ministère de l’Intérieur ne l’ont pas remarqué. Les chiffres parlent d’eux-mêmes, sans toutefois dévoiler la profondeur du « territoire ». Jacques Toubon, l’un des plus fervents champions de l’accueil des « migrants » aujourd’hui, ne manquait pas de le dire le 13 janvier 1986 dans les colonnes du Point : « Rendre acceptable la présence d’étrangers c’est stopper toute nouvelle immigration en France ! » Il y allait alors un peu trop fort, un pays ne pouvant pas raisonnablement rejeter tous les immigrés. Preuve est faite, de nouveau, que les forts-en-gueule ne sont pas toujours les plus décidés à passer aux actes.
II- Immigration légale et asile : quels objectifs la France devrait-elle se fixer ?
Depuis à peu près cinq ans, le traitement de l’immigration s’est quasi exclusivement focalisé sur « la crise des migrants ». La ville de Calais, littéralement prise au piège depuis les accords du Touquet ratifiés par Nicolas Sarkozy, est devenu le symbole d’une France qu’on imagine volontiers devenue un « camp des saints à ciel ouvert », ou, pour détourner le nom d’une célèbre association, une « terre d’asile de fous ». Il est certain que l’esprit de l’asile a été détourné. À l’origine, l’asile n’est pas un « droit », mais une faveur qu’un Etat accorde à titre individuel à des personnes qui le méritent. Ce dévoiement progressif de l’asile, passé d’une faveur à un droit automatique, se fonde notamment sur les articles 13 et 14 Déclaration universelle des Droits de l’Homme de 1947 d’inspiration socialiste, créatrice de droits-créances et de droits collectifs (contraires à l’esprit de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen, laquelle ne s’occupait que des seuls individus), voulant que toute personne aurait le droit devant la persécution de « chercher asile et de bénéficier de l’asile en d’autres pays ».
Diminuer l’immense pouvoir de nuisance de ces associations
Autre temps, l’idée même de « réfugiés économiques » (ou de « réfugiés climatiques » (sic)) n’était au moins toujours pas à l’étude. Le monde n’était pas celui que nous connaissons. Beaucoup moins peuplée, l’Afrique était encore largement soumise à la domination coloniale. Toutefois, une graine était plantée. Une graine que la fin des empires coloniaux, le vieillissement de la population en Occident, et l’explosion démographique du Sud, auront contribué à faire pousser dans des proportions qu’il était difficile d’anticiper. La gestion des flux migratoires est plus que notre présent, c’est aussi notre futur.
Seul un demandeur d’asile débouté sur 100 finissait par quitter la France
Dans cette optique, il est rassurant que le gouvernement prenne conscience de l’enjeu, en se décidant à doter la France d’un arsenal législatif plus adapté à la nouvelle donne. Evidemment, l’immigration légale qui concerne plus de 200.000 personnes par an depuis 2004 sera insuffisamment prise en considération. Mais qui pourrait croire qu’un pays incapable de faire le ménage devant sa porte, en rappelant que les clandestins doivent être expulsés au regard de la loi, serait en mesure de nettoyer entièrement les écuries d’Augias d’un simple claquement de doigts ? Rationaliser le régime de l’asile, expulser les clandestins, et, surtout, cesser de les attirer, sont des premiers pas incontournables. Avant de gagner une guerre, il faut remporter des batailles symboliques.
Une première victoire importante serait de diminuer l’immense pouvoir de nuisance de ces associations qui, vivant des impôts des Français, ne cessent pourtant d’agir contre leurs intérêts les plus vitaux. « La politique d’asile est devenue la principale source d’arrivée d’immigrants clandestins en France », indiquait un rapport d’étape de la Cour des Comptes daté du mois d’avril 2015. Pis, seul un demandeur d’asile débouté sur 100 finissait par quitter la France, en dépit d’une obligation légale les commandant de partir, selon ce même document !
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Pour être tout à fait honnête, ce rapport avait eu quelques conséquences positives. Le 9 octobre 2015, le Conseil d’administration de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides avait étrangement rectifié la liste des pays d’origine dits « sûrs », rajoutant des Etats dont les absences relevaient de grossiers anachronismes (au choix, l’Inde, le Ghana, la Serbie ou la Bosnie). Moins anecdotique qu’il n’y paraît, la liste des pays sûrs conditionne grandement l’obtention éventuelle du statut de « réfugié ». Les Afghans, les Soudanais, les Libyens ou les Erythréens (quand il ne s’agit pas de faux réfugiés s’étant procurés de faux passeports, un problème bien documenté) bénéficient d’appuis importants dès qu’ils débarquent en Europe, aidés par des associations de toutes sortes, la relative empathie d’une grande partie de la classe politique, et une couverture médiatique souvent compassionnelle qui peut parfois sidérer les opinions publiques.
Un projet de loi très attendu et déjà des renoncements
Résultat ? Le nombre de visas de séjours humanitaires augmente continuellement depuis 2013. En outre, les déboutés du droit d’asile ne sont pas expulsés, protégés par des réseaux communautaires et associatifs, impossibles à retrouver. Pareillement, les étrangers ayant fait une demande d’asile dans un autre pays d’Europe qu’en France ne sont pas toujours renvoyés dans les temps vers leur pays d’arrivée dans l’Union européenne (pays de référence).
Gérard Collomb a déjà renoncé à la mesure qui était potentiellement la plus intéressante
Il est tout de même compliqué de s’y retrouver entre les faux réfugiés et les vrais migrants économiques, les migrants économiques légaux qui ne devraient pas pouvoir venir et les très rares véritables réfugiés. Ajoutez à cela les statistiques allemandes de la criminalité des « migrants » révélées par Philippe Lemoine sur Twitter, la question des naissances sur le territoire national évoquée plus haut, le cas des terroristes passés par les filières de « migrants », l’affaire du nouvel an de Cologne, la démographie du Sud inversement proportionnelle aux conditions de vie, les images venues de Calais, tant d’éléments qui alimentent légitimement le ressenti général de la population française sur l’immigration.
Le projet de loi « asile et immigration » de l’exécutif Macron est donc très attendu. A l’évidence, il ne changera pas la donne, Gérard Collomb ayant déjà renoncé, sous la pression des associations et d’une partie des députés de sa propre majorité, à la mesure qui était potentiellement la plus intéressante, relative aux « pays tiers sûrs ». Une telle décision aurait pu permettre de renvoyer les déboutés du droit d’asile vers des pays non européens par lesquels ils avaient transité en premier. Tout juste peut-on espérer, après la désertion d’Emmanuel Macron en terre calaisienne face à Theresa May (il n’a rien obtenu d’autres que 50 millions d’euros pour protéger les frontières anglaises sur le sol français), que les délais de traitement de demandes d’asile soient accélérés et que les demandeurs soient maintenus plus longtemps dans les Centres de rétention administrative avant d’être relâchés dans la nature.
Pis, le texte est prodigue avec les demandeurs d’asile, qui auront la chance de bénéficier de cartes de séjour dont la durée pourra être fixée à quatre ans dès la première admission au séjour, dès lors qu’ils seront soumis à un régime de protection subsidiaire ou titulaires du statut d’apatride. Et je ne m’attarde même pas sur la création de 7.500 nouvelles places d’hébergement pour les demandeurs d’asile, et 5.000 places pour les réfugiés dans des centres provisoires d’hébergement. Si le texte qui sera diffusé en février est de la même teneur que ce que les premières informations laissent entendre, il ne sera qu’un coup d’épée dans l’eau de plus. Qui donnera à la France la politique migratoire qu’elle mérite ? Plus précisément, la politique migratoire dont elle a besoin pour survivre au XXième siècle. Pour l’instant, ce n’est pas Emmanuel Macron.
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