L’enfer ne ressemble pas vraiment à l’idée qu’elle s’en faisait. En guise de chaleurs diluviales et de cataractes bouillantes, il n’y a qu’un open-space aux dimensions infinies. Au-delà des vitres teintées, une sorte de brume jaunâtre s’étend dans toutes les directions. Une moquette râpée et légèrement humide recouvre le sol et semble vouloir aspirer ses semelles à chaque pas. L’endroit a l’air désert au premier abord, mais deux types l’interpellent brusquement depuis un box à sa droite. Le premier est un jeune binoclard au front large et le second a l’air d’un inverti légèrement simplet, avec ses bouclettes blondes et ses grands yeux sombres où flotte une vague démence.
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– Gottverdammt, enfin une nouvelle arrivante ! Johann Caspar Schmidt, alias Max Stirner pour vous servir. Cet énergumène â coté se fait appeler Pico. L’énergumène lui adresse un regard distrait avant de se remettre au travail. Il trace fiévreusement des courbes avec une sorte de mine de plomb attachée à un sextant.
– Ne faites pas attention à lui, précise Max Stirner. Il vit mal son cinquième siècle d’éternité.
– In coelo est naturaliter dextrum, et illud non mutatur quamis partes orbis mutentur ! glapit Pic de la Mirandole en dressant un doigt vengeur vers le faux plafond.
Stirner lève les yeux au ciel et désigne une chaise à la jeune femme.
– Expliquez-nous donc ce que vous faites au Malebolge.
– Le Malebolge ?
– Le huitième cercle ! On ne vous a rien dit ? Vous n’avez pas lu Dante ? Le cercle réservé aux faux prophètes, aux charlatans, aux prévaricateurs et à toutes les langues empoisonnées. [...]
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