Nous connaissions l’islam avant, dans le temps jadis. De loin, comme l’adversaire fantasmé de la chanson de Roland. Comme le sultan qui refusa la conversion proposée par Saint François d’Assise. Comme le Turc qui faillit prendre toute l’Europe après Constantinople. Comme le Maure qui terrorisait la Méditerranée par la razzia, la piraterie et l’enlèvement en l’esclavage. L’islam était l’adversaire archétypal de la chrétienté et de l’Occident.
La critique chrétienne fondamentale, formulée dès son apparition, le fustigeait comme une hérésie (c’est-à-dire une contrefaçon de l’idée du Royaume de Dieu), notamment dans les réquisitoires sans appel de Jean de Damas (VIIIe siècle) ou de Pierre le Vénérable, abbé de Cluny, qui fit traduire le Coran au XIIe siècle.
Et puis, nous avons connu l’islam de beaucoup plus près, lorsque le vent de l’histoire tourna, que l’islam consomma sa décadence, se laissant envahir et soumettre par l’impérialisme occidental. Un « vivre ensemble » s’établit dans les terres d’islam. On y vivait à l’européenne au XXe siècle dans ses grandes villes, tandis que le progressisme occidental se diffusait partout : technique, institutions politiques modernes, idées nouvelles de nationalisme, de socialisme, de sécularisation… Les « orientalistes » poursuivirent le travail d’étude et de compréhension de l’islam. Ils lui appliquèrent les méthodes scientifiques nouvelles et l’esprit critique développés à partir du christianisme (et de plus en plus contre lui).
C’est ainsi qu’Ernest Renan en vint à donner cette conférence fameuse de 1883 à la Sorbonne, d’où provient la citation en titre de cet article. C’est ainsi que la critique historique fondamentale de l’islam fut initiée. C’est ainsi, pour faire pièce à la religion chrétienne honnie, que se développa aussi chez une partie des orientalistes le mythe d’une religion de tolérance et de paix, qui aurait fait le bonheur de l’Andalousie.
INTOUCHABLE ISLAM
Cette approche idéologique de l’islam en vint à placer un écran de fumée entre sa réalité, particulièrement la connaissance empirique et scientifique ainsi développée au fil des siècles, et le discours dominant qui est toujours tenu sur lui en Occident. L’après-guerre a vu de la sorte les forces anticoloniales et anti-impérialistes déployer un discours (...)
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