La généralisation des contraceptifs avait fait naître chez beaucoup un espoir : par la maîtrise ex-ante de la procréation, les femmes pourraient dorénavant choisir le moment où elles tombent enceintes, ce qui de fait diminuerait le recours aux longues aiguilles des faiseuses d’anges. Avec la libération sexuelle qu’elle allait entraîner, c’était même le grand argument des promoteurs de la contraception dès les années 1950, et c’est cette logique de maîtrise de la procréation qui a d’ailleurs justifié l’autorisation des contraceptifs en France, par la loi Neuwirth de 1967. « C’est vrai, transmettre la vie, c’est important. Il faut que ce soit un acte lucide, continuez ! » avait alors répondu le général de Gaulle à son ministre pour avaliser son initiative. Depuis, le discours n’a point changé : la diffusion sur l’ensemble du territoire et l’efficacité croissante des techniques contraceptives permettront une baisse du recours à l’avortement. Et de fait, l’argument a imprimé dans la population française puisque d’après une enquête de l’Institut national d’études démographiques (INED), seules 2,6 % des femmes de 18-44 ans n’avaient pas recours à la contraception en 2013, contre plus de 25 % en 1968.
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Un embryon sur quatre avorté en 2019
Pourtant, cette diffusion des contraceptifs n’a pas empêché la hausse des avortements. Certes, l’effet prévu a fonctionné dans un premier temps jusqu’au milieu des années 1990 – encore qu’il faille prendre les chiffres d’alors avec des pincettes car ils sont fondés sur des estimations. Depuis, le constat est sans appel : le nombre d’avortements n’a cessé d’augmenter ces trente dernières années. D’après une étude de décembre 2020 pilotée par la Direction de la Recherche, des Études, de l’Évaluation et des Statistiques (DREES), le nombre d’avortements oscille depuis 2001 entre 215 000 et 230 000 par an, contre 195 000 en 1995, départements et régions d’outre-mer compris. En 2019, ce chiffre a même atteint un record historique avec près de 232 200 avortements, soit une hausse de près de 20 % par rapport à 1995. [...]
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