Vous défendez le principe d’une union de droites. N’est-ce pas paradoxal d’axer une partie de votre campagne sur l’attaque de vos éventuels alliés : Éric Zemmour contre le RN, vous contre les LR ?
D’abord, je vous demande d’être justes : j’ai pour ma part réservé mes flèches les plus vives à la gauche – j’ai débattu avec mesdames Panot de LFI, Marie Toussaint d’EELV et Valérie Hayer ; j’ai clairement désigné les islamogauchistes de LFI comme mon adversaire principal ; et je suis justement la seule des candidates à droite à avoir établi une distinction claire entre adversaires et concurrents.
Ensuite, par définition cette concurrence électorale existe parce qu’il existe des différences réelles, sur le plan politique et stratégique entre nos formations. Pensez-vous que les masquer grandirait le débat public ? Je ne le crois pas.
Le RN refuse l’union des droites, et avance dans une logique de parti unique, un « avec nous ou contre nous », ce qui est, je pense, une erreur fondamentale. Vous m’accorderez que je le disais déjà lorsque j’étais moi-même député du FN, de 2012 à 2017. Par ailleurs, oui, il existe bien des différences de fond, même si je sais que la mode serait à tout balayer, à faire fi des idées, au nom d’un « vote utile » ou du vote pour celui qui serait le plus haut dans les sondages… Je crois que vos lecteurs ont un peu plus d’exigence que cela.
Le RN a un programme économique beaucoup plus étatiste, fiscaliste et interventionniste que nous. Sur les questions dites de société, le RN n’a plus de boussole : on l’a vu sur la PMA sans père, on l’a vu sur la constitutionnalisation de l’avortement, et un député a même dit qu’un débat existait au sein du parti sur la GPA tandis qu’un autre a déclaré que le parti ne reviendrait pas sur l’inscription, dans l’état civil français, des GPA réalisées à l’étranger, ce qui est un premier pas vers une autorisation en France de cette pratique scandaleuse. Enfin, y compris sur les questions identitaires, quand le RN reste largement engoncé dans un logiciel strictement laïcard, qui ne permet pas selon moi d’affronter le défi civilisationnel mais aussi le vide nihiliste de ce siècle, lorsqu’il refuse de reconnaître le choc des civilisations à l’œuvre sur notre sol ou considère l’islam compatible avec la République, au moment même où l’offensive islamique est partout, on ne peut pas considérer que nos différences d’analyse soient totalement secondaires.
Dans l’actualité récente, le RN a défendu – comme Emmanuel Macron – la potentialité d’un quatrième référendum en Nouvelle-Calédonie. Je ne comprends pas cette capitulation politique devant les casseurs, les pillards, la violence de groupes indépendantistes haineux, anti-Français et anti-blancs, soutenus par des puissances étrangères comme la Chine ou l’Azerbaïdjan. Les Calédoniens se sont exprimés pour rester dans la France à trois reprises, alors même que le corps électoral était gelé au bénéfice des indépendantistes. Maintenant, force est à la loi et à l’ordre !
Quant aux LR, oui, le plus grand défaut de François-Xavier Bellamy c’est son parti.
Sauf si des éléments nous auraient échappés, il n’y pas une feuille de papier à cigarette qui vous sépare idéologiquement de François-Xavier Bellamy. Quel gâchis non ?
En effet, quel gâchis d’être candidat pour LR, qui est le parti de tous les reniements et de toutes les compromissions ! Je dois vous dire – comme j’ai eu l’occasion de lui dire – que je n’arrive pas à comprendre son acharnement à vouloir faire survivre LR. En 2019, il était entré en politique comme un homme extérieur à cette mentalité partisane, et aujourd’hui le voici vantant la « majorité sénatoriale » de Gérard Larcher, tenant des meetings avec Valérie Pécresse (qui a par exemple renié sa participation à La manif pour tous), et se faisant imposer une liste qui est faite pour satisfaire les demandes de Xavier Bertrand et Hervé Morin. On est loin de la promesse initiale !
Les électeurs de droite souhaitent-ils être trahis une énième fois par LR, dont les principaux dirigeants préparent des accords gouvernementaux avec les macronistes ou une candidature unique en 2027 ? Je parle de Gérard Larcher bien sûr, mais aussi de Valérie Pécresse ou même d’Éric Ciotti qui a défendu voici quelques mois l’idée d’un candidat unique du « camp modéré ». Veulent-ils continuer avec un parti qui fournit des nouveaux ministres à Macron à chaque remaniement ? Veulent-ils voter pour un parti qui au niveau européen fait partie de la grande alliance cogérant l’Union européenne avec les socialistes et les macronistes, derrière Von Der Leyen ? Les électeurs de droite veulent-ils voter pour des candidates, en bonnes places sur la liste LR, comme Anne Sander ou Nathalie Colin, qui se sont affichées avec des organisations islamistes, ou pour Nadine Morano qui est favorable à la GPA ?
S’ils refusent tout cela, alors je leur propose de choisir des élus qui ne les trahiront pas, en votant pour la liste Reconquête! que je conduis.
« Le plus grand défaut de François-Xavier Bellamy c’est son parti. » Marion Maréchal
Le dérèglement climatique existe-t-il ? Vous qui êtes conservatrice, pourquoi ne pas réhabiliter en la matière, comme sur les questions bioéthique et civilisationnelle, un sens des limites et de la mesure ?
Je suis précisément particulièrement attachée au principe du respect des limites, en tout domaine vous avez raison. La question est en revanche de savoir de quelle manière on répond au défi environnemental. Les tenants du fanatisme vert, cette extrême gauche qui est parvenue à un hold-up sur la question écologique, considèrent que l’Homme est le problème. Finalement, ils ont simplement repeint de vert leur nihilisme, leur pulsion suicidaire. C’est ainsi qu’on en arrive à une pensée décroissante qui va jusqu’à considérer l’enfant comme un pollueur en devenir. N’a-t-on pas vu Sandrine Rousseau se féliciter de la baisse de la natalité française ? Je considère pour ma part que l’Homme fait aussi partie de la solution, que nous avons en nous la capacité d’affronter les défis. Je constate des avancées scientifiques considérables qui commencent à porter des solutions innovantes, qu’il s’agisse de la captation du carbone ou de l’utilisation cumulée du laser et de l’intelligence artificielle pour remplacer certains produits phytosanitaires comme le glyphosate. Je défends une écologie de l’incitation, de l’adaptation et de l’innovation.
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Quel est le problème numéro un des agriculteurs français : normes environnementales, libre-échange, PAC ou fiscalité ?
Je rappelle que nous avons perdu 100 000 exploitations agricoles en 10 ans. Le sujet me semble trop sérieux pour se risquer à établir un hit-parade ou un « topito ».
Ces problèmes sont cumulatifs. La Politique agricole commune impose aux agriculteurs français des normes environnementales qui ne s’imposent pas aux importations. Notre Etat impose aux agriculteurs – comme à toutes les entreprises – une fiscalité qui pèse évidemment sur leur productivité et leur rentabilité. Ecrasés entre les taxes et les normes, voici nos paysans sommés de faire face au libre-échange mondialisé. Chacun comprendra bien évidemment que la concurrence est absolument déloyale ! Et non seulement, cela tue notre agriculture mais nous nous retrouvons avec des produits de piètre qualité, voire même dangereux, dans nos assiettes. Lorsque j’étais député du Vaucluse – qui est un département agricole, je me suis battu à l’Assemblée contre l’adoption du CETA. Imaginez que ce traité de libre-échange peut ramener en France des viandes issues d’animaux nourris aux farines animales ! Il faut revoir les objectifs de la PAC en visant la souveraineté alimentaire, ce qui signifie aussi refuser le fameux Pacte vert qui conduit inexorablement à la décroissance agricole. Or, il faut choisir : si on produit moins en France et en Europe, il faudra importer plus ! Ce qui est évidemment le modèle le plus anti-écologique.
La fraude sociale (environ 2 milliards détectés) est bien moins élevée que la fraude fiscale (environ 15 milliards). Pourquoi à ce point insister sur l’« assistanat » ?
En réalité, j’insiste surtout sur la nécessité de mieux rémunérer le travail, de mieux récompenser le mérite et l’effort. Je n’accepte pas une société où l’on peut gagner autant, voire davantage, en ne faisant rien qu’en se tuant à la tâche. Je refuse la misère des bas salaires, qui est l’un des drames sociaux de notre pays. Or, ce qui pèse sur nos comptes publics et donc aussi sur le coût du travail, sur les fiches de paie, c’est aussi une dépense sociale qui ne semble plus connaître de limites. Je suis très attachée à la solidarité nationale, mais je pense qu’elle est justement malmenée par ceux qui en abusent, et bien sûr je veux qu’on la réserve justement aux nationaux.
Vous évoquez le chiffre de 2 milliards d’euros : c’est le coût du RSA versé aux étrangers, ou encore le coût des allocations logement versées aux étrangers. Voilà une économie, immédiate, de 4 milliards d’euros qui me semblerait plus que légitime.
« Je suis très attachée à la solidarité nationale, mais je pense qu’elle est justement malmenée par ceux qui en abusent » Marion Maréchal
En quoi votre programme permettra-t-il de venir en aide à la France des Gilets jaunes ?
Les Gilets jaunes, je rappelle que c’est initialement – avant que l’extrême gauche et ses professionnels de la subversion vienne salir le mouvement – une révolte contre les taxes et les impôts. C’est une révolte de travailleurs. Ce sont les artisans, les commerçants, les employés que l’on retrouvait à l’origine sur les ronds-points.
Or, nous sommes le seul parti à dénoncer et refuser l’enfer fiscal qui écrase nos foyers et étouffe nos entreprises.
Vous vous distinguez du RN sur les questions sociétales. En quoi est-ce pertinent à l’échelle européenne alors que, a priori, ces questions relèvent des compétences nationales ?
Bien au contraire, l’agenda progressiste est une des boussoles de l’action de l’UE. C’est en particulier le cas de la Commission qui fait la part belle à l’idéologie LGBT, à l’activisme transgenre, à travers le financement d’événements et d’associations. Vos confrères du JDD révélaient récemment que depuis 2014, la Commission européenne a versé 4 millions d’euros de fonds européens à l’ONG Transgender Europe, dont 596 864 euros de subventions de fonctionnement rien qu’en 2024. Cette organisation militante est même liée par un contrat-cadre dans la « Stratégie 2020-2025 en faveur de l’égalité des personnes LGBTIQ » en Europe. On peut aussi évoquer la GPA : le Parlement européen a voté la reconnaissance de la filiation des enfants issus de GPA dans l’ensemble des pays de l’Union, ce qui est une façon de l’imposer. Je précise d’ailleurs que ce vote a été rendu possible par le soutien du groupe des LR, le PPE, et même le vote de certains députés européens LR.
Je me bats contre la destruction de tous nos repères, la confusion des sexes, l’effacement de l’altérité hommes-femmes, et je mènerai ce combat sans relâche au Parlement européen.
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La Russie a attaqué l’Ukraine. Vous vous opposez à la livraison de missiles qui permettraient aux Ukrainiens de toucher des cibles militaires sur le sol russe. Pourquoi ?
Pour une raison très simple : je refuse tout ce qui pourrait faire de la France un pays cobelligérant dans ce conflit et participe à une escalade avec une puissance nucléaire.
Vous proposez une triple frontière : concrètement, comment l’appliquer en dehors des aéroports ?
Je vous assure qu’il y avait des frontières avant même que le premier avion ne décolle.
La triple frontière c’est d’abord une frontière externe, la frontière au-delà de nos frontières selon la vieille règle du limes romain. Cela passe par des accords de coopération avec les pays de l’autre rive de la Méditerranée, en conditionnant les aides de la France et de l’UE à cette coopération. Soutien à la maîtrise de leurs propres frontières (les pays du Maghreb connaissent des difficultés considérables avec l’immigration subsaharienne), financement de centres pour migrants en-dehors de l’Europe, campagnes de communication dissuasives dans les pays de départ, et coopération non seulement dans la reprise de leurs ressortissants expulsés mais aussi dans la lutte contre l’émigration. Sur ce dernier point, je souligne que l’accord avec la Tunisie conclu sous la pression de Giorgia Meloni a permis de faire chuter de plus de 60% les arrivées de migrants en Italie (et donc en réalité aussi en France…) depuis janvier.
La triple frontière, c’est ensuite une frontière européenne. Cela passe par le blocus naval en Méditerranée, avec une action commune de nos marines militaires européennes pour bloquer les bateaux de migrants, les raccompagner sur leurs côtes et ensuite détruire les embarcations pour assécher le business des passeurs. Cela passe aussi par le renforcement des frontières physiques partout où cela est nécessaire, et le soutien de l’Europe à la construction de murs sur les points de tension.
Enfin, la triple frontière c’est aussi et bien sûr la restauration de nos frontières nationales, l’interdiction de la libre-circulation aux non-Européens (en la réservant donc aux citoyens des pays européens), la fin de la directive européenne sur le regroupement familial et l’expulsion effective de tous ceux qui n’ont rien à faire chez nous.
« Vouloir transformer ce scrutin en un référendum contre Macron, c’est vraiment se tromper d’élection » Marion Maréchal
Cette élection se transforme en référendum contre Emmanuel Macron. Pourquoi un électeur, plutôt que de voter Jordan Bardella afin d’amplifier la sanction contre le gouvernement, devrait-il voter R ! ?
Le vote sanction, et après ? Il n’y aura pas de dissolution, Emmanuel Macron l’a déjà dit clairement et je rappelle qu’il n’y en a pas eu davantage en 2014 ou en 2019, lorsque le RN avait déjà remporté les élections européennes. Vouloir transformer ce scrutin en un référendum contre Macron, c’est vraiment se tromper d’élection, et tromper les électeurs par là même. Nous sommes dans une élection EUROPEENNE, ce qui se joue c’est la politique qui va être menée par l’Union européenne. Je ne crois pas raisonnable de mettre de côté les 5 années qui viennent au niveau européen, avec toutes les conséquences que ça a concrètement sur nos vies, pour un petit plaisir éphémère dimanche soir…
Avec nos 17 alliés européens du groupe des Conservateurs (ECR), qui gouvernent déjà dans 4 pays et qui seront renforcés demain par les élus hongrois de Viktor Orbán, nous pouvons battre le groupe d’Emmanuel Macron au Parlement européen, nous pouvons faire basculer l’Europe à droite et sortir Ursula von der Leyen ! Toutes les projections indiquent que le groupe des Conservateurs est en passe de devenir la force centrale à Bruxelles. Renforcer cette dynamique européenne, en France cela signifie voter pour la liste que je conduis. Nous, nous aurons la capacité à agir, à influer réellement, ce qui ne sera pas le cas du RN, quel que soit son résultat dimanche.
Enfin, l’humiliation est déjà largement acquise pour Macron, tout comme l’élection de Jordan Bardella. Ne vaut-il pas mieux s’assurer que je sois aussi présente à Bruxelles, avec des élus Reconquête!, pour défendre la France et les Français, que d’envoyer un 31e élu RN ?
Les divisions apparues dans votre parti sont-elles d’ordre stratégique, personnel ou politique ?
Vous semblez considérer comme des « divisions » ce que je nomme débat. Oui, on peut et on doit pouvoir débattre des orientations stratégiques ou politiques dans un parti.
Votez Marion Maréchal c’est…
Faire un vote utile pour avoir la capacité d’agir en Europe et nécessaire en France en choisissant la droite qui ne baissera jamais les yeux face au politiquement correct et à la gauche morale. Surtout, voter Reconquête !, c’est donner de la force à la seule liste qui défend depuis toujours une grande coalition des droites, sans laquelle, aucune victoire idéologique et politique ne sera possible. Si Reconquête ! devient incontournable à droite, alors, nous pourrons enfin bâtir cette union des droites que j’ai toujours défendue, y compris quand j’étais député du RN et pour laquelle, j’avais soutenu la candidature d’Éric Zemmour à l’élection présidentielle de 2022.