Un « livre programme », comme on dit dans le jargon, dans lequel l’ancienne chiraquienne défendait sa droite, celle dont elle se voudrait l’incarnation ; « fière de ses valeurs » et défendant « l’autorité, le libéralisme, le social » mais appliqués à la « France d’aujourd’hui », un pays du général de Gaulle qui peut revendiquer sans rire être « écologiste, féministe, décentralisatrice, laïque ».
« Souvent femme varie, fol celui s’y fie », dit l’adage populaire. Car voilà désormais notre présidente de la région Île-de-France s’affirmer dans une posture droitière, évoquant les mânes de notre « civilisation millénaire » en compagnie du sudiste Eric Ciotti, heureux d’avoir créé la surprise lors de cette primaire populaire. Valérie Pécresse en rêvait – pas en se rasant tous les matins –, elle y est presque.
Valérie Pécresse a toujours incarné l’aile progressiste de LR, la droite qui s’est couchée depuis tant d’années face à la doxa dominante de la gauche bien-pensante
Un tiers Thatcher et deux tiers Merkel, elle va enfin pouvoir prétendre au trône tant convoité, et, mieux, être la première postulante au titre de grand Sachem pour la droite « de gouvernement ». La droite, vraiment ? Si, pour vous, la droite se confond entièrement avec le centre-droit et avec l’héritage de Jacques Chirac, Valérie Pécresse s’y trouve probablement. Pour les autres, plus conservateurs, populistes, ou identitaires, le doute est toujours permis.
« J’ai défendu tout au long de ces années les mêmes idées réformatrices, républicaines et sociales, et j’ai toujours soutenu clairement ceux qui me paraissaient les plus à même de les porter », affirmait Valérie Pécresse en claquant la porte des Républicains pour transformer son mouvement Libres ! en parti politique. Las, Emmanuel Macron ne l’appelait finalement pas pour Matignon. Elle avait pourtant bien récité sa leçon, fustigeant Laurent Wauquiez et son obscur conseiller de l’ombre, Patrick Palpatine Buisson.
Qui s’en était alors étonné ? Valérie Pécresse a toujours incarné l’aile progressiste de LR, la droite qui s’est couchée depuis tant d’années face à la doxa dominante de la gauche bien-pensante, comme en témoigne sa cosignature d’une tribune pour « une République multiculturelle et postraciale » diffusée dans le monde à l’initiative de personnalités aussi respectables que Lilian Thuram et Rokhaya Diallo.
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Quel chemin en à peine dix ans que de passer du compagnonnage de Rokhaya Diallo à celui d’Eric Ciotti. Voyez-vous, il y a des élections à gagner et un public de droite courroucé à reconquérir. Et puis, se dit-on probablement rue de Vaugirard, des électeurs fidèles ayant autant de mémoire que des poissons rouges.
Que pense Valérie Pécresse ? Ce n’est pas son discours à l’issue de ces primaires qui nous le dira. Somme de slogans et d’éléments de langage d’une plume en mal d’inspiration, la pensée de Valérie Pécresse semble essayer d’opérer une synthèse entre l’optimisation fiscale macronienne – ou l’optimisme progressiste de 2017 –, et les figures imposées de la « droite vraiment de droite » contemporaine. Il était amusant d’entendre madame Pécresse jouer la petite musique de Valeurs Actuelles, s’appuyant sur le triptyque immigration-islamisme-insécurité pour se donner des airs lepénistes et zemmouriens, tout en s’en distinguant. Nous parlons tout de même d’une grande dame, d’une grande bourgeoise qui n’a rien à voir avec ces gens-là. Son petit passage défendant le socle que représente la famille traditionnelle ne manquait pas non plus de sel, pour une candidate qui, pas plus tard qu’en septembre dernier, affirmait que « sur la PMA pour toutes, moi je l’aurais votée, j’y suis favorable ». Un tiers girouette et deux tiers crocodile – pour grande gueule et petits bras –, Valérie Pécresse est tout à fait représentative de cette droiche d’affaires capable de toutes les culbutes. Tant qu’il y aura des gens pour y croire…