Vous ouvrez votre campagne au Zénith de Reims, qui peut accueillir 3000 personnes : n’est-ce pas gênant symboliquement alors que Zemmour a lancé la sienne devant 15000 personnes ?
Benoît Hamon avait rempli Bercy en 2017, comme Le Pen avait rempli le Vélodrome en 1988 et dans les deux cas, cela ne s’est pas traduit électoralement. L’électorat de Zemmour est plutôt urbain, concentré à Paris, notamment avec les réseaux de la Manif pour tous, qui sont extrêmement mobilisables. En revanche, envoyez Zemmour à la foire de Vesoul pour un bain de foule, une personne sur trois ne saura pas qui il est. En lançant la campagne le 15 janvier, nous allons reproduire la formule des européennes qui avait bien fonctionné avec des petites et moyennes réunions dans les petites villes et villages de France. C’est-à-dire cibler les endroits où les responsables politiques ne vont plus, et où Marine Le Pen, par sa notoriété, peut remplir des salles.
Lancer la campagne à Reims, « où tout a commencé », est-ce pour parler davantage d’identité, sujet sur lequel Zemmour vous coupe l’herbe sous le pied ?
L’enjeu de civilisation sera la question centrale de cette campagne. Nous avions déjà posé cette question en 2017, cela fait cinq ans que l’on traduit ainsi la recomposition du paysage politique français : non plus entre la droite et la gauche, mais entre ceux qui croient en la France millénaire, en la nation et ses protections, et ceux qui veulent sa disparition au profit d’autre chose. Dans cette campagne, Zemmour arrive trois mois trop tôt. Ce que je lui reproche, c’est d’avoir toujours voté pour ceux qui ont organisé et accompagné le déclin. Pour nous, nous avons déjà posé cet enjeu de civilisation sur la table, notamment au moment des élections européennes, qui sont l’exemple même du clivage civilisationnel.
« La différence, c’est que nous parlons de la France et des Français, tandis qu’Éric Zemmour ne parle que de la France sans les Français »
Jordan Bardella
Mais à la fin, cela ne recoupe-t-il pas les termes droite gauche ? Vous aviez dit il y a quelques mois que vous étiez de droite quand même.
Il est évident que je me sens plus proche de Laurent Wauquiez que d’Anne Hidalgo. Il y a des Français qui se sentent de droite, des Français qui se sentent de gauche, mais ce qui se joue dans le cadre de cette élection présidentielle, c’est-à-dire la survie et le destin de la France, dépasse très largement tous ces clivages. Entre Emmanuel Macron et Marine Le Pen, savoir qui joue le candidat de gauche et qui joue le candidat de droite est très compliqué, surtout lorsque Valérie Pécresse explique qu’Emmanuel Macron est la copie tandis qu’elle est l’original. Elle donne même des leçons de macronisme à Macron. Derrière l’enjeu civilisationnel, c’est la question de l’immigration que l’on pose au centre du jeu. Mais aussi la question sociale : quoi qu’on en dise, le pouvoir d’achat reste la première préoccupation des Français. La différence, c’est que nous parlons de la France et des Français, tandis qu’Éric Zemmour ne parle que de la France sans les Français. [...]
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