Pouvez-vous nous expliquer ce qu’est le salon Désir d’enfant ?
C’est un salon organisé par une société britannique qui s’appelle Face to face, et qui réunit des agences, des cliniques et des associations travaillant sur le thème de l’infertilité. Depuis la première édition en 2020, il est donc proposé aux visiteurs des techniques pour avoir un enfant. Mais il faut bien comprendre que ce ne sont pas des solutions proposées par le service de santé français. Il s’agit d’un business avec des solutions moyennant des coûts parfois très élevés, et avec des prestations réalisées dans divers états européens, au Canada ou aux États-Unis. En clair, la finalité est de vendre des PMA (procréation médicalement assistée) ainsi que des GPA (gestation pour autrui), avec des choix sur catalogue de gamètes, des mères porteuses, la sélection du sexe, et ainsi de suite.
Pourquoi la Manif pour tous était-elle présente au salon désir d’enfant ? Quelles actions avez-vous menées ?
Dès la première édition en 2020, La Manif pour tous a organisé des mobilisations devant le salon pour alerter les visiteurs et dénoncer les illégalités et la marchandisation humaine. Nous avons aussi organisé une conférence de presse pour faire connaître le caractère scandaleux de ce salon aux médias. Nous avons également envoyé des militants dans le salon pour poser des questions, prendre des plaquettes publicitaires et enregistrer en audio et en vidéo les personnes dans le salon, l’objectif étant de démontrer de manière irréfutable que nous parlons bien d’un business et d’un trafic international d’êtres humains. Nous avons également interpellé le président de la République, le Premier ministre ainsi que les ministres concernés et le maire du XVIIème. Nous avons, avec d’autres associations, saisi la justice et déposé des plaintes en 2020 et 2021, avec constitution de partie civile.
Toutefois, en 2022, le dispositif était différent puisque sous la pression, le salon a renoncé à proposer des GPA. Néanmoins, il faillait tout de même vérifier car ils restent des trafiquants, et d’autres choses complètement illégales y sont par ailleurs proposées.
Justement, pourquoi n’y avait-il pas de stand GPA cette année ?
Depuis la fin juillet, sur leur site, le salon de Désir d’enfant a expliqué qu’il n’y aurait pas de stand pour la GPA cette année. Par là même, il reconnaissait donc que cela avait été fait précédemment et qu’en l’occurrence cela posait des problèmes. Et de fait, nous avons mené l’enquête pour vérifier durant le week-end, et la GPA avait effectivement totalement disparu de ce salon. Certes, il y a eu la signature d’un livre témoignage sur la GPA écrit soi-disant par la fille d’un couple qui témoignait de sa propre histoire, mais au-delà de cela, aucune proposition de GPA ni aucune plaquette publicitaire. C’est donc une grande victoire pour nous.
Pensez-vous qu’ils puissent remettre des stands GPA dès l’année prochaine ?
Je ne pense pas. D’après nos informations, la société qui loue l’espace Champerret se trouvait dans l’illégalité, et était complice de tentatives d’entremise en vue de GPA. La société VIPARIS (la société qui s’occupe de l’espace Champerret) a veillé à ce que la GPA ne soit pas proposée. La question est maintenant de savoir si le salon se déplacera dans une autre salle qui ne portera pas la même attention sur ces questions, ou est-ce qu’ils le réorganiseront selon les mêmes modalités et finiront par renoncer. Notre objectif est évident : nous souhaitons qu’ils renoncent à venir renoncer à proposer des enfants sur le territoire français.
« Il y a effectivement une propagande en faveur de la GPA depuis des années. Certains essayent d’orienter l’opinion publique dans le sens de la GPA, notamment avec l’idée que la GPA puisse être éthique. »
Ludovine de La Rochère
Malgré cette victoire, craignez-vous que la GPA soit inscrite à l’agenda législatif lors du prochain quinquennat ?
Il y a effectivement une propagande en faveur de la GPA depuis des années avec des films, des sondages, des témoignages. Certains essayent d’orienter l’opinion publique dans le sens de la GPA, notamment avec l’idée que la GPA puisse être éthique. La pression est de plus en plus grande avec le temps. Pour autant, la GPA reste un sujet très clivant. La GPA de manière très évidente exploite des femmes, ce qui rentre en contradiction avec l’égalité homme-femme mise en avant par Emmanuel Macron et son gouvernement. Visiblement, le trafic d’enfant ne les gêne pas, ce n’est même pas le sujet.
Plus qu’un projet législatif pour autoriser la GPA, nous craignons qu’Emmanuel Macron tente de passer par l’international. Tout d’abord, il est en train de pousser auprès de la Commission européenne un projet de directive pour la reconnaissance de la GPA. En clair, tous les États membres devraient reconnaître la GPA et la filiation d’intention, c’est-à-dire la filiation fictive entre les commanditaires d’un enfant et l’enfant obtenu par la GPA. De plus, la France participe à un groupe de travail à la conférence de La Haye, instance très peu connue mais très importante. Cette cour est une instance de droit international privé spécialiste des questions d’adoption, de filiation et d’autres choses, 97 États en sont membres. Le but de ce groupe de travail : faire admettre la GPA à tous les États-membres. Enfin, au sein du cabinet du ministre de la justice, il y a aussi un projet pour pouvoir accepter la reconnaissance de filiation pour la GPA. On voit bien que c’est toujours du pas-à-pas. Les Français peuvent tranquillement aller à l’étranger pour faire une GPA car non seulement la loi ne les empêche pas, mais en plus quand ils reviennent avec le bébé qu’ils viennent d’acheter, la France les reconnaît comme les vrais parents de l’enfant. C’est cette étape-là qui est aujourd’hui à très haut risque et nous nous battons sur ce front-là de manière très active. En clair, ils veulent imposer la GPA pas à pas, en passant sous les radars.